Le passage à un régime de change plus flexible continue d’attiser les craintes des opérateurs économiques, particulièrement ceux qui opèrent régulièrement dans l’import-export. Les rencontres régionales organisées par certaines banques ont démontré que de nombreuses entreprises, surtout les PME, n’ont pas une connaissance suffisante en matière de gestion du risque de change. Des experts du monde de la finance nous livrent quelques pistes permettant aux entreprises de préserver leur marge commerciale des effets de la volatilité des cours de change.
Change à terme
Le change à terme est l’une des solutions permettant à un importateur ou exportateur de se protéger contre les fluctuations de la devise, fait-savoir Abdelouahed El Jay, économiste et ancien directeur à Bank Al-Maghrib. Cet instrument de couverture, proposé par les banques, permet à l’entreprise de déterminer immédiatement le cours d’achat de ses devises pour un règlement ultérieur. Ainsi, «un opérateur devant régler une facture dans trois mois peut conclure immédiatement un contrat à terme prévoyant un taux de change préétabli en monnaie étrangère à une date ultérieure», explique El Jay. En fixant avec la banque le cours qui sera appliqué à l’échéance, l’entreprise pourra ainsi minimiser les risques de change. Il s’agit en fait d’un contrat irréversible.
Cela dit, «le cours qui sera appliqué lors de l’achat de la devise sera celui sur lequel l’opérateur et la banque se sont mis d’accord lors de la conclusion du contrat quelle que soit la situation du marché», précise El Jay. Autrement dit, l’opérateur ne pourra pas réclamer la révision du taux préétabli si la valeur du dirham s’est appréciée au moment du règlement.
Options sur devises
Les options sur devises sont un autre outil qui peut permettre à une entreprise d’atténuer le risque de transaction. Ces options lui donnent le droit d’acheter ou de vendre à une date ultérieure des devises à un taux de change préétabli. L’opérateur a le choix entre le taux proposé lors de l’achat de l’option et le cours du marché. Abdelouahed El Jay cite l’exemple d’une entreprise qui achète une option lui donnant le droit d’acter un dollar américain à 9,8 dirhams dans trois mois. Si, à ce moment, le cours du marché est à 10 DH, elle peut abandonner l’option en faveur du taux appliqué sur le marché. Les options sur devises ne l’obligent donc pas à vendre ou à acheter des devises contrairement aux contrats à terme. Pour bénéficier de ce choix, il faut verser une prime qui ne pourra pas être récupérée si l’entreprise opte pour le cours du marché au lieu du taux de change préétabli.
Comptes en devises
D’autres instruments de couverture sont préconisés, à l’instar de l’utilisation des comptes en devises. Aujourd’hui encore, la majorité des opérateurs dispose de comptes en dirhams convertibles. En basculant vers des comptes en devises, les opérateurs, en l’occurrence ceux dont l’activité dépend des marchés extérieurs, pourront éviter le risque de change. Techniquement, le montant de l’opération va être facturé sur ce compte en devises. Il n’y aura donc aucune opération de change. D’autant que les comptes en devises permettent à l’entreprise d’économiser le paiement de la commission des changes sur ses achats et ventes de devises contre le dirham.
Processus opérationnel
Pour se protéger des fluctuations, Abdelmalek Mouatadid, directeur des marchés de la BCP, appelle les entreprises à mieux maîtriser leur processus opérationnel et à connaître à quel moment le risque de change doit être couvert (à la facturation, à la passation de la commande ou à la réception). Le suivi du marché pour connaître son évolution et ses perspectives s’impose aussi. Pour Mouatadid, ce n’est qu’en adoptant cette démarche qu’on pourrait bien choisir son instrument de couverture. Il propose aussi aux importateurs de mieux négocier le mode de règlement de leurs factures. A titre d’exemple, ces opérateurs peuvent négocier une partie en euros et une autre en dollars. Cela permettra de compenser toute évolution défavorable de l’euro par une évolution favorable du dollar et vice versa. Dès lors, l’opérateur doit acheter les deux devises en même temps.
Swap
Les experts joints par Al Bayane mettent en avant un autre instrument : le recours au swap qui peut aider les entreprises à faire correspondre les dates des entrées et sorties de devises. Cette mesure consiste à conclure un accord avec une autre partie pour échanger des flux d’intérêts fixes contre des flux variables, en général dans la même devise. Dans ce schéma, les deux parties s’engagent à effectuer régulièrement des paiements correspondants aux intérêts mutuels, ainsi qu’à se rendre le montant échangé à une échéance déterminée.
Hajar Benezha