Adhésion à la CEDEAO: Le Maroc est-il allé trop vite?

C’est une sorte de mise en garde sur l’éventuel blocage de l’adhésion du Maroc à la CEDEAO que le Conseil économique, social et environnementale (CESE) vient de lancer dans son rapport annuel.

Alors que Rabat espère une adhésion rapide, le CESE laisse entendre que le chemin à parcourir est encore long. Visiblement, le Maroc a fait preuve de précipitation dans cette affaire puisque sa demande d’adhésion à la CEDEAO n’a pas fait l’objet d’une étude d’impact pour en analyser les opportunités et les risques. Or, une analyse détaillée des avantages et inconvénients est une étape décisive, comme le souligne le Conseil. Plusieurs raisons motivent cette démarche.

L’élaboration d’une étude d’impact permettrait d’argumenter, vis-à-vis du citoyen, les retombées positives dont le Maroc pourrait bénéficier directement ou indirectement à l’issue de cette adhésion, note le Conseil. De même, cet exercice permettra de livrer des scénarios alternatifs, notamment une intégration graduelle.

L’intégration de la CEDEAO pose de nombreux défis pour le Maroc. A commencer par l’abandon du dirham en faveur d’une monnaie unique. Sur ce point, le Conseil appelle à approfondir l’évaluation de la faisabilité économique d’une union monétaire. Certes, l’adoption d’une monnaie unique au sein de cette communauté régionale s’étalera sur plusieurs décennies, mais le Maroc devrait en évaluer les conséquences avant que son adhésion ne soit actée.

Une chose est sûre : d’importantes opportunités commerciales s’offrent au Maroc. Bémol cependant : les PME risquent de ne pas profiter pleinement de ces niches. Le Conseil en semble conscient. D’où son appel à s’assurer que l’adhésion à ce groupement puisse profiter également aux PME marocaines et non seulement aux grands groupes.  Le Conseil insiste sur l’impératif de faire bénéficier les PME d’un accompagnement financier et technique qui leur permettrait de mieux connaitre les marchés potentiels au niveau de la CEDEAO.

D’autres défis se posent. Le fait que l’adhésion suppose l’application d’un tarif douanier commun soulève quelques potentielles incompatibilités avec les tarifs des accords déjà signés par le Maroc. Sur ce registre, il convient de souligner que l’application du Tarif extérieur commun de la CEDEAO n’est pas effective dans tous les Etats membres. En attendant, le Maroc est appelé à revoir ses barrières douanières avec l’Afrique subsaharienne. Le CESE affirme que la réduction mutuelle des barrières douanières est indispensable pour accélérer l’intégration commerciale entre le Royaume et le reste du continent. D’imports écarts sont constatés dans ce domaine.

A titre d’exemple, l’examen du tarif douanier moyen appliqué par le Maroc aux importations manufacturières, montre que le taux de 12,7% appliqué en 2016 pour les importations émanant de l’Afrique subsaharienne, est nettement supérieur au taux moyen appliqué par le Maroc à l’ensemble de ses partenaires (toutes origines confondues) qui est de l’ordre de 3,9%. En contrepartie, le tarif douanier moyen appliqué par les pays de l’Afrique subsaharienne aux importations issues du Maroc dépasse celui qu’ils appliquent aux importations de l’ensemble des partenaires internationaux, soit 16,6% contre 11,4%, respectivement.

Autre défi de taille : le renforcement de la connectivité logistique entre le Maroc et les partenaires africains. Il ne faut pas se voiler la face. La plupart des pays du continent enregistrent de faibles performances dans ce domaine. Preuve en est, le classement du «Logistic Performance» Index qui montre que sur les 40 performances logistiques les plus faibles au monde, la moitié est constituée de pays de l’Afrique.

Hajar Benezha

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