Boutaghrar, un paradis méconnu

A 28 kilomètres de Kalaat M’gouna, la ville qui a abrité la 54e édition du festival des roses, le Jbel Mgoun embrasse le village du Boutaghrar. Une excellente adresse pour découvrir le vrai sens de la nature et se rapprocher de la source «arrosant les roses». Des dizaines de jets, auberges et maisons d’hôtes accueillent continuellement des touristes étrangers dont le nombre, selon une enquête réalisée, est plus élevé que celui des touristes marocains.

Le village est habité par plus de 800 personnes dont la simplicité du vécu est imposée et non choisie. Ici, les habitants s’expriment difficilement en arabe, excepté quelques gamins et des élèves qui accélèrent le pas en direction de l’école primaire du douar. Ces petits corps à visage rosé portent des cartables presque vides et respectent l’enseignant comme leur père. D’ailleurs, les parents d’élèves lui font confiance et prennent son discours comme une parole sacrée. «C’est le messager qui apprend à nos fils et fils comment vivre à la lumière du savoir», affirme Lhoucine, paysan qui mémorise le Coran.

De gauche et à droite, l’œil n’aperçoit que le cèdre, l’amandier et les extensions du fleuve intarissable. Convaincu que la promotion de la région est une responsabilité commune, Abdellatif Boucetta, enseignant à l’école du douar depuis 14 ans, nous a accompagnés au cours de la tournée, fatigante mais surprenante. Un lieu auquel on peut accéder sans frapper la porte !

Situé à l’entrée du village au sein de Targa, l’hôtel Amalou est l’un des centres dans lequel peuvent se rendre les visiteurs de Boutaghrar. Son gérant, Brahim appelé Bihi par les habitants, choisit minutieusement ses clients. Pour lui, «la convivialité a ses limites, car ce sont les bonnes mœurs qui séduisent les touristes». «Boutaghrar est une vallée calme et sécurisée où n’interviennent qu’exceptionnellement les forces d’ordre», ajoute t-il. Si Bihi propose des tarifs à la portée, une nuitée à moyen prix, il s’occupe aussi d’organiser des randonnées pouvant durer jusqu’à quatre jours en pleine nature. L’établissement propose également une cuisine aux saveurs locales, ajoute-t-il.

Selon Si Bihi, l’action des courtiers qui s’efforcent à acheter des maisons au cœur de la Kasbah est inacceptable. Selon lui, la présence «étrangère» est en principe qualifiée de menaçante pour la sécurité du groupe. A Boutaghrar, il est commun pour la population d’évaluer le résidant avant de lui donner carte blanche ! Depuis plus de dix ans, un français habite le douar, tandis qu’un autre a toujours eu des frictions avec les habitants de la vallée.

Boutaghrar est une fenêtre pour découvrir le mode de vie des villages amazighs, un lieu où la question de parité ou de la défense des droits de l’enfant est peu ou prou évoquée, car il y a ni violation ni discrimination. Le mode de vie est régi par un système tribal équilibré où chacun joue le rôle qui lui incombe : des filles qui font la lessive à la rivière et des garçons qui transportent le bois sans abandonner les bancs de l’école. «C’est un partage de responsabilités et un entrainement pour la vie adulte», déclare une femme cachée derrière une porte entrebâillée. La population ne demande que les infrastructures de base, entre autres un centre de santé et des ponts solides.

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Jamal Amdouri Naciri, responsable communication et médias

du festival des roses

«L’arôme de la rose attire les médias d’ici et d’ailleurs»

jamal 2C’est à Jamal Amdouri qu’incombe la tâche importante d’accompagner un groupe de 60 journalistes relevant de plus de 45 supports médiatiques dans la localité de Kalaat M’gouna. Selon le jeune homme, il a accepté ce défi pour ouvrir la porte aux médias locaux, garantir plus de confort aux représentants de la presse nationale et mieux profiter de l’expertise des journalistes des grandes chaines internationales qui arrivent l’une après l’autre.

«C’est la quatrième fois successive que j’assure le poste de responsable de communication et médias du festival de la rose. J’ai vécu le passage de l’événement d’un «Moussem» à un «festival», avec toutes les certitudes qu’impose ce changement organisationnel dont l’une des clés de la survie est la communication».

«Je me souviens toujours du discours de l’un des habitants m’invitant à créer un message clair résumant les aspirations des habitants. Cela a pris du temps et ce n’est qu’avec l’actuelle édition du festival qu’on a pu avancer», confie t-il.

«Notre vision médiatique est fondée majoritairement sur un principe : on choisit soigneusement les médias à inviter. On élimine quelque fois les jeunes journalistes de la région, porte-parole des habitants et qui revendiquent le fait de les juger inutile».

Au total ,15 journaux électroniques locaux issus de Kalaat M’gouna et plus de 19 supports régionaux se sont rendus sur les lieux. Cette rencontre unique avait pour objectif de promouvoir la région.

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Kelaat M’Gouna couronne la reine des roses

IMG_4874Kelaat M’Gouna célèbre la fin des récoltes de roses par l’élection de sa reine. Cette année, c’est la somptueuse Fatima Zahra Amiri, 17 ans qui aura conquis les cœurs.

Chaque année, le village rend hommage à la belle fille, sachant que la floraison a lieu entre mi-avril et la mi-mai. Et que ce sont les femmes qui récoltent les roses dans leurs gandouras qui servent de paniers pour l’occasion. Les pétales récoltées sont ensuite distillées (l’eau de rose employé en parfumerie), ou bien séchées pour décorer les maisons.

Les roses, les femmes, une ressource précieuse à laquelle les habitants de la vallée savent rendre hommage. Durant trois jours, les habitants des villages voisins descendent des montagnes pour fêter la reine des fleurs, et pour l’occasion, se parent. Les chanteurs et joueurs de flûte ou de tambour font retentir leur musique et reproduisent une danse folklorique. Le troisième jour venu, celle qui a été élue «Miss Rose» est portée en triomphe au milieu de défilés de chars décorés. Les spectateurs acclament la reine de la fête et lui lancent des pétales.

Youssef Boukioud

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