En voyage à l’étranger, Macron inquiète son camp

En pleine campagne des législatives en France

Le président français Emmanuel Macron se trouvait à l’étranger mercredi, en Europe de l’Est, en pleine campagne des élections législatives, s’exposant aux critiques et inquiétant son camp à quelques jours d’un second tour à haut risque.
Au moment d’embarquer mardi pour son voyage consacré à la crise ukrainienne, le chef de l’Etat s’était adressé, solennel, aux Français depuis le tarmac d’Orly, au pied de l’avion présidentiel, les exhortant à ne pas ajouter un « désordre français au désordre mondial » et à lui donner dimanche une « majorité solide ».

Le président français poursuit mercredi sa visite en Roumanie après être allé à la rencontre mardi soir des 500 soldats français déployés sur le flanc oriental de l’Otan. Il doit continuer dans la journée son périple en Moldavie voisine, une ex-République soviétique menacée de déstabilisation par le conflit en Ukraine.
Il pourrait aussi se rendre à Kiev, avec d’autres dirigeants européens, pour marquer le soutien de l’Europe à l’Ukraine en guerre, selon des quotidiens allemand et italien.
D’une semaine à l’autre, la campagne des législatives poursuit ainsi son cours inédit, avec un président tantôt en retrait, tantôt dans l’arène, tantôt à l’étranger, loin des Français.
Passé le choc du premier tour, dont ressort un coude-à-coude avec l’union de la gauche de Jean-Luc Mélenchon et le risque de perdre sa majorité absolue à l’Assemblée nationale, le camp présidentiel se prend à douter de la bonne étoile de son chef.

« Il y a eu ce pari un peu risqué de ne pas faire de cette campagne une campagne nationale (…) Le président s’est engagé tard et on a laissé pendant trois semaines La France Insoumise occuper le terrain médiatique », déplore un conseiller exécutif, qui juge cette première séquence « ratée ».
Emmanuel Macron est entré de plain-pied dans la campagne trois jours avant le premier tour, sonnant alors la charge contre les « extrêmes » accusés de vouloir sortir de l’Otan, « remettre en cause » l’Europe et de privilégier des « alliances baroques » avec la Russie.
Le voilà de nouveau éloigné pour plusieurs jours de la scène nationale, au plus près du conflit ukrainien et de ses répercussions géopolitiques, économiques et alimentaires avec des céréales ukrainiennes bloquées à Odessa, principal port du pays.

« Si le voyage avait été plus court, personne ne lui en aurait tenu rigueur », pointe sobrement un ministre. « Quand il reviendra, il fera un truc solennel », croit-il savoir.
Pour le politologue Pascal Perrineau, cette séquence internationale pourrait s’avérer toutefois porteuse pour un président qui agace surtout à l’intérieur.
« Son image intérieure n’est pas bonne, avec 37 et 40% de confiance, l’impression qu’il est un président distant, qui a peu la fibre sociale, peu la capacité d’écoute », dit-il à l’AFP.
« Mais il y a un autre pan de son image, celle d’un dirigeant respecté (à l’international), qui représente bien la France à l’étranger et qui fait preuve d’autorité au plan européen », ajoute-t-il.

Le président français, très impliqué dans la crise ukrainienne, est l’un des rares dirigeants à échanger régulièrement avec le maître du Kremlin Vladimir Poutine –ce qui suscite l’incompréhension dans l’est de l’Europe– et à faire le lien avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky.
L’enjeu est de taille face à la pression militaire croissante des Russes dans le Donbass, aux appels du président Zelensky à recevoir plus d’armes de l’Occident et à l’approche d’un sommet européen (23-24 juin) qui pourrait décider de la perspective d’adhésion de l’Ukraine et de la Moldavie à l’UE.

Au passage, Emmanuel Macron affiche aussi sa différence avec Jean-Luc Mélenchon et la dirigeante d’extrême droite Marine Le Pen, aux liens plus ambigus avec la Russie même s’ils dénoncent aujourd’hui l’offensive russe en Ukraine. Son principal adversaire à distance dans ce scrutin, M. Mélenchon, a raillé cet éloignement du chef de l’Etat allant jusqu’à parler de « mépris » pour les Français.
« Le président à l’étranger et Mme Borne (la Première ministre) aux abonnés absents », a-t-il ironisé mardi, dénonçant aussi un « sketch à la Trump » après le discours présidentiel sur un tarmac.
M. Macron lui a répondu mercredi sans le citer, réfutant mépriser les Français et disant jouer « pleinement (son) rôle ».
« J’assume comme d’habitude tout avec clarté et sérénité, parce que je pense que notre pays a besoin de clarté et de sérénité aussi », a-t-il dit depuis la base de l’Otan en Roumanie.

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