La société, principal vice de l’entreprenariat au Maroc

Les rencontres sur l’entreprenariat s’étoffent. C’est à croire que la question captive de plus en plus. Mardi dernier, une énième conférence sur la problématique a eu lieu à l’Adalia Business School à Casablanca. Sans surprise, les intervenants se sont livrés à un diagnostic de la situation de l’entreprenariat au Maroc. In fine, ce sont les «écosystèmes» qui ont été épinglés dans le statut peu reluisant de l’entrepreneur au Royaume. Détails.

78e sur 132 pays en matière de promotion de l’entreprenariat, 4e en Afrique, avant-dernier au Maghreb, selon le global entrepreneurship Index 2016, le Maroc a encore du chemin à faire en matière d’entreprenariat, du moins pour qui verrait le verre à moitié vide. Pour les panélistes, ce bilan est relatif – on ne peut plus clair – à la perception de l’entrepreneuriat au Maroc. D’ailleurs, d’autres chiffres viendraient dépeindre davantage ce tableau noir. Le Royaume n’utiliserait que 29,5% de son potentiel en matière d’entreprenariat, contrairement à d’autres pays comme les Etats-Unis ou le Canada, qui exploiteraient 80% de leur potentiel. Pour M’hamed Abbad Andaloussi, président d’Injaz Al Maghrib, les jeunes Marocains manqueraient sérieusement d’esprit d’entreprise. D’ailleurs, selon lui, l’échec du projet Moukawalati, initié en 2006 dans le but d’accompagner les jeunes à créer leurs entreprises, y trouverait ses racines. Sur les 30 000 entreprises que visait à créer le projet, ce sont uniquement 900 entreprises qui ont pu voir le jour, soit seulement 3%. «J’ai été surpris de voir au Maroc les diplômés chômeurs se liguer, faire la grogne pour être intégrés dans la fonction publique», a lâché pour sa part le journaliste Ouadih Dada.

Contrairement au sens commun qui tire à boulets rouges sur les défauts de financement, d’accompagnement comme causes majeures pour les intervenants, plusieurs facteurs intrinsèques à la société seraient à pointés du doigt. «L’on ne devrait pas parler d’un écosystème mais de plusieurs écosystèmes dont la famille, l’école, la société, les banques », a expliqué pour sa part Grégory Gueneau, directeur d’Adalia Business School. «Au Maroc on a un vrai problème de mentalités. Il existe beaucoup de verrous psychologiques en matière d’entreprenariat», a lancé Fatima Zahra Oukacha, directrice de CEED Maroc. Pour elle, la perception négative de l’échec au Maroc, pourtant un «fuel» de l’entrepreneur et surtout un moyen d’apprentissage, serait un véritable frein à l’entreprenariat. «Qui ne s’est jamais moqué d’un entrepreneur qui a raté ? », a lancé le directeur d’Adalia. Pour les panélistes, favoriser l’entreprenariat au Maroc nécessiterait de démystifier le concept. «Au Maroc, tout entrepreneur qui n’a pas percé dans ses études et qui a du succès est l’objet de suspicion», a confié Ouadih Dada. Tous ces facteurs encourageraient l’incapacité des jeunes marocains à marketer leurs projets.

Pour les intervenants, en plus des efforts déployés en matière d’accompagnement, de financement des entrepreneurs, il est important d’inculquer l’esprit d’entreprise aux jeunes Marocains dès la prime enfance.

Danielle Engolo

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