Le PI, le PPS et le PAM appellent à des mesures audacieuses

Pour réussir les prochaines élections

M’Barek Tafsi

Tout en étant parfaitement conscients des répercussions fâcheuses de la pandémie du Covid-19 dans le pays, les trois partis d’opposition (Istiqlal, PPS et PAM) ont appelé, dans leur mémorandum commun, présenté dans la perspective des prochaines élections de 2021, à des mesures audacieuses proactives pour permettre au Maroc de faire face à la crise sans précédent qu’il connait aux plans économique, social et politique.

Lors d’une conférence de presse en présentiel et à distance, donnée mercredi, les Secrétaires généraux des trois partis politiques ont tour à tour souligné la nécessité pour le Maroc et ses forces politiques de rompre avec tout ce qui a contribué à la dégradation du paysage politique d’une part pour lui permettre de relever les défis de cette période post-corona et de combattre d’autre part toutes les manifestations de précarité, de pauvreté, d’injustice sociale et spatiale et des inégalités diverses. Le pays est appelé à prendre des mesures audacieuses pour remonter la pente, ont-ils expliqué.

Nizar Baraka : Rompre avec toutes les pratiques à l’origine de la dégradation du paysage politique et de la perte de confiance

Explicitant davantage ses propos, le SG du PI, Nizar Baraka a indiqué que le but de cette initiative est de présenter des propositions sur les réformes à entreprendre pour restaurer la confiance dans les institutions élues et les partis politiques. Selon lui, les mesures proactives et préventives prises par les autorités publiques pour lutter contre la pandémie du Corona  avaient notamment permis de rétablir en partie la confiance dans l’Etat, mais non dans les institutions élues et les partis politiques, qui sont appelés à coordonner leurs actions pour assainir le paysage politique et inspirer la confiance des citoyens, lassés par les promesses non tenues pendant des lustres.

Pour y parvenir, a-t-il estimé, il est nécessaire de rompre avec toutes les pratiques, qui ont été à l’origine de la dévalorisation sans précédent des partis politiques et de la perte de confiance en eux et dans la politique, a-t-il expliqué.

C’est pourquoi, le PI, le PPS et le PAM ont jugé utile d’unifier leurs points de vue et de présenter des propositions communes, qu’ils souhaitent présenter aussi à d’autres partis politiques pour les convaincre de leur pertinence, a-t-il fait savoir.

D’après lui, ce travail est venu couronner tout une série d’efforts communs, dont des lettres adressées par les SG du PPS et de l’Istiqlal au chef du gouvernement, lui demandant d’ouvrir des consultations avec les partis politiques au sujet des élections. Ce qui avait donné lieu à des rencontres avec le chef du gouvernement et à une récente rencontre avec le ministre de l’intérieur.

Ensemble, les trois partis d’opposition ont jugé plus efficient de présenter des propositions communes au sujet des réformes à mener en prévision des prochaines élections, a-t-il dit, expliquant que ces réformes devront être réalisées cette année pour réserver l’année prochaine aux élections.

LE MEMORANDUM :   Ce mémorandum a notamment pour objectifs majeurs de rétablir la confiance dans le champ politique, réconcilier le citoyen avec la politique, promouvoir la participation massive dans les élections et dégager une carte politique répondant à leurs attentes futures du pays et des citoyens.

Le mémorandum ambitionne à travers ses propositions de contribuer au renforcement de la transparence et de la probité et à la moralisation de la pratique électorale.

Il s’agit donc à travers ces objectifs de renforcer la démocratie du pays, la représentativité et l’efficience des institutions, a-t-il noté.

LES AXES DU MEMORANDUM :

Le premier axe de ce mémorandum porte sur les réformes politiques et démocratiques et le deuxième est consacré aux réformes électorales. Au niveau politique, les réformes proposées rappellent la nécessité de traiter en premier la crise politique et la crise de confiance dans l’acteur politique et dans les institutions élues dans la perspective de dégager un pacte politique nouveau avec des fondations politiques et des institutions politiques fortes et des règles démocratiques solides.

