Par Abdeslam Seddiki
Notre pays continue de vivre dans un climat d’incertitude et d’inquiétude. Les mesures prises jusqu’à présent depuis l’apparition de la pandémie covid-19 ont été certes utiles en apportant des réponses ponctuelles aux problèmes du moment. Le Fonds dédié a joué parfaitement son rôle de stabilisation sociale et de sauvetage économique.
Avec la sortie du confinement et la reprise progressive de l’activité, il faudrait absolument passer à une nouvelle étape qui nécessite des mesures audacieuses seules à même d’apporter l’espoir et de dissiper les doutes afin de rétablir la confiance et permettre à notre économie de relever la tête de l’eau. C’est pour cela que le Discours du trône adressé par le Souverain à la Nation a été très attendu.
Le Roi a, effectivement, pris les choses en main en mesurant «l’ampleur de la crise et ses fâcheuses retombées sanitaires, mais aussi économiques et sociales», et en adressant des messages forts et mobilisateurs sous forme d’une feuille de route pour les prochaines années. Ces mesures, présentées avec méthode et cohérence, concernent, à la fois, l’économique, le social et la gouvernance.
Sur le plan économique, on retiendra du discours Royal : l’annonce d’un plan ambitieux de relance d’un montant de 120 MM DH (soit l’équivalent de 11% du PIB) «pour permettre aux secteurs de production de se remettre d’aplomb, d’accroître leur capacité à créer des emplois et à préserver les sources de revenu»; la création d’un Fonds d’investissement stratégique pour remplir une mission d’appui aux activités de production, d’accompagnement et de financement des grands projets d’investissement public-privé.
Au niveau social, on soulignera : la généralisation de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO) et des allocations familiales, qui sera étendue par la suite à la retraite et à l’indemnité pour perte d’emploi ; l’opérationnalisation du Registre social unifié (RSU) et la généralisation effective de la couverture sociale à l’horizon 2025.
Concernant la gouvernance, le Souverain a appelé à une «réforme profonde du secteur public pour corriger les dysfonctionnements structurels des établissements et des entreprises publics, garantir une complémentarité et une cohérence optimales entre leurs missions respectives et, in fine, rehausser leur efficience économique et sociale». À cette fin, il est prévu la création d’une Agence Nationale dont la mission consistera à assurer la gestion stratégique des participations de l’Etat et à suivre la performance des établissements publics.
Autant de chantiers prometteurs qui s’articulent entre trois domaines structurés et structurants. Il appartient désormais au gouvernement d’être à la hauteur de ces ambitions royales exprimées avec force à l’occasion d’un anniversaire dont on mesure la connotation symbolique et la portée historique.
Le Roi qui a tenu à rassurer les citoyennes et citoyens avec des termes pathétiques d’un Bon Père de Famille a annoncé clairement ce qu’il faudra faire. Au gouvernement de se retrousser les manches et se mettre au travail en se comportant en équipe qui joue pour gagner. La première des choses que ce gouvernement doit faire consiste à mettre fin aux disputes « dominicales » et aux calculs étroitement politiciens qui réduisent l’efficacité de son action. On ne peut pas continuellement tirer à hue et à dia. C’est la responsabilité première du Chef du gouvernement qui doit jouer son rôle de chef d’orchestre.
Le temps presse. La concrétisation et l’implémentation du plan de relance est une œuvre d’Hercule. Il faut d’abord un montage financier de ce plan en arrêtant les moyens de financement avec tous les arbitrages nécessaires et les choix doctrinaux qui s’en suivront. Il faut ensuite passer à l’affectation dudit plan aux niveaux sectoriel et territorial. Tous les secteurs et tous les groupes sociaux, on l’a vu avec le Fonds Covid-19, sont demandeurs parfois d’une façon exagérée et chacun souhaite d’être «servi» avant les autres.
Le plan de relance, comme son nom l’indique, a une finalité bien définie qui n’a rien à voir avec une «caisse d’assistanat». Il vise essentiellement à soutenir l’entreprise en difficulté pour se mettre en marche, à préserver les emplois, à favoriser l’embauche et à dynamiser les territoires, en s’inscrivant dans un horizon stratégique et en mettant l’intérêt national au-dessus de toute autre considération.