La carte Suzuki Maroc change de main sur fond de vente par voie de justice

Suzuki Maroc a connu plusieurs années de crise, des problèmes financiers et juridiques qui la mènent aujourd’hui vers une fin pas très heureuse. L’importateur exclusif de la marque japonaise a été mis en vente judiciaire et ce, suite à la décision du tribunal de Commerce de Casablanca prise le 31 juillet.

L’entreprise détenue par la famille saoudienne Bamaarouf a un différend avec la Société Générale depuis quelques temps déjà. La banque a déposé une requête pour des créances impayées auprès du tribunal ce qui a constitué la base principale de sa décision. Ce n’est pas la première fois que le tribunal rend un jugement au profit de l’établissement bancaire. Il y a quelques années déjà que les avocats des deux parties se font la guerre au sujet de ce dossier.

La vente judiciaire d’un foncier de 1.604 m² en plus d’un bâtiment de deux étages et d’un local de 5.499 m² a été ordonnée par le tribunal au mois d’octobre 2016. Les deux premières ventes ont concerné le siège de l’entreprise Suzuki Maroc bâti à l’angle du boulevard Ba Hmad et de l’avenue des Oudayas au quartier Belvédère à Casablanca pour des prix de départ respectifs de 25,66 millions et 87,98 millions de dirhams.

Mis à part la Société Générale, plusieurs autres affaires ont été portées devant le tribunal contre Suzuki Maroc en 2016. L’entreprise aujourd’hui n’a presque plus rien. Le reste de son stock de voiture et le mobilier de bureau ont été vendus aux enchères suite à des jugements.

Pourtant l’importateur a connu une courte période de gloire entre 2006 et 2008 grâce à l’arrivée de la Suzuki Maruti sur le marché. Les petits SUV de la marque japonaise ont réussi à accroître les bénéfices de l’entreprise et assurer des résultats positifs durant cette période. Après le renouvellement des gammes la situation s’est aggravée et la courbe des ventes a chutée au Maroc.

Notons que les ventes s’étaient stabilisées autour des 1.000 unités annuellement depuis l’an 2000, puis ont remontées en flèche grâce à la Maruti, pour atteindre un nombre d’unités écoulées de 2.627 en 2008. « Je me rappelle bien de l’investissement colossal de plusieurs dizaines de millions de dirhams que l’entreprise avait annoncée au début des années 2000. C’était dédié à la construction de son nouveau siège et d’un showroom. Les dirigeants et actionnaires de l’entreprise étaient très ambitieux à cette époque », témoigne un spécialiste du secteur dans un support de la place. Jusqu’en 2013, où la situation change. L’année marque le début du déclin pour l’entreprise avec 633 unités vendues, puis 483 en 2014, 271 en 2015 et à peine une douzaine de véhicules vendus en 2016.

Ce même spécialiste explique que le modèle économique adopté par la famille saoudienne n’était pas viable au Maroc. Cette dernière détient aussi la carte de la marque au Yémen et en Arabie Saoudite. Les prix de ventes étaient très élevés par rapport à la concurrence, ce qui a mené vers la perte financière de l’entreprise. Celle-ci avait une centaine d’employés répartis sur une dizaine de représentations à travers le Maroc qu’elle a cessé de payer depuis novembre 2016.

La dette n’a fait que s’amplifier jusqu’en 2012. L’entreprise opte alors pour une réduction de capital, une « opération accordéon » sur le capital de l’entreprise qui était de 38millions de dirhams. Cette opération devait sauver la mise, mais surtout permettre à l’entreprise de garder les emplois et continuer son activité. Le montant de la réduction s’est élevé à 12 millions de dirhams par absorption de dette, puis l’entreprise a augmenté son capital jusqu’à atteindre les 40 millions de dirhams et ceci s’est fait en incorporant des comptes courants associés. Mais cela n’a pas suffi à faire redémarrer l’activité de l’entreprise.

Certains spécialistes jugent que la raison de la perte de Suzuki Maroc est que les héritiers du propriétaire saoudien Bammarouf sont entrés en conflits. En ce qui concerne la carte de la marque Suzuki a été finalement reprise par CFAO, aux côtés d’Opel et Chevrolet. L’annonce sera faite une fois l’affaire terminée.

Soumayya Douieb

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