D’après le constat fait par les trois politiques, le paysage politique subit une véritable dégradation pour des raisons subjectives liées à la nature du travail de l’acteur politique et des institutions politiques et à l’apparition de pratiques dominées par des calculs du gain et de la perte au lieu du contenu politique, intellectuelle et idéologique. A cela s’ajoutent diverses raisons objectives liées à la confusion et l’interférence des rôles des acteurs dans le paysage politique marocain, marqué par l’incapacité des partis politiques et des institutions élues à s’acquitter de leurs fonctions constitutionnelles et politiques. Cette situation de flaccidité soulève de grandes interrogations au sujet de l’avenir politique et démocratique dans le pays qui connait de grandes mutations sociales rapides, a-t-il ajouté, soulignant que le mémorandum propose d’œuvrer pour créer un climat d’apaisement politique et en matière des droits humains, un climat à même de redonner confiance aux citoyennes et citoyens.

Les réformes proposées doivent également porter sur les partis politiques appelés à renouveler leurs structures et élites et améliorer leur crédibilité, a-t-il noté.

S’agissant des réformes électorales proposées, elles s’assignent pour objectif de promouvoir une participation massive pour que les élections, l’action politique et les institutions élues soient crédibles. Elles ont également comme objectif de parvenir à des élections probes et honnêtes et une représentation véritable des citoyennes et citoyens. Pour réaliser ces objectifs, il est proposé de créer une commission nationale des élections, présidée par un magistrat et où siègent des représentants des partis politiques.

S’agissant du mode de scrutin, les trois partis proposent de maintenir l’actuel mode mixte (de liste et uninominal) en vigueur pour les élections communales en adoptant le mode de scrutin de liste pour les communes comptant plus de 50.000 habitants et le scrutin uninominal dans les autres circonscriptions.

Il s’agit aussi pour eux de renforcer la participation des femmes et des jeunes en adoptant des listes régionales pour femmes et pour les jeunes (des deux sexes) au lieu de la liste nationale.

Ils avancent également une panoplie d’autres suggestions pour encourager la participation des jeunes à travers l’inscription automatique de ceux qui ont atteint l’âge de 18 ans, et leur exonération des droits de timbre pour l’obtention de la CNIE et en partie des droits de timbre pour l’obtention du passeport biométrique.

Dans le cadre de ces propositions incitatives plusieurs autres recommandations sont également contenues dans ce mémorandum, qui recommande aussi d’assainir les anciennes listes électorales et d’encadrer les campagnes électorales par l’interdiction de l’utilisation des symboles nationaux, de l’hymne national, des couleurs rouge et verte dans les prospectus et les dépliants etc…

Il est enfin proposé d’organiser les élections communales, régionales et législatives en un jour et à la même date (de préférence un mercredi), pour que la participation soit massive , estiment les trois partis politiques, dont le mémorandum comporte une série d’autres propositions visant en fin de compte à assurer aux prochaines élections toutes les conditions de réussite avec la participation du plus grand nombre de citoyens

 Il est proposé aussi de procéder à un nouveau découpage électoral pour que les communes dépourvues de moyens de développement puissent intégrer un espace plus avantagé pour ne pas rester à la traine.

A travers ce mémorandum, a ajouté Nizar Baraka, les trois partis politiques se proposent d’unifier leurs points de vue car le pays traverse une étape décisive. Le Maroc est confronté à une crise aigue sans précédent aux niveaux économique, social, et politique, a-t-il dit, regrettant que cette situation ne préoccupe guère la majorité gouvernementale, qui vit au rythme de ses divisions.

Abdellatif Ouahbi : le mémorandum commun des trois partis est celui du présent et de l’avenir et non du passé

Théoriquement parlant, a indiqué pour sa part, le Secrétaire général du parti de l’Authenticité et de la Modernité, Abdellatif Ouahbi, c’est la majorité qui devait présenter un mémorandum commun et non l’opposition dont les trois membres sont parvenus à s’entendre pour présenter conjointement ces propositions.

Tout en rappelant que chaque chose en son temps en réponse à un journaliste, selon lequel ce document serait annonciateur d’une alliance entre les trois formations pour pouvoir constituer le prochain gouvernement, le SG du PAM, a fait savoir que les trois partis politiques sont parvenus dans un premier temps à coordonner leurs actions au niveau du Parlement.

A présent, a-t-il ajouté, ils sont à la recherche des moyens d’établir des concertations avec d’autres partis politiques, invités à prendre conscience de la nécessité de laisser de côté leurs divergences et leurs calculs étroits pour œuvrer ensemble dans l’intérêt du pays et de la démocratie. Il y va aussi de leurs propres intérêts et de leur avenir en tant que partis politiques, a-t-il expliqué.

