Henri Konan Bédié appelle à la «désobéissance civile»

Côte d’Ivoire

Nabil Bousaadi

Après avoir été élu, une première fois en 2010, puis réélu en 2015, le président ivoirien Alassane Ouatarra, 78 ans, qui avait annoncé en mars dernier qu’il ne briguerait pas un troisième mandat dès lors que ce serait contraire à la Constitution a fini par changer d’avis en Août dernier suite au décès de son Premier ministre et dauphin désigné Amadou Gon Coulibaly. La participation d’Alassane Ouatarra à ce scrutin s’appuierait sur le fait que le Conseil Constitutionnel – tout acquis à la cause du Chef de l’Etat – estimerait qu’avec la nouvelle Constitution de 2016, le «compteur des mandats du président Ouatarra a été remis à zéro»; ce que conteste farouchement l’opposition ivoirienne.

Aussi, en considérant qu’un troisième mandat présidentiel pour Alassane Ouatarra serait une «forfaiture», Henri Konan Bédié, 86 ans, qui avait présidé aux destinées de la Côte d’Ivoire de 1993 à 1999, a déclaré, sous un tonnerre d’applaudissements, lors de la grand-messe ayant réuni, ce dimanche, les principaux partis de l’opposition au siège du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), que pour y faire face le «seul mot d’ordre (reste) la désobéissance civile».

S’étant érigé en leader de l’opposition, ces deux dernières années, après avoir pris ses distances avec Alassane Ouatarra, Henri Conan Bédié, qui avait été chassé du pouvoir par un coup d’Etat militaire, ne s’est pas étalé sur les formes que devrait prendre cette «désobéissance civile». Aucune précision n’ayant été apportée quant aux modalités d’actions et aux formes que devrait revêtir cette «désobéissance», il semblerait, néanmoins, que le «boycott de la présidentielle» – une hypothèse évoquée auparavant – ne serait plus de mise.

Mais si aux côtés du vieux président qui entend «restaurer l’Etat de droit et la démocratie» étaient présents ce dimanche, Assoa Adou, le secrétaire général du Front Populaire Ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo, Zié Koné représentant le mouvement «Générations et Peuples Solidaires» (GPS) de Guillaume Soro ainsi que les responsables d’autres petits partis politiques, force est de reconnaître, toutefois, que bien qu’étant unanime contre un troisième mandat d’Alassane Ouatarra, l’opposition peine encore à trouver une stratégie commune face au pouvoir puisqu’à l’heure qu’il est, aucune union électorale n’a encore été annoncée.

Aussi, cette absence de stratégie commune fait-elle craindre une résurgence des violences meurtrières qu’avait connues le pays après la crise post-électorale de 2010 qui s’était soldée par plus de 3.000 morts.

D’ailleurs, en Août dernier et dès l’annonce de la candidature du président Alassane Ouatarra à un troisième mandat, près d’une quinzaine de personnes seraient tombées lors des échauffourées qui avaient éclaté entre les partisans et les adversaires du chef de l’Etat. Au cours des manifestations qui ont eu lieu, mardi dernier, en divers endroits du pays l’opposition a réclamé la dissolution de la Commission Electorale Indépendante (CEI) et du Conseil Constitutionnel considérés comme étant dans l’incapacité d’organiser une élection «transparente» du fait de leur trop grande proximité avec le pouvoir d’Alassane Ouatarra; une proximité confirmée par le rejet de la candidature de Laurent Gbagbo en dépit de son acquittement par la CPI des crimes contre l’humanité pour lesquels il était poursuivi.

Autant de raisons qui ont poussé l’Organisation des Nations-Unies à intervenir pour faire éviter au pays une réédition des violences post-électorales de 201o, en dépêchant, en Côte d’Ivoire et pour une mission d’une semaine, Mohamed Ibn Chambas, son représentant spécial pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel.

Après s’être entretenu avec les différents partenaires, l’envoyé de l’ONU dont «la visite s’inscrit dans le cadre de l’accompagnement des Nations-Unies pour l’organisation d’une élection présidentielle pacifique, inclusive, transparente et crédible» a invité «à la retenue tous les acteurs» de la présidentielle du 31 Octobre et exhorté ces derniers «à la concertation».

Cet appel au calme et à la retenue lancé par l’Organisation des Nations-Unis pour faire éviter à la Côte d’Ivoire un nouveau bain de sang sera-t-il entendu par les différents protagonistes ? Osons l’espérer et attendons pour voir…

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