Evaluer pour mieux recadrer

La culture d’évaluation des politiques publiques reste peu développée au Maroc. Abdeslam Seddiki, ministre de l’Emploi et des affaires sociales, l’a lui-même reconnu lors d’un séminaire organisé par la Banque mondiale sur le suivi et l’évaluation des programmes de formation professionnelle et d’emploi au Moyen-Orient et en Afrique du Nord hier à Rabat.

«Le déficit relevé en termes d’outils de pilotage de la politique de l’emploi reflète le manque de moyens et de compétences et l’absence d’un cadre formalisé systématique pour la coordination, le suivi et l’évaluation rigoureuse des programmes mis en œuvre», a-t-il souligné. Pourtant, cette démarche est primordiale, surtout face à une demande croissante de résultats de la part des institutions financières, comme l’a indiqué le ministre délégué de la Formation professionnelle dans un discours lu en son nom par la représentante de son département. En dépit de cette carence, d’importantes avancées ont été franchies. Abdeslam Seddiki a cité, entre autres, la mise en place en 2013 d’un manuel de suivi et d’évaluation dans la perspective de standardiser l’approche méthodologique de suivi et d’évaluation des programmes de promotion de l’emploi. A cela s’ajoute la création de l’Observatoire national du marché du travail la mission est de fournir des statistiques sur le marché de l’emploi.

Aujourd’hui, le suivi des politiques publiques s’avère nécessaire pour évaluer leur impact sur le marché du travail. Pour l’heure, les programmes mis en place par les pays de la région MENA n’ont que très peu d’impact sur l’employabilité. Sur ce point, Diego Angel Urdinola du département de développement humain de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord de la région MENA de la Banque mondiale, a affirmé qu’à peine 30% de ces programmes ont contribué à l’amélioration de l’employabilité. Concernant le Maroc, les programmes mis en place par le gouvernement comme Taehil, Idmaj, Moukawalati ont profité à 700. 000 chercheurs d’emplois. Mais le défi qui se pose aujourd’hui est de créer des emplois de qualité. Pour relever ce challenge, Abdeslam Seddiki prône la mise en place d’ «une approche intégrée et cohérente qui combine à la fois des interventions macroéconomiques et sectorielles, touchant à la fois l’offre et la demande dans leurs aspects quantitatifs et qualitatifs». Le but étant de réduire le chômage qui a atteint la barre des 10%. «Un fléau qui n’épargne pas les pays pétroliers où 30 à 50% des jeunes souffrent du chômage, a déploré le ministre. Ce qui le pousse d’ailleurs à qualifier le chômage de bombe à retardement. Cependant, la lutte contre le chômage devra être accompagné de la lutte contre l’informel dans la mesure où «le secteur privé ne crée pas suffisamment d’emplois formels», selon Marie Nelly, directrice des opérations pour le Maghreb de la Banque mondiale. L’autre challenge qu’il faudra également relever concerne l’amélioration de l’adéquation entre l’offre et la demande. Surtout que le secteur privé ne cesse de dénoncer l’inadéquation des profils aux besoins réels de l’entreprise. Un constat qui reste valable pour toute la région MENA, a déploré Diego Angel Urdinola.

H.B

La recette du ministre

Abdeslam Seddiki a livré sa recette pour faire face aux défaillances enregistrées en matière d’évaluation des programmes d’emplois. Selon lui, l’évaluation des politiques peut être menée selon deux optiques. La première consiste à «apprécier la cohérence d’ensemble de cette politique considérée comme une combinaison de programmes non mutuellement indépendants». La seconde, «plus rigoureuse et complémentaire de la première, consiste à évaluer quantitativement les effets de tous les programmes mis en place en fonction de leurs moyens, objectifs, et résultats».

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