Bleue

L’économie a des couleurs. De rouge, certains veulent bien la rendre verte alors que d’autres pensent à lui donner la teinte du ciel et de l’océan. On en débatte sérieusement même si sous le qualificatif de «vert» certains pratiquent une économie où seul le profit et la rente sont garantis aux dépens des ressources naturelles et de l’intégrité du territoire national, notamment dans sa frange littorale.

Au Nord d’Agadir, vers ImiOuaddar, une zone littorale est en train de changer de statut. Le chantier est en pleine activité pour installer une quelconque activité les pieds dans l’eau. Pour cela, la topographie est modifiée; terrassée pour qu’elle réponde aux besoins nécessaires du bronzage idiot. En complète contradiction avec l’arsenal juridique adopté et promulgué, pour le profit et au mépris de l’environnement, le domaine public maritime est dégradé.

Il devient légitime alors de s’interroger sur le sort de la loi cadre 99-12 portant Charte Nationale de l’Environnement et du Développement Durable. Les dispositions de la loi 81-12 relative au littoral et particulièrement celles concernant le Plan national du littoral (PNL); le diagnostic établi pour l’élaboration du dit PNL, étude commanditée par  la Direction de l’Observation, des Etudes et de la Planification du Secrétariat D’Etat auprès du Ministre de l’énergie, des mines et du développement durable chargée du développement durable, tout cela et bien d’autres textes juridiques concernant l’aménagement du territoire ; tout cela on connaît pas ! On transgresse dans l’attente de la montée des eaux suite aux changements climatiques. On abuse de la dérogation et le fait est là, investir dans la dégradation du littoral et de son fragile équilibre.

Ailleurs et plus proche d’une zone littorale qui souffre, à l’Université Ibn Tofail de Kenitra, se tient une conférence scientifique dans le cadre du projet Scolamar. Ce dernier vise dans son intention à promouvoir la gestion intégrée des zones côtières, afin de contribuer au développement d’une économie «bleue» au Maroc. Dans ce cadre qui regroupe des universitaires nationaux et d’autres européens, l’impact des changements climatiques est abordé sous différentes approches, notamment celle des risques côtiers.

L’objectivité scientifique et l’honnêteté citoyenne devront rappeler particulièrement aux participants «l’étude d’expertise sédimentologique de la plage de Mehdia (Mars 2011, N°1712781)» commanditée par la Direction des Ports et du Domaine Public Maritime après quelques années du dragage des fonds littoraux suite à une opération de privatisation d’une société nationale et sa transformation en holding privé et sans qu’aucune étude d’impact sur l’environnement ne soit produite. Certainement que chacun parlera selon sa conscience lors de la table ronde avec les «stakeholders» prévue en clôture de la conférence; l’espoir est que l’enceinte universitaire ne se transforme pas en souk où le sponsoring aveugle la conscience de la science. Dans le cas où «la ruine de l’âme» prenne le pas sur la science, l’Université en pâtira et la crédibilité des uns et des autres en souffrira.

Pour la même couleur de l’économie et après l’auto-saisine sur l’économie verte et l’adoption par son assemblée générale du rapport «Economie Verte : opportunités de création de richesses et d’emplois», le Conseil Economique Social et Environnemental se penche, dans le même cadre de l’auto-saisine, sur l’économie bleue. Il poursuit ses auditions et ses ateliers dans le cadre «de promouvoir une économie bleue intégrée qui va au-delà du secteur de la pêche, et qui se base sur une exploitation optimale des ressources maritimes dans différents secteurs liés à la mer (industrie navale, valorisation des algues, exploitation des ressources off-shore…), parallèlement au développement de la R&D et de formations adaptées aux différents métiers de ce secteur».

Il va sans dire que l’avis du CESE à ce sujet contribuera fortement à l’établissement d’un modèle de développement que chacun appelle de ses forces pour assurer la justice sociale et éliminer les inégalités spatiales. Comme il est certain que le respect de la juridiction nationale, adoptée dans le cadre de la durabilité du développement, ne peut que renforcer cette approche «bleue».

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