La rue souffre de vos ordures

La propreté de nos agglomérations urbaines reste problématique. Dans certains cas, les déchets s’amoncellent, narguant les passants,sans que le moindre effort ne soit entrepris pour les éliminer.

Cela porte préjudice à la population ; non seulement par la dégradation de son environnement et ses conséquences néfastes sur la santé et le bienêtre, mais aussi par l’impact négatif sur ses convictions profondes et la « malvie » qui s’en suit.

La pollution visuelle et olfactive entache l’urbanité et dégradent les rapports humains. Le communautarisme le plus sectaire se développe et le rejet de l’autre s’accentue. La cohésion sociale est éraflée et la responsabilité sociale se dilue dans le commérage et l’invective. Ceux et celles qui gèrent les affaires de la ville en prennent pour leur grade et le processus démocratique local régresse.Les élus sont mis dans le même sac, même si « le poisson qui sent mauvais » est connu ; et Dame Politique est damnée ainsi que les politiques et l’ensemble des gens sur Terre. A se demander, in fine, si ce n’est pas le but recherché par ce « laissez aller laissez faire » des ordures : dégouter la population de la gestion des affaires publiques !

Le ramassage des déchets a évolué dans notre beau pays autant que les déchets produits. Il coûte de plus en plus cher en gestion déléguée sans que celle-ci ne soit toujours au niveau de l’exécution de son cahier des charges.

Le plus (!) après la levée des bennes, quand elle se fait, est ce jus que le camion laisse couler pour « aromatiser » la rue et marquer, comme les chiens qui se promènent, la place de son passage. A moins que ça soit une dépoussiéreuse mécanique qui rejette ce qu’elle aspire lors de son passage par le haut …

Auparavant, les récupérateurs qui fouillent les ordures à la recherche de matériaux pouvant servir à l’industrie du recyclage ont opéré, ajoutant parfois un désordre aux abords des bennes béantes. Ces travailleurs du déchet, sans statut ni syndicat, exercent à la tombée de la nuit, pour sortir de la déchéance dans laquelle ils se trouvent. Force de travail sous contrôle, maintenue dans l’informel et dans le besoin d’une protection sociale qui est encore lointaine…Autant pour les travailleurs manuels qui exercent cette activité itérative et source de « Troubles Musculo Squelettiques (TMS). ».

Si tout ce qui précède« relève du Henné, reste la rugosité des mains ! ».Car la population dans sa grande majorité reste dans l’expectative devant la faillite du travail municipal qui s’effectue dans les bureaux, loin des yeux et encore plus loin des cœurs.

Certes le mouvement associatif organise des campagnes de propreté à l’occasion, essentiellement celle de l’Aid Al Adha, sans pour autant arriver à imposer l’habitude de préserver le domaine public de la saleté et des immondices. Au brouhaha des ventes à l’étalage qui se multiplient, aux multiples carrosses achalandés de plain-pied sur la chaussée, le déchet tombe, et ainsi soit-il, le dépotoir est entretenu.

La grogne des utilisateurs de l’espace public se traduit par une marche saccadée, où le pas s’allonge pour enjamber le déchet et des regards furtifs pour éviter le risque de glissade. Le soir venu, rien n’est fait et l’accumulation poubellisée s’accentue pour devenir un abcès à ciel ouvert du sous-développement et de l’incivisme.

On ne peut prétendre à des smart city alors que l’élément humain est négligé dans son éducation et dans son comportement social.Pour différentes raisons, l’empreinte environnementale des déchets ne cesse de s’accroître et la solution ne réside pas, dans notre beau pays,dans la digitalisation des bennes pour optimiser la collecte des ordures. Nos villes se ruralisent à vue d’œil et cherchent encore à parfaire leurs infrastructures ; les solutions « intelligentes » ne pourraient être efficaces si en amont de la chaîne de la gestion des déchets, la compréhension du défi par l’élément humain n’est pas perçue à sa juste mesure. Nos rues souffrent de vos ordures autant que les hommes et les femmes souffrent de leurs conditions.Il est plus que temps d’agir pour diminuer, voire éliminer, ces souffrances !

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