La transhumance politique

On ne le dira jamais assez ! Depuis déjà quelques années, on fait de son mieux pour assainir et relever la vie partisane nationale. Cette ébauche paraît pesante comme si l’on tirait un boulet de fer massif vers l’avant. D’une part, les poches de résistance ne sont pas du tout prédisposées à suivre la cadence de l’évolution, car elles y laissent automatiquement leur peau. D’autre part, les professionnels de la fraude électorale ne sont pas non plus prêts à céder leur « suprématie », qui leur procure immunité et impunité.

Dans de sens, s’il y a un acquis dont le champ politique marocain pourrait se targuer, ce serait incontestablement l’abolition du phénomène de transhumance au sein de l’Hémicycle. Une prouesse de toute célérité qui aurait, sans doute, pénalisé, d’une part, le nomadisme partisan d’une certaine cohorte itinérante et, d’autre part, crédité une action représentative, longtemps mise à mal par de ces errances démesurées. Depuis un certain temps, le comptage des uns et des autres groupes et groupements demeure inchangé durant le mandat, sans se soucier des glissements et infiltrations, de part et d’autre, sous une coupole affectée par un douloureux discrédit.

On se souviendra, bien naturellement, de la mascarade dont fut l’objet la Chambre des conseillers, lors du surpeuplement hybride d’une formation politique qui, à peine pondue et sans avoir jamais pris part aux élections au préalable, s’en trouvait au paroxysme, d’un tour de prestidigitation fulgurant. D’autres grignotaient, par-ci, par-là, des épaves volantes en quête de prestige. Aujourd’hui, cette supercherie n’est plus qu’un souvenir lugubre. Plus personne n’est censé se jouer de la déontologie des institutions. Plus personne n’est en mesure de pomper dans les rangs des autres.

Maintenant, si l’on ne pense même plus à cette imposture sévissant, des années durant, dans le paysage politique national, d’aucuns souhaiteraient vivement que le même effort taraude un autre fléau qui continue à souiller l’opération votative dans notre pays, quoique des avancées notoires aient émaillé ces parcours. Il s’agirait, en fait, de la profusion de l’argent sale qui émousse, sans vergogne, le débat des idées et des programmes. Jusqu’ici, à défaut de mettre un terme à cette hécatombe qui ne cesse de ronger nos élections, les notabilités inciviques n’arrêteraient jamais de faire usage de cet « outil » infaillible, au sein d’un électorat frappé par le dénuement,  l’illettrisme et la
tentation.

Certes, on a tenté certaines mesures dans le sens de l’endiguement de ces manies dévastatrices, au niveau des textes. Cependant, ni la volonté tamisée, ni l’action biaisée, ni la riposte fragilisée ne sont parvenues à y faire face. C’est là un chantier des plus rudes auxquels doivent s’atteler toutes les constituantes de la vie politique, afin d’asseoir un véritable jeu démocratique, axé sur le respect du texte et du contexte.

Saoudi El Amalki

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