Attendons pour voir…
Nabil EL BOUSAADI
« Panique à bord ! » serait-on tentés de dire au vu de la vive inquiétude éprouvée par les chancelleries occidentales lorsque l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) a annoncé, ce samedi, que la République islamique iranienne serait, désormais, en possession d’un uranium qui serait enrichi à 84%, soit à peine en-deçà des 90% nécessaires à la production d’une bombe atomique.
Mais, si, dans l’attente de l’obtention de plus amples « informations » provenant de l’AIEA, la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, a déclaré, à des journalistes à Bruxelles, qu’en cas de confirmation, cette révélation « constituerait un élément nouveau et extrêmement préoccupant », le chef de la diplomatie européenne, Josep Borell a signalé, pour sa part, qu’après les « nouvelles inquiétantes » qui lui sont parvenues à propos de l’enrichissement de l’uranium par Téhéran, il a sommé l’Iran, au cours d’un entretien téléphonique qu’il a eu avec le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, de « remplir ses obligations ».
Mais en récusant ces informations qu’il a jugées mensongères, Nasser Kanani, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, a appelé l’AIEA à « adopter une attitude professionnelle concernant les activités nucléaires pacifiques de l’Iran » et, en abondant dans le même sens, Behrouz Kamalvandi, le porte-parole de l’Organisation de l’Energie Nucléaire Iranienne, estimant que ces allégations relèvent d’une « distorsion des faits » dès lors que les autorités iraniennes n’ont fait aucune « tentative » pour un enrichissement de l’uranium « au-delà de 60% », a tenu à préciser que « la présence de particules au-delà de 60% ne signifie pas qu’il y ait eu un enrichissement (d’uranium) à plus de 60% » car cette concentration pourrait, également, avoir pour origine « une accumulation involontaire » qui résulterait de difficultés techniques qui auraient affecté les centrifugeuses.
Il y a lieu de rappeler, par ailleurs, qu’après le retrait, en 2018, des Etats-Unis de l’accord de Vienne encadrant les programmes nucléaire et balistique de l’Iran, la république islamique avait estimé qu’il était de son devoir de s’affranchir progressivement des obligations qui lui avaient été fixées par l’accord précité.
C’est donc dans ce cadre-là que les autorités iraniennes avaient commencé à produire, de manière officielle, de l’uranium enrichi à 60% dans les sites de Natanz et de Fordo, dépassant de très loin le seuil de 3,67% qui leur avait été fixé par ledit accord ; ce qui avait poussé, en Janvier dernier, le directeur-général de l’AIEA, Rafael Grossi, à émettre de sérieuses inquiétudes quant à « la trajectoire » prise par le programme nucléaire des Iraniens qui, à ses yeux, auraient «amassé suffisamment de matériel nucléaire pour fabriquer plusieurs armes nucléaires » avant de reconnaître, par la suite, qu’il leur restait encore plusieurs étapes à franchir.
Aussi, tout en saluant la prochaine visite à Téhéran de Rafael Grossi, le chef de la diplomatie iranienne a tenu à préciser que « si l’Agence agit avec un objectif technique et non politique, il sera possible de s’accorder sur un cadre à même de résoudre » le différend qui porte sur le nucléaire iranien.
Est-ce à dire qu’en dépit de toutes les sanctions auxquelles elle est assujettie, en matière d’enrichissement de l’uranium, la République islamique iranienne – bien qu’elle s’en défende – se rapproche inexorablement des 90% nécessaires à la fabrication d’une bombe atomique ? Attendons pour voir…