Le mémorandum des trois partis a prévu des moyens d’incitation des jeunes au vote en évitant de parler de vote obligatoire, dont l’institution serait contreproductive, selon lui.

En présentant ces propositions, les trois partis politiques ne visent qu’à améliorer le climat et appeler à l’apaisement. On ne cherche pas le consensus, mais l’on cherche à convaincre les autres partis politiques de la pertinence des propositions contenues dans ce mémorandum, qui se veut être celui des partis politiques du présent et de l’avenir et non pas du passé, a-t-il martelé.

Nabil Benabdallah : le mémorandum commun a le mérite d’avoir unifié les vues sur le paysage politique qu’il faut rationaliser

Mis à part son contenu riche en propositions diverses, le mémorandum commun des trois partis d’opposition a le mérite d’aspirer rationaliser le paysage politique hétéroclite, flasque et soumis à des stress de toutes sortes et où tous les partis politiques représentés ou non au parlement s’activent, a souligné de son côté le Secrétaire général du PPS, Mohammed Nabil Benabdallah.

Les trois partis politiques ont donc réussi à réaliser ce travail, a-t-il dit, indiquant qu’il est souhaitable que les principaux partis politiques dans le pays aient un point de vue et une vision unifiés pour réhabiliter la politique, lui rendre ses lettres de noblesse et réconcilier les citoyennes et citoyens avec la chose politique.

Il est donc nécessaire de rendre hommage aux trois partis de l’opposition pour avoir réussi ce pari, contrairement aux composantes de la majorité gouvernementale qui n’ont pas pu le faire, a-t-il dit, estimant qu’il est prématuré de parler d’une alliance entre les trois formations, alors que les préparatifs électorales viennent de commencer.

Pour ce qui est de ce mémorandum, il comporte des propositions pour assurer aux élections toutes les conditions de réussite et fait par la même occasion une profonde analyse introductive de la situation politique, aux termes de laquelle il avance une série de recommandations pour remédier à l’absence d’intérêt porté aux élections et à la politique chez les citoyennes et citoyens, qu’il faut désormais réconcilier avec la chose politique tout en appelant à la prise de décisions audacieuses pour y parvenir. Dans le cas contraire, l’on risque d’avoir des institutions sans crédibilité, élues à l’issue d’une forte abstention, a-t-il expliqué.

C’est d’ailleurs pour ce faire que les trois partis politiques ont convenu de coordonner leur action dans le but de promouvoir une participation massive aux  prochaines élections, a-t-il dit, rappelant que le mémorandum en question insiste d’entrée de jeu sur le choix démocratique que les trois partis politiques se partagent et qui doit encadrer le champ politique dans le pays.

Evoquant la question du vote obligatoire soulevée par les journalistes, il a estimé qu’une telle décision serait contreproductive, compte tenu du fait que très peu de citoyennes et citoyens accordent un quelconque intérêt aux élections. Il est donc clair qu’une décision de ce genre ne peut produire qu’un résultat inverse, selon le SG du PPS, qui a expliqué que c’est pour ces raisons que le mémorandum ne propose que des incitations pour encourager surtout la participation des jeunes aux élections.

S’agissant de la question des symboles à ne pas utiliser lors des campagnes électorales, il importe de faire la part des choses pour ne pas tomber dans les abus, a-t-il dit, ajoutant que le problème de représentativité des jeunes à travers la liste nationale et des femmes, à travers aussi la liste nationale doit être traité différemment. La représentativité des femmes telle prévue dans la Constitution doit être renforcée dans la perspective de promouvoir le principe de la parité, a-t-il ajouté, rappelant que le mémorandum propose de traiter la question au niveau régional.

Il a en outre invité à la représentation des cadres que recèlent les partis politiques pour leur permettre d’améliorer les débats au Parlement et faire profiter le pays de leurs atouts et connaissances, a-t-il expliqué.

Pour les trois partis politiques, a-t-dit, il est risqué d’organiser les élections en se contentant du statu quo au lieu de prendre de nouvelles dispositions pour rompre avec tout ce qui a provoqué cette défiance destructrice dans les instances élues et les partis politiques et promouvoir une nouvelle ère d’espoir pour le pays et le peuple.

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