Des dépenses avec effet «boule de neige»

La situation financière des ménages marocains est soumise à de fortes pressions à la veille d’Aid Al Adha, plombée par la succession de plusieurs événements et fêtes (Ramadan, vacances d’été et rentrée scolaire), qui nécessitent une mobilisation plus accrue de fonds.

En effet, durant les dernières années, la période juin-septembre s’est avérée très difficile pour les familles marocaines, particulièrement celles aux revenus moyens et modestes, qui voient leur pouvoir d’achat se dégrader progressivement à cause de la flambée des prix de certains produits.

Les dépenses s’enchaînent avec le mois sacré du Ramadan, les vacances estivales et maintenant la rentrée scolaire et Aid Al Adha, sans oublier la période de fin d’année et les vacances d’hiver qui s’approchent à grands pas. Autant d’occasions qui pèsent lourd sur le portefeuille du simple consommateur marocain.

Pour faire face à cette situation, chaque ménage adopte sa propre stratégie, qui lui permet de sortir de cette impasse et passer cette période dans des conditions plus au moins favorables.

Ainsi, certains Marocains estiment que les dépenses de cette période n’ont rien de particulier si elles sont gérées de manière « rationnelle », terme qui reste très relatif et son degré et définition varient d’une personne à une autre.

C’est le cas pour Abdellah, âgé de 39 ans, père de 2 enfants et employé dans une entreprise privée à Casablanca.

« Mon salaire dépasse à peine les 11.000 dirhams (primes inclues) », a révélé Abdellah, ajoutant que pour gérer les dépenses de cette période, il a dû recourir à la constitution d’une épargne d’au moins 2000 dirhams par mois, sur l’ensemble de l’année.

« Lors du dernier Ramadan, mes dépenses ont atteint les 9000 dirhams », a précisé Abdellah, avant de noter que chaque mois, il verse une somme d’environ 5000 dirhams entre loyer, factures d’eau et d’électricité, transport et d’autres charges.

Concernant la rentrée scolaire, Abdellah a affirmé avoir dépensé plus de 3.500 dirhams en frais scolaires et en achat de fournitures et de livres scolaires pour son fils aîné, élève de 8 ans.
« Pour Aid Al Adha, certes qu’il est intervenu dans une période difficile, mais on n’a pas le choix (…) c’est une fête religieuse qu’il faut célébrer convenablement vu sa place dans l’Islam’’, a-t-il expliqué, avant d’ajouter qu’il s’apprête à consacrer une somme d’au moins 12.000 dirhams à cette occasion.

Par ailleurs, d’autres consommateurs manifestent leur mécontentement face à la flambée des prix de certains produits durant cette période, alors qu’un bon nombre de familles marocaines stipulent que le recours au crédit, formel (auprès des établissements de crédit) ou informel (auprès des amis, de la famille…), reste le seul moyen pour faire face à ces dépenses colossales.

« Afin de gérer les différentes charges de cette conjoncture, j’essaye de limiter mes dépenses uniquement à ce qui est nécessaire », a dit Said, magasinier dans une entreprise de distribution et père d’une fille de 12 ans.

Avec un salaire qui s’élève à seulement 3500 dirhams, Il a affirmé, avec regret, que ça fait des années qu’il « zappe » les vacances d’été.

« Le total de mes dépenses durant le mois de Ramadan s’est chiffré à plus de 4000 dirhams », a relevé le magasinier, faisant remarquer que sa situation financière subit chaque année une forte pression, surtout lors de la période d’avant Aid Al Adha, bien que son oncle, éleveur de bétail, lui offre le mouton à cette occasion.

Said a estimé que la rentrée scolaire intervient au mauvais moment pour peser lourd sur son budget relevant qu’à chaque rentrée scolaire, les frais s’orientent davantage vers la hausse.
« Grâce à Dieu et des aides que je reçois parfois de la part de certains membres de la famille, je réussis à m’en sortir sans pour autant recourir aux crédits », a-t-il ajouté.

Le crédit bancaire, une des solutions parmi d’autres, permettent aux ménages aux revenus modestes d’arriver à joindre les deux bouts et de faire face à cette succession d’événements et de fêtes.

En effet, les offres des établissements de crédit sont multiples et varient selon la clientèle ciblée et la conjoncture. Crédit spécial Ramadan, Crédit pour équipement, crédit pour partir en vacances, crédit pour la rentrée scolaire, telles sont des exemples d’offres que proposent les sociétés de financement et les banques.

« Après le Ramadan et les vacances, la rentrée scolaire se pointe avec ses dépenses infinies (fournitures, livres, cartables, uniformes scolaires, frais d’inscription …), coïncidant ainsi avec Aid Al Adha », a relevé Amina, 33 ans, mère de deux enfants et employée dans une librairie à Casablanca, notant que le budget de sa petite famille, constitué de son salaire et de celui de son mari, ne permet pas de couvrir toutes ces charges.

« Après de longues discussions, nous sommes arrivés, mon mari et moi, à la conclusion qu’il est nécessaire de contracter un crédit auprès d’une société de consommation afin de pourvoir passer cette période dans les meilleures conditions », a-t-elle confié.

Ainsi, la période juin-septembre représente une opportunité pour les établissements de crédit au Maroc, qui s’activent en matière de communication pour commercialiser leurs différentes offres de crédits, et particulièrement celui de la consommation. Dans ce sens, les crédits à la consommation ont enregistré à fin juin 2016, un encours de 48 milliards de dirhams (MMDH), soit une hausse de 5% par rapport à la même période une année auparavant, selon les indicateurs clés des statistiques monétaires de juin 2016 que Bank Al-Maghrib (BAM) a publié sur son site.

Cependant, si contracter un crédit parait être la meilleure solution en temps de crise, l’accumulation des petits prêts constitue, sur les moyens et long termes, un vrai danger pour le budget du bénéficiaire de ces emprunts, vu qu’il se retrouve à chaque fin de mois face à des traites qui s’emparent de la grande partie de son salaire.

Hicham Louraoui

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