Appel à un rééquilibrage des investissements

L’inefficacité de l’allocation des ressources revient en boucle. CESE, Cour des comptes et d’autres instances ont tiré la sonnette à plusieurs reprises. Cette fois-ci, c’est la commission économique pour l’Afrique de l’ONU qui s’est saisie de la question lors d’une réunion tenue à Rabat en fin de semaine dernière.

Les participants ont examiné le lien entre l’allocation des ressources et la transformation économique en Afrique du Nord. Ils confirment que la mauvaise allocation des ressources est une source importante de faible croissance. Si le Maroc affiche un taux d’investissement des plus élevés dans le monde (d’une moyenne de 33%), le rendement de ces investissements reste faible. On reproche au Royaume d’accorder la priorité aux secteurs non productifs au détriment des secteurs productifs. Le directeur de la prévision et de la prospective au Haut-Commissariat au Plan (HCP), Ayache Khellaf, a précisé que les investissements dans les services avoisine les 45%, alors que le taux reste limité à 30% dans l’industrie et seulement 7% dans l’agriculture.

Cette situation n’est pas propre au Maroc, mais tous les pays de l’Afrique du nord sont logés à la même enseigne.  Le constat est le même : l’action de l’État est inadéquate. Les instruments utilisés, par nature, peuvent générer des distorsions. Pour les experts de la CEA, la fiscalité crée généralement des distorsions et les subventions accordées à certaines entreprises portent atteinte à l’égalité des conditions de concurrence. Au niveau de la mise en œuvre des politiques, les bureaucrates utilisent leur pouvoir discrétionnaire pour faire de la discrimination entre les entreprises et favoriser certaines par rapport à d’autres. De plus, les entreprises ayant un pouvoir politique influencent la réglementation en leur faveur. Pour la CEA, les gouvernements d’Afrique du Nord devraient se concentrer sur une idée plus large, celle de l’allocation optimale des ressources entre les entreprises au sein des secteurs et entre les secteurs. Pour les intervenants, le pilier central de la croissance demeure l’augmentation de la productivité des entreprises au sein d’un même secteur.

La rencontre des experts de la commission économique pour l’Afrique s’est soldée par l’adoption d’une série de recommandations qui feront l’objet d’une étude. A commencer par la mise en place d’un environnement stable et fondé sur des règles pour les entreprises. Cela constitue une condition préalable à une allocation optimale des capitaux, d’après la CEA.  La capacité des marchés à assurer l’accès aux capitaux dépend essentiellement de la capacité de l’État à assurer la protection des droits de propriété, d’un système judiciaire efficace et de lois adéquates en matière de faillite des entreprises. Les conclusions de la commission suggèrent qu’un tel environnement devrait également être en mesure d’attirer les entreprises étrangères, ce qui stimulerait la concurrence et améliorerait encore davantage l’allocation des ressources, conduisant à une croissance accrue de la productivité.

Par contre, le secteur public, plutôt que de soutenir la croissance du secteur privé, a été identifié comme un obstacle potentiel à son développement dans la mesure où il donne lieu à une bureaucratie excessive. En effet, ce rapport a mis en évidence deux dimensions de ce phénomène dans les enquêtes sur les entreprises, à savoir l’incompétence administrative et la corruption, qui semblent positivement corrélées. Les entreprises signalent que la corruption et l’incompétence de l’administration sont des contraintes considérables en Afrique du Nord, en particulier au Soudan mais aussi au Maroc et en Egypte. Pourtant, il est ressorti de l’examen du classement de Doing Business effectué dans le cadre du présent rapport, que le Maroc, en particulier, avait déjà beaucoup amélioré ses performances et que la Tunisie rattrapait également son retard.

Hajar Benezha

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