Fantômas !

Le week-end dernier, du jour au lendemain et sans crier gare ; la société marocaine est déclarée sous l’emprise des frères musulmans. Préférant garder l’anonymat, celles et ceux qui veulent lutter contre « l’islamisation de la politique » relayaient leur appel à manifester à travers un réseau social. C’est à travers ce même media que la découverte de l’immensité de la bêtise va se faire.

Un mokaddem par ci, un cheikh par là et des pauvres hères criant qu’ils ne savaient pas pourquoi ils manifestaient. Le mouton de l’Aïd Alad7a semble avoir été un argument pour crier «Vive Bouchaib» et se lancer dans une suite de vœux pour lui et sa famille. D’autres n’appréciaient pas le casse-croûte fourni et attendaient le billet promis. Encore d’autres qui dénonçaient vertement la tartufferie à laquelle ils se sont trouvés piégés : manifester contre le terrorisme pour se trouver manipuler dans une campagne contre un parti politique. Pour compléter le paysage, ils y en avaient aussi, dans leur minorité, quelques uns qui assumaient en affichant clairement leur matériel politique tractant ses casseroles.

Nonobstant l’avis d’un avocat engraissé qui en faisait une manifestation progouvernementale pour marquer son obédience, les avis convergent sur sa médiocrité, son manque de crédibilité, son aspect ahurissant, misérable, étrange, surréaliste, regrettable et ; cerise sur le gâteau, si oui « à la liberté d’expression, pourvu que ce soit en adéquation avec la loi ». De ce côté, ça vasouille, disait l’autre.

Officiellement, les organisateurs n’ont pas pu être identifiés et le ministre de l’Intérieur déclare sa surprise par l’événement ! Le ministre de la Justice et des Libertés manifeste aussi la sienne : « Pendant les élections communales précédentes, le ministre de la Justice et des Libertés prenait les décisions en concertation avec le ministre de l’Intérieur dans tout ce qui avait trait aux élections. Aujourd’hui ; alors qu’il ne reste que trois semaines pour les élections du 7 octobre, on assiste à d’étranges événements. Le ministre de la Justice et des Libertés n’est pas consulté et ne décide de rien… ce qui veut dire qu’il ne peut être tenu pour responsable de toute médiocrité, régression, abus ou déviation ». Peau de banane alors pour pousser à la démission. Cela ne se fera pas. Et le gouvernement assumera jusqu’à la date constitutionnelle de la fin de sa mission.

Un non-événement alors ! Il montre toutefois que si la tension s’accroît à la veille de la campagne électorale des législatives, il faut savoir raison garder. A moins de vouloir faire des démonstrations par l’absurde en s’engageant dans la division de la société et la manipulation,  rien ne sert d’importer des comportements et des locutions lointaines à notre champ politique. Le Royaume du Maroc est un pays paisible où il fait bon vivre. Sa population s’est habituée aux campagnes électorales, aux scrutins et referenda depuis des décennies déjà. Le constat est que ces opérations électorales s’améliorent et permettent l’inclusion de forces politiques qui n’en voulaient pas il y a quelques années. L’action doit être menée pour combattre l’abstention et permettre à la population de faire son choix librement, loin de toute pression, de toute fraude et de toute débauche des consciences.

Les élections ne constituent pas un feuilleton de littérature populaire où Fantômas intrigue avec une utilisation du déguisement pour réussir son crime. Les élections sont un moyen pour discuter et s’approprier des objectifs nécessaires à l’émergence de notre pays. Entre autres, éliminer les dysfonctionnements de notre pratique démocratique, veiller à la qualité de notre enseignement et à l’adéquation de notre formation pour relever le défi de l’emploi, instaurer l’égalité au sein de la population et entre les territoires pour leur développement, l’accès aux soins et la réussite dans la vie, promouvoir une politique de la ville pour améliorer notre urbanisation, donner à la ruralité les moyens qui lui manquent pour s’émanciper, combattre la pauvreté et la vulnérabilité …

Ainsi, les élections démocratiques et transparentes servent à protéger notre pays de toute faille, de tout décrochement ; fussent-ils géologiques.

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