Les agences de voyages contaminées par la crise

Industrie touristique au Maroc

En dépit des sursauts d’orgueil qui se manifestent actuellement, dans le domaine du tourisme, en particulier, au niveau des agences de voyage, le secteur bat toujours de l’aile. Les professionnels et les opérateurs tentent des coups de pouce pour insuffler des bouffées d’oxygène en direction d’un volet économique vitale, en phase d’essoufflement. Reconsidérer le dispositif du plan Azur,  s’aligner pleinement dans le sillage de la vision 2020, raviver le réceptif terrestre et aérien, parfaire le module de l’animation au-delà de la saisonnalité, relever les taux d’arrivées et de nuitées, sont, à coup sûr, les leitmotivs du cheval de bataille de l’élan touristique.

Ce dont souffre exactement le potentiel d’un point de mire, en période maussade tel Agadir, à titre d’exemple. Une destination en perte de vitesse, malgré des efforts consentis, à plus d’un registre. Il est bien évident que les crises qui secouent actuellement les marchés traditionnels comme la France et l’Espagne influent négativement sur nos rendements en termes de drainages, en plus des répercussions fâcheuses des perturbations étrangères. La filière des agences de voyage qui, naguère, fleurissait, accuse un recul des plus déconcertants, aussi bien au niveau du parc automobile que de la qualité des prestations. Il n’en demeure pas moins vrai que des déficiences ont également contribué à cette tendance baissière. On dira certainement à haute voix que la capacité litière fait atrocement défaut, depuis que, sur 25 000 lits existants présumés commercialisables dans une destination prisée comme Agadir, plus de la moitié est délabrée et se trouve continuellement dans un état piteux. Cette pénurie influe directement sur les agences de voyage qui sont, en fait, sanctionnées par des réductions d’affluences, de plus en plus accrues.

On déplorera aussi, non sans profonde amertume, que l’aérien constitue un réel handicap