Stress !

Selon l’homme qui se lève à l’aube et qui observe la nature par sa fenêtre, les hirondelles ont fait leur apparition à Rabat plutôt que prévu. L’année dernière, selon toujours le même observateur, elles étaient en retard. Ces variations dans le temps des migrations des oiseaux sont à mettre en relation avec celle des températures. Cette année, ces dernières sont plus douces et plus printanières qu’hivernales. Cela s’est traduit par la floraison précoce des mimosas, du rtem (entre autres …) et les fruits de certains néfliers ont commencé à jaunir. Comme si la nature voulait s’exprimer par cette phénologie prématurée sur la récolte de l’année: que des nèfles!

L’année agricole a fait déjà l’objet d’appréciation de la part de ceux qui sont censés prévoir la croissance de l’année en cours. Les chiffres avancés étaient déjà sous l’effet du déficit pluviométrique enregistré alors!

Le discours officiel, dans son temps propre,s’est translaté d’un optimisme de convenance en soulignant l’existence d’un retard des pluies, à l’organisation de prières rogatoires puis en fin vers le traitement des conséquences de la sécheresse.Cela se fera conjoncturellement. La sécheresse étant encore considérée comme un phénomène extrême; une crise qui passera.

Si une très grande partie du territoire national est sous climat semi-aride et aride, le changement climatique pour lequel une réunion internationale est prévue à Marrakech cette année (COP 22), fait que le royaume «devrait subir un réchauffement supérieur à la moyenne du globe et une diminution plus importante des précipitations».

La fréquence des périodes de sécheresse et/ou d’inondations va amplifier l’importance de la ressource en eau, rare ou abondante, en tant que facteur limitant dans le développement de l’agriculture, dans la gestion et l’utilisation des infrastructures et la satisfaction des besoins de la population. Comme elle va favoriser encore plus l’érosion des sols, l’envasement des barrages, la déforestation et la désertification et avoir un impact certain sur la biodiversité et la santé en général. C’est tout le «capital naturel» de notre pays qui se trouve menacé.

Il urge de prendre les mesures qui s’imposent pour que le déficit structurel en eau ne conduise à des situations de précarité dans des secteurs socioéconomiques en émergence.

Le saupoudrage de l’aide pour pallier aux conséquences de la sécheresse doit céder au plus vite la place à la mise en œuvre d’une stratégie nationale de l’eau où la protection de la ressource en eau est intégrée dans toutes les politiques sectorielles afin de mettre un terme au gaspillage de l’eau aussi bien par les personnes, les ménages que par divers secteurs économiques. L’aménagement du territoire dans le cadre du développement durable doit être revu pour prendre en considération la répartition de la ressource en eau, son utilisation rationnelle, la promotion de son économie et la mise en place de nouvelles infrastructures d’approvisionnement telles les usines de dessalement de l’eau de mer.

Certaines initiatives sont en cours de réalisation dans ce sens mais restent très limitées (à une région, à un groupe industriel) ce qui rend insuffisant l’effort déployé pour assurer la disponibilité de l’eau à l’ensemble de la population et ses activités, et particulièrement en cas de sécheresse.

Les politiques, les actions et les mesures à mettre en œuvre devant la rareté de la ressource en eau et de la sécheresse nécessiteront aussi la réunion du Conseil National Supérieur de l’Eau et du Climat en vue de la réactualisation et de la redynamisation de la politique nationale de l’eau.

Le diagnostic est connu. «Les ressources hydriques dont dispose le Maroc sont limitées. Elles sont, par ailleurs, soumises à des variations cycliques extrêmes (succession de cycles de sécheresse aiguë). L’eau déjà rare, est aussi soumise à l’augmentation continue des besoins, due à l’évolution rapide de la population, à l’amélioration du niveau de vie, au développement industriel et à l’extension de l’agriculture irriguée. Ces pressions sur les ressources en eau s’accompagnent d’une dégradation croissante et de plus en plus grave de leur qualité».

La conclusion impérative aussi : «Les problèmes de rareté de la ressource en eau et de sécheresse doivent être considérés comme une question environnementale essentielle mais aussi comme une condition préalable à une croissance économique durable». Pour vivre sans stress !

Mustapha Labraimi

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