L’alerte du poissonnier

Saoudi El Amalki

Le poissonnier de Marrakech, désormais érigé en réel « héros » populaire, ne fait que dévoiler les insanités du système de subtilisation qui s’opère au grand jour, par les lobbys des intermédiaires de la consommation au sein des marchés intérieurs. En effet, les ressources halieutiques passent par une vingtaine de médiateurs aussi voraces que véreux avant d’atterrir dans le panier du citoyen, tel que vient de l’avouer l’un des ministres de l’actuel gouvernement. Pareil également, au niveau des produits alimentaires, en particulier la tomate et le poivron, pour ne citer que ces aliments à grande utilisation dans la cuisine marocaine. Ajouter à cela, la viande rouge, la volaille, les oléagineux plus spécialement l’huile d’olive, élément prisé de grande présence de la cuisson dans les ménages et bien toutes les nourritures à forte nécessité, y compris les fruits et les légumineuses de toutes sortes. En fait, ce que l’on peut retenir de la résurrection de « moul Lhout » de la cité ocre qui s’est exposé avec cran et révolte, à l’ire de la spéculation fomentée dans l’impunité la plus absolue, c’est bel et bien le laxisme et la complaisance de ces barons du monopole aux détriment des démunies de la société. Il faut bien dire que quasiment toutes les parties qui foisonnent dans les différentes phases des  opérations commerciales, à savoir certains agents de l’autorité peu scrupuleux, du contrôle de l’Etat et de la transaction administrative, en ont pour leur propre compte en tirant profit de toute la chaîne illicite. S’agissant de la pêche, il est bien connu que depuis la capture du poisson dans le large, au pont-bascule vers la sortie du port en direction des grossistes puis des détaillants et enfin des consommateurs, les pêcheries sont soumises à un processus infernal de fraude dont les plus perdants ne sont autres que les caisses étatiques pillées lors des prélèvements de taxes et les citoyens foudroyés dans les halles aux poissons. Mêmes supplices sont endurés  par les couches déshéritées à la fin du circuit des fruits et légumes, torpillé par les intermédiaires inciviques dont regorgent les marchés internes. Ces pratiques ne peuvent que générer la hausse des prix et la flambée inflationniste qui sévissent et arnaquent les pouvoirs d’achat des petites bourses, au su et au vu de toute la nomenclature gouvernementale qui ne pipe mot face à ce massacre. « La pression provoque l’explosion ! », dit-on dans le langage des sciences physiques, ce qui pourrait convenir aussi au phénomène de l’instabilité sociale explosive à tout moment. Aujourd’hui, c’est un petit vendeur de passion qui s’insurge pour cette alerte préjudiciable, mais demain, ce serait sans nul doute, des contingents de concitoyens qui feraient gronder les artères, en face des assauts musclés des services d’ordre. La stabilité de la Nation qui a toujours fait exception, des décennies durant, est à présent sérieusement menacée, pour les beaux d’une minorité omnipotente !

Top