Etre une personne en situation de handicap et avoir un emploi, pas toujours facile au Royaume. Surtout quand l’on sait que même les personnes aptes physiquement subissent de plein fouet le chômage. Mais faut-il l’avouer, pour les personnes à besoins spécifiques, le défi est double. Devant le handicap, même les diplômes et les compétences ont quelque fois du mal à persuader les entreprises qui craignent que l’inaptitude physique ait raison de la rentabilité de l’entreprise.

Ce qui fait dire au HCP que les personnes en situation de handicap sont touchées par un taux de chômage 6 fois plus élevé que les personnes non handicapées, sachant que le taux de handicap national est de l’ordre de 6,8%.

Entre discrimination, non-respect de la loi, absence de formation, plusieurs obstacles empêchent l’insertion socio-économique des personnes à besoins spécifiques au Maroc. Si les quotas de recrutement des personnes en situation de handicap fixés par la loi sont de 7% dans le secteur public et de 5% dans le secteur privé, tel n’est pas le cas sur le terrain. Le chômage des personnes en situation de handicap gangrène, surtout que le manque de diplômes supérieurs chez ces personnes s’érige en véritable frein à leur insertion professionnelle.

Toutefois, certains cas se distinguent et dérogent à la règle qui veut associer handicap et chômage. Meriem, jeune femme, atteinte de nanisme, rencontrée le 1^er octobre à Casablanca par Al Bayane lors de la 2^e édition du forum d’emploi Handicap dédié au recrutement des personnes en situation de handicap, brise ces préjugés. Son histoire, parmi tant d’autres, est un contre-exemple aux aprioris sur l’employabilité des personnes en situation de handicap nourris par le secteur public et privé et qui empêchent l’insertion professionnelle de cette catégorie de la société.

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Handicap et emploi : au-delà des préjugés

Etre en situation de handicap et exercer dans une entreprise ne relève pas de l’impossible. Si plusieurs entreprises publiques ou privées nourrissent encore des préjugés sur l’embauche des personnes en situation de handicap, il n’en demeure pas moins que cette catégorie de la société a bel et bien sa place au sein des structures professionnelles. L’histoire de Meriem, plus de la vingtaine, souffrant d’un handicap et exerçant dans une banque de la place, vient briser les idées à priori des entreprises sur l’employabilité des personnes à besoins spécifiques. Rencontrée au Forum d’emploi Handicap à Casablanca, elle nous raconte son histoire. Un témoignage à l’adresse des entreprises mais aussi de la société. Les détails.

A peine titulaire d’une licence en économie, Meriem K. souffrant de…décroche une occasion en or, au cours de la 1^ère édition du forum Emploi Handicap. En 2015, 20 entreprises marocaines participent au forum pour recruter les chercheurs d’emploi en situation de handicap. La jeune femme saisit cette occasion pour déposer son CV auprès de plusieurs entreprises. «Lors du forum, j’ai déposé ma candidature auprès de plusieurs entreprises. J’ai même passé un entretien sur place auprès d’une banque. Deux ou trois jours plus tard, j’ai été contactée pour passer l’entretien au siège de la banque», confie-t-elle à Al Bayane. Deux ou trois jours plus tard, elle dépose son dossier et un mois après, elle est officiellement embauchée auprès de la banque en tant qu’agent moyen de paiement chargée du traitement des chèques au sein de la banque. «Au sein de la banque, on me considère comme les autres. Il n’y a ni parti pris ni discrimination», confie-t-elle, enthousiaste. Le cas de cette jeune femme est atypique dans une société où la majeure partie des personnes en situation de handicap vivent dans le chômage. «Je n’ai pas chômé du tout. J’ai obtenu ma licence. Ensuite, je suis venue au forum et j’ai obtenu ce travail», raconte-t-elle.

Lors de la première édition, ce sont près de 60 à 70 personnes en situation de handicap sur les 1800 à 2000 ayant participé au forum qui ont pu décrocher un emploi durant les 6 mois ayant suivi le forum, nous révèle Karim Kaitouni, président de l’association Espoir Maroc, organisatrice du forum. Un chiffre certes faible, mais un progrès dont se réjouit l’association. Cette année, l’association a tablé sur une participation de 2500 personnes en situation de handicap. Ce sont 30 entreprises, soit 50% de plus que l’année dernière  qui y ont participé. «Cette augmentation s’explique par les résultats que nous avons obtenus l’année passée. Au départ, les gens n’y croyaient pas. Ils étaient frileux. Quand ils ont vu que des gens ont trouvé du travail suite à ce forum, ils se sont mis en route», explique Karim Kaitouni.

Concernant les secteurs d’activités présents à ce forum, c’est une trentaine d’entreprises de l’énergie, des services, de l’aviation, de la banque, de la télécommunication, de l’ingénierie, de l’automobile, des mines, de la construction, de l’industrie, des assurances, du transport qui sont entrés en contact direct avec les candidats sur le lieu du forum. Une évolution dont se réjouit le président de l’association Espoir Maroc et qui permet de diversifier les profils demandés. Au niveau du secteur public, le forum bénéficie du partenariat du Ministère du travail et des affaires sociales et a été marqué par la présence de l’Agence nationale de promotion de l’emploi et des compétences (ANAPEC).

Pour plusieurs chercheurs d’emploi, le forum est une aubaine pour rencontrer des entreprises et décrocher un travail. «C’est une opportunité pour permettre aux personnes souffrant de handicap d’intégrer la société », nous confie un chercheur d’emploi au forum. «Je suis diplômé et je suis à la recherche d’un emploi», explique-t-il. Pour cet homme, plus de la quarantaine, «il est préférable de donner un emploi à ces personnes, car ce sont des êtres humains comme les autres ayant des familles et des enfants.» D’ailleurs, parmi eux, on retrouve plusieurs profils comme des techniciens, des informaticiens…, souligne-t-il.

Si Meriem et d’autres chercheurs d’emploi diplômés peuvent décrocher un emploi sur la seule base de leurs diplômes et compétences, abstraction étant faite de leur handicap,  tel n’est pas le cas pour plusieurs, sinon la majorité. En effet, cette catégorie de la société est frappée de plein fouet par l’analphabétisme. Ce qui rend difficile toute recherche d’emploi, auquel s’ajoute la réticence de certaines entreprises qui redoutent que le handicap ne puisse plomber leur rentabilité, notamment les handicaps moteurs. Sans oublier que cette catégorie de la société souffre de discrimination et que dans les entreprises publiques comme privées, l’on est encore loin des quotas d’embauche de 7% et 5% fixés par la loi. Bien plus, selon le dernier rapport du HCP, les personnes en situation de handicap souffraient de chômage 6,6% de plus que les autres citoyens. Selon le même rapport, 1,2% de la population marocaine aurait une incapacité totale en matière de vision, audition, mobilité, concentration, prise de soin de soi et communication.

A rappeler qu’au cours de la 1^ère édition du forum, en matière de niveau d’étude, les personnes à besoins spécifiques les plus représentés (45%) étaient titulaires du baccalauréat. Seuls 3% avaient un niveau Bac +6. En termes d’emploi, leurs recherches concernaient  les domaines de l’artisanat, des relations clients, la gestion, la comptabilité, les services généraux, les relations clients.

Le forum emploi handicap a pour but de favoriser l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap au Maroc.

Danielle Engolo