Le lancier en chef des «Cavaliers de l’Oriental»

Alaâ Eddine Tmimi, buteur historique du MCO

Il faisait preuve d’une vista incroyable sur la pelouse. Ses déplacements dans la surface de réparation, ses coups de têtes foudroyants et son flair de buteur donnaient le tournis aux défenseurs. Les fans de football se souviennent assurément encore de ses réalisations somptueuses qui ont fait la période de gloire du Mouloudia Club d’Oujda (MCO) au milieu des années 80.

Marié et père de deux enfants, Anis et Houssam, Alaâ Eddine Tmimi, encore nostalgique de sa ville natale, est installé aujourd’hui dans la Cité ocre où il occupe le poste de professeur de deuxième cycle au Lycée Mohammed V, tout en entretenant sa relation d’amour avec le ballon rond. Il semble que le temps n’ait pas eu de prise sur lui, car l’ancien joueur du MCO continue à caresser la balle en jouant des matches avec ses anciens collègues au sein de l’Association sportive des anciens joueurs d’Oujda (ASAJO).

L’enfant du quartier dit « village Si Lakhdar » est considéré par les analystes sportifs comme l’un des meilleurs artisans de l’histoire des chevaliers de l’oriental, aux côtés de Bouselham, Smiri, Bouchkhachakh, Daghri, El Aâbed pour ne citer que ceux-ci.

Il faut dire que sa force de caractère et son assiduité lors des séances d’entrainement l’ont propulsé au rang de meilleur buteur historique du Mouloudia Club d’Oujda (MCO).

Au bout seulement de quelques années, Alaâ Eddine a fait florès lors des rencontres du Championnat d’élite et s’est imposé comme une valeur sûre à l’échelle de la scène footballistique nationale. Cependant, il n’a jamais envisagé devenir un attaquant de pointe. Au regard de sa taille svelte et sa capacité de gagner tous les duels aériens, l’enfant du «village Si Lakhdar» occupait, depuis son jeune âge, le poste de gardien de but. «L’équipe de football de mon quartier composé de joueurs plus âgés que moi, faisait souvent appel à mes services lorsqu’il manquait d’un portier», confie-t-il à Al Bayane. «Parfois, quand un joueur s’absentait, je remplissais le rôle de sapeur-pompier en m’alignant  à la ligne d’attaque», ajoute-t-il. Pour lui, «les championnats inter-quartiers furent une véritable école d’apprentissage pour les générations du passé».

Le passage d’Alaâ Eddine Tmimi parmi les catégories minimes et cadets du MCO n’a pas duré longtemps, puisqu’il privilégiait les études au football.

Un jour, sur invitation d’un infirmier qui résidait dans son quartier, l’équipe du «Village Si Lakhdar» fut conviée à jouer un match amical avec la délégation du corps médical de la ville devant prendre part au Championnat régional du ministère de la santé. Ses qualités techniques suscitèrent l’intérêt de l’entraîneur Mustapha Belgaïd, qui le sollicita pour intégrer l’Association du Croissant rouge d’Oujda (ASCRO), une formation qui évoluait à l’époque en troisième division.

La saison 79/80 fut donc charnière dans son parcours ; l’enfant de l’oriental donna la pleine mesure de son talent, en remportant, haut la main, le titre de buteur de ce tournoi.

Sur insistance du joueur légendaire, Mohamed Filali, il fut recruté par le dirigeant du MCO, feu Mustapha Belhachmi, durant le Mercato hivernal de la saison 80/81, au début du mois de janvier.

L’anecdote de feu Belhachmi

Quelques matches seulement lui auront suffi pour faire exploser son talent et scorer de la tête de superbes buts et être enfin convoqué par le sélectionneur du Maroc, Jaime Valente, en vue de prendre part au côté des Lions de l’Atlas aux Jeux Méditerranéens à Casablanca en 1983.

Dans l’entourage de Tmimi, on ne cesse de raconter l’anecdote de feu Mustapha Belhachmi qui s’adressa, en fin de saison, au coach de l’ASRCO, en lui faisant part de son mécontentement, quant à la décision de ce dernier de céder un joueur qui excelle dans le jeu de tête et ne concrétise que les balles aériennes. La réponse fut hilarante : «Vous pouvez le renverser et le tenir sur la tête pour qu’il puisse marquer avec les pieds».

Poursuivant sur la même lancée, le rayonnement du joueur fera la une de l’actualité sportive pendant toute la saison 83/84 du Championnat national. Il finira par être sacré meilleur buteur avec 11 réalisations, ex-aequo avec Mjidou du Wydad. Lors de cette saison, Tmimi porta son compteur à 23 buts, toutes compétitions confondues.

Ses buts devant la formation militaire de l’ASFAR, l’équipe redoutable des années 80 menée par le maestro Mohamed Timoumi ou encore contre le CODM sous la conduite de feu Aziz Daidi et le CAK de Kenitra le mirent dans le viseur de Mehdi Faria qui le sollicita pour accompagner ses poulains au Mondial 86. Mais, le sort en décida autrement. En 1985, lors d’une confrontation contre le WAC, au mois de février, au Stade d’honneur à Oujda, l’attaquant du MCO sera victime d’une terrible fracture au pied droit, dont l’auteur n’est qu’Aziz El Gana, connu en son temps par son jeu très engagé.

«Ce fut un véritable choc psychologique et un coup dur pour ma carrière», se rappelle-t-il encore, non sans amertume. Et malgré sa blessure, il se classa deuxième dans le tableau des buteurs avec 12 réalisations et à seulement un but d’écart d’un autre buteur de la région, Hmida Boushaba de la Renaissance de Berkane, sacré meilleur buteur de la saison en 1985.

Changement de cap

Pour des raisons liées à sa fonction, il dut changer de cap pour prendre la destination du KACM, puis du CODM durant trois saisons en D2, en jouant à deux reprises le match de barrage, mais en vain !

Par la suite, Alâa Eddine fut sollicité pour entraîner quelques clubs, en l’occurrence l’USMO et l’Etoile d’Oujda et même le MCO à deux reprises. «Le manque de professionnalisme de certains dirigeants et l’absence d’une culture managériale de haut niveau m’ont poussé à tourner le dos au coaching», déclare-t-il à Al Bayane.

Rétorquant à une question sur le niveau des joueurs de sa génération par rapport à celle d’aujourd’hui, Tmimi estime que «les joueurs de sa génération avaient la grinta et ne ménageaient aucun effort pour mouiller leurs maillots. Bref, ils éprouvaient un sentiment d’appartenance envers leurs clubs. Malheureusement, ce n’est plus le cas aujourd’hui». Un tel constat s’explique, selon lui, par plusieurs variables. A commencer par l’absence de véritables politiques de formation au sein des clubs principalement dans la catégorie des jeunes, affirme-t-il.

Pour l’enfant du «Village Si Lakhdar», «la quintessence du jeu footballistique réside dans sa capacité à mobiliser les personnes autour des valeurs du partage, du respect des autres et de l’amour».

«C’est un jeu plaisant où les émotions se succèdent et se libèrent. Cela ressemble à une belle pièce théâtrale à laquelle tout un chacun est convié à participer», conclut-il.

Khalid Darfaf

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