Essaouira: L’univers abstrait de  l’artiste Amadou Dieng

Amadou Dieng, artiste peintre, pensionnaire du village des arts de Dakar depuis le camp Lat Dior,  expose actuellement ses œuvres les plus récentes dans la cadre de l 3e édition du Carrefour d’artistes  initié par la Galerie La Kasbah d’Essaouira. 

Passionné et mystique, la nature tient une place importante dans ses œuvres. Les couleurs jaillissent et les lignes se tordent sur ses œuvres avec toujours des sans titres qui laissent d’éternels questionnements sur la société.

Adepte acharné de l’abstrait,  Amadou Dieng souligne : «Je ne fais pas de la peinture, dite Africaine. Je suis un Africain qui fait de la peinture. Un homme, peut-il apprendre à un autre homme à caresser une femme? Je suis un autodidacte, donc spontanément, j’ai commencé à peindre. Quand je suis devant la toile, toute dimension de pré conception s’éloigne de moi. Et une seule envie me reste. Commencer par le désordre et finir dans l’ordre. Comme le genre humain, d’un bébé à un autre bébé, d’une toile à une autre toile. Puisque la femme enceinte ne peut dire à l’avance comment sera son bébé, moi aussi je ne peux pas dire comment sera mon œuvre. Ce qui fait de tous mes tableaux des sans titre. Donc, loin de la pré conception. Je ne rends pas le visible, je rends visible». Et d’ajouter : «Je peins pour accompagner le séjour quotidien de l’œil. Je ne peins pas pour l’esprit, je lui parle, Je ne parle pas de moi, je parle de la personnalité propre de l’art. L’artisanat est par essence géographique, tandis que l’art, lui, est universel. Tous les artisans du monde avant de commencer à travailler savent d’abord ce qu’ils vont faire. Tandis que l’artiste est comme la femme. Il ne saura que quand le docteur aura coupé le cordon ombilical. Ou il n’y aura rien à comprendre, mais tout à sentir, juste pour l’humain. Au mot développement, je préfère l’épanouissement. L’art, c’est de l’oxygène, qui n’a rien à voir avec le dialogue des cultures. Comme disait l’autre, je le cite : «un tigre n’a pas besoin de montrer sa tigritude». Cependant je sais que je suis plus vieux que mon arrière, arrière grand père. Je viens de lui, mais il est couché, au bout de la ligne, je suis la partie vivante, donc je porte l’âge de la ligne. Comme pour dire qu’un artiste n’a pas besoin d’un berger. C’est une question : d’extérioriser et non de styliser».

Dans sa collection, Amadou Dieng fait de l’assemblage avec le bois et utilise des couleurs chaudes dans ses œuvres. Il fait aussi de la céramique. Les pièces sont travaillées sur un fond noir, blanc ou encore marron. Il se lance à un jeu de couleurs avec des piques qui laissent croire à du collage. Sous les coups du pinceau, elles se croisent ici ou se marient plus loin sur des tonalités en dégradé. Pour ce natif de Kaolack, «peindre est une passion. La peinture nait de l’envie, et tu ne peux pas savoir ce qui en sortira».

Auteur des accessoires de décorations du film «Hyène, de Djibril Diop Mame Betty», Amadou Dieng (né à Dakar en 1951)  plaide pour une large visibilité du village des arts où il réside. «Il se pose un problème de soumission. Le village des arts est méconnu des populations. Ce sont les pensionnaires qui gèrent leur propre visibilité à travers des invitations».

Hassan  Moutaki

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