Attendons pour voir…
La Chine a toujours considéré l’île de Taïwan, qui compte 23 millions d’habitants, comme étant une province rebelle qui devra, tôt ou tard, retourner sous son aile comme le firent, avant elle, Hong Kong en 1997 et Macao en 1999, deux entités désormais soumises au principe «un pays, deux systèmes».
Mais, en multipliant, ces derniers temps, les incursions de ses chasseurs et de ses bombardiers dans la zone d’identification de défense aérienne (espace aérien) de Taïwan, Pékin a fait craindre une rupture du statu quo dans la région et poussé, en conséquence, Washington à hausser le ton.
Aussi, en considérant que «Taïwan est un partenaire crucial des Etats-Unis et une réussite démocratique», le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a réclamé, dans un communiqué en date du 26 Octobre, une «participation effective» de Taïwan à l’ONU et appelé, à ce titre, le reste du monde à «soutenir (sa) participation significative et robuste dans le système de l’ONU » au motif que sa contribution y serait nécessaire pour faire face à « un nombre sans précédent de défis mondiaux».
Rappelant, par ailleurs, que la participation de Taïwan à «certaines agences spécialisées de l’ONU» avait été «effective» tout au long de ces cinquante dernières années, le secrétaire d’Etat américain a tenu, néanmoins, à préciser que, ces derniers temps, celle-ci est devenue impossible principalement au sein de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et de l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI) du fait notamment de l’opposition grandissante de la Chine.
Mais en soulignant, en outre, que «l’exclusion de Taïwan sape le travail important de l’ONU et de ses agences», Antony Blinken a déclaré qu’une participation taïwanaise au système onusien «n’est pas une question politique mais une question pragmatique» conforme à la doctrine qui a toujours été adoptée par l’ONU tant à l’égard de la Chine que de Taïwan.
En réponse à cela, la diplomatie taïwanaise a chaleureusement remercié, sur son compte Twitter, le secrétaire d’Etat américain aux Affaires étrangères pour avoir bien voulu reconnaître «le rôle de Taïwan en tant que partenaire vital des Etats-Unis et en tant que modèle démocratique » mais, également, pour le « soutien crucial» que Washington apporte à Taïpeh à l’effet de lui permettre de «faire face efficacement aux défis mondiaux».
Il n’en fallait pas plus pour soulever l’ire de l’Empire du milieu qui a déclaré, mercredi, par la voix du porte-parole du bureau des affaires taïwanaises à Pékin, que «Taïwan n’a aucun droit de participation à l’ONU» car seuls les Etats souverains peuvent y adhérer.
Mais, si Washington a toujours préconisé une meilleure représentation de Taïwan au sein des agences des Nations-Unies, force est de reconnaître que le timing choisi, cette fois-ci, alors que les tensions entre les Etats-Unis et la Chine sont à leur comble, aussi bien à propos de «la question taïwanaise» proprement dite et du sort de l’île que sur d’autres sujets tout aussi épineux les uns que les autres, est une sérieuse mise en garde adressée au régime communiste au moment où celui-ci vient de célébrer, avec faste, le cinquantième anniversaire de son adhésion à l’Organisation des Nations Unies.
La Maison Blanche est allé encore plus loin dans ses provocations lorsqu’en réponse à une question afférente à l’éventualité d’une riposte militaire américaine pour défendre Taïwan en cas d’attaque par la Chine, le président Joe Biden a clairement affirmé : «Oui, nous avons un engagement en ce sens».
Aussi, en considérant que la déclaration faite par le président américain va à l’encontre de la politique d’«ambigüité stratégique » menée par Washington dans la région en vertu de laquelle cette dernière a toujours aidé Taïpeh à renforcer ses défenses sans jamais lui promettre de voler à son secours en cas d’attaque, Pékin a appelé à la «prudence» afin de «ne pas nuire gravement aux relations sino-américaines » et poussé, ainsi, Washington à déclarer, ouvertement, que sa politique à l’égard de Taïwan n’avait pas changé.
Et s’il convient de rappeler que, bien que les Etats-Unis reconnaissent, depuis 1979, la Chine communiste, au détriment de Taïwan, le Congrès américain impose, au même moment, au gouvernement américain de fournir, à cette dernière, des armes pour se défendre en cas de besoin, alors de quoi demain sera-t-il fait dans le détroit de Taïwan ?
Nabil El Bousaadi