Elections régionales italiennes: Salvini perd l’Emilie-Romagne

Dimanche dernier, la Ligue (extrême-droite) de Matteo Salvini a essuyé une cuisante défaite lors de l’élection régionale en Emilie-Romagne face à la gauche alors même que l’ancien ministre de l’Intérieur s’y était fortement investi et qu’il comptait sur ce scrutin pour reconquérir le pouvoir.

Rien n’y fit, cependant, car en raflant, aux premières estimations, près de 50% des voix, Stefano Bonaccini, le président démocrate sortant de la région, (Centre-gauche) a largement devancé Lucia Borgonzoni, 43 ans, la candidate de la Ligue à laquelle les premières projections n’accordaient pas plus de 43% des suffrages exprimés. Autre camouflet donné à l’extrême-droite, ce scrutin a été marqué par une participation de l’ordre de 67,67%; très forte par rapport à celle de 2014 quand seuls 37% des électeurs inscrits avaient pris le chemin des bureaux de vote.

C’est dire que, dans cette région prospère du centre-nord de l’Italie, qui a toujours été un bastion de la gauche malgré quelques «incursions» de la droite à la campagne, les électeurs avaient vraiment à cœur de barrer la route à l’extrême-droite en sanctionnant la stratégie de radicalisation politique choisie par leur ancien ministre souverainiste de l’Intérieur et en récompensant la bonne gestion économique de la région par les démocrates.

La dynamique anti-populiste initiée par le mouvement civique et anti-souverainiste des «Sardines», ce mouvement récemment créé à Bologne par 4 jeunes de la région et très vite devenu, grâce aux réseaux sociaux, un symbole national de la protestation contre l’extrême-droite, y est incontestablement pour beaucoup dans la défaite de la Ligue dans la région.

Ayant, toutefois, bien du mal à reconnaître explicitement la défaite de son parti en Emilie-Romagne, Matteo Salvini a tenu, face à la presse, à rappeler que la gauche était habituée à remporter haut la main les scrutins dans cette région non sans ajouter, avec un sourire narquois au coin des lèvres que, cette fois-ci, et «après 70 ans, il y a eu un vrai match en Emilie-Romagne car autrefois, le match était fini avant même de commencer».

Or, même si Salvini s’acharne à croire et à vouloir faire croire que l’extrême-droite italienne a encore son mot à dire dans la marche de l’Etat et que lui-même pourrait encore retourner aux commandes du pays, nombre d’observateurs s’accordent à considérer que la défaite de la Ligue en Emilie-Romagne, marque, pour son leader, «le début d’une longue traversée du désert dans l’opposition».

Mais, il convient de signaler que cette défaite constitue, par ailleurs, un grand soulagement pour Giuseppe Conte, le président du Conseil italien, qui craignait qu’une victoire de la Ligue en Emilie-Romagne n’offre l’occasion à son leader de faire sauter la fragile coalition gouvernementale regroupant la gauche et le Mouvement 5 Etoiles (anti-système) et de provoquer la tenue d’élections générales anticipées.

Voyant donc s’éloigner, avec cette défaite, le spectre d’une dissolution anticipée du Parlement, Giuseppe Conte se réjouit de voir, dans ce résultat, «une défaite personnelle de Salvini» à qui il reproche le fait d’avoir «voulu instrumentaliser ce scrutin pour en faire une question nationale».

Mais s’il est parvenu à garder l’Emilie-Romagne, le Parti Démocrate a, néanmoins, perdu la Calabre où Jole Santelli, responsable de «Forza Italia» – soutenue par l’extrême-droite représentée par la Ligue et par les post-fascistes de «Fratelli d’Italia» – a remporté le scrutin avec près de 56% des voix ne laissant au candidat de la gauche que 30% des suffrages exprimés.

Force est de reconnaître, enfin, que les résultats de ce dimanche bouleversent sérieusement les rapports de force au sein de la majorité avec un Mouvement 5 Etoiles qui, après avoir été fortement affaibli par des dissensions internes et la démission, à cinq jours du scrutin, de son patron Luigi Di Maio, n’a pu recueillir que 3,5% des suffrages en Emilie-Romagne et 6,2% des voix en Calabre où il avait obtenu 44% des voix aux législatives de 2018.

De quoi donc demain sera-t-il fait pour la majorité gouvernementale emmenée par Giuseppe Conte? Attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

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