«Blindness»: quand la condition humaine est mise à nu

Mohamed Nait Youssef

Il est des moments cruciaux qui ont changé complètement le visage de l’humanité. L’épidémie en fait partie. En effet, dans le film «Blindness» (octobre 2008) du brésilien Fernando Meirelles, réalisateur également du fameux opus «La Cité de Dieu», la condition humaine de l’homme des temps modernes est mise à nu.

Un zoom sur un monde aveugle ayant perdu ses repaires. Ainsi, ce thriller puisant, rythmé, interpelant, archi-découpé est une adaptation de L’Aveuglement ; roman du Prix Nobel de Littérature en 1998 de l’écrivain portugais José Saramago. Un roman dur, le film aussi ! Toutefois, l’histoire de ce drame de deux heures environ a commencé quand une mystérieuse peste touche toute une communauté.

C’était un beau matin. La ville a l’air paisible et tranquille. Soudain, un homme entre deux âges, au volant de sa voiture, perd bizarrement la vue. Il s’agit d’un virus étrange qu’il a transmis à chaque personne rencontrée. Ensuite, l’épidémie  flâne dans les ruelles et pousse les gens à s’enfermer sur eux. La mort est arrivée dans les lieux ! Alors que cet ennemi invisible se propageait d’une vitesse fulgurante et mortelle, les premiers cas contaminés sont mis dans un hôpital  désaffecté de la place.

La panique hante les esprits, et les personnes touchées par le virus sont livrées à leur sort. Elles devront alors assurer leurs besoins à savoir la nourriture et les soins pour qu’elles puissent s’en sortir et surtout survivre. Si non, c’est bel et bien la catastrophe ! Seule  la femme du médecin (Julianne Moore)  s’est échappée à la dangereuse «cécité» ou «blancheur lumineuse».

Une lueur d’espoir surgit dans les ténèbres d’une communauté à la fois violente et individualiste. En outre, la femme en question guidera ces gens  pour fuir aux instincts les plus vils. Une grande leçon sur l’humanisme, l’entraide et le sacrifice. Il faudrait rappeler que le réalisateur de «Blindness» a opté pour plusieurs lieux pour tourner  son film, à savoir des villes comme  São Paulo,  Montevideo et la prison de Guelph en Ontario au Canada pour les scènes filmées dans  l’hôpital.

Un monde aveugle, malade dans sa peau…

«Si le monde était clair, l’art ne serait pas», disait Albert Camus. A vrai dire, Fernando Meirelles a essayé dans son film de mettre le doigt sur l’autre facette de l’homme, à savoir ses valeurs, son essence et sa condition humaine. Le cinéma sert parfois à ça ; à mettre les mots sur les maux du monde entre autres son individualisme et l’absence de son sens.

«Avec Blindness, le cinéaste brésilien décrit un monde en pleine déliquescence, victime d’une épidémie de cécité qui pousse les gouvernements à des mesures radicales. Raconté en trois actes très inégaux : la propagation du fléau, le camp concentrationnaire, l’errance dans la mégalopole, le nouveau film de l’auteur de «La Cité de Dieu» lorgne du côté du cinéma très noir de Lars von Trier, en reprenant notamment le gimmick d’une voix-off distancée et moralisatrice»,  a écrit le critique de cinéma Yannick Vély sur le film. Et d’ajouter : «La farce métaphorique s’enfonce ainsi dans les clichés, même si le personnage de la madone protectrice, incarnée par la parfaite Julianne Moore, donne un peu de nuance à cette vision misanthropique de l’âme humaine. Les artifices de mise en scène utilisés ça et là, comme lors de la scène du viol collectif, accentuent même le malaise de cette démonstration beaucoup trop lourde pour convaincre. Reste une dernière demi-heure qui confirme le talent visuel du réalisateur de The Constant Gardener et imprime durablement la rétine».

Une adaptation minutieuse…

Deux univers différents. La littérature était depuis toujours l’une des sources inépuisables pour les cinéastes et les réalisateurs. Dans cette optique, Fernando Meirelles n’y va pas par quatre chemins. Il a adapté minutieusement le roman Ensaio sobre a Cegueira ou l’aveuglement  (1995) de l’écrivain portugais José Saramago. «Fernando, je suis tellement heureux d’avoir vu ce film comme j’étais le jour où j’ai fini le livre», a confié l’auteur du roman à Fernando, lors d’une projection privée. A vrai dire, certaines œuvres cinématographiques donnent une nouvelle vie aux histoires, aux personnages, aux œuvres romanesques..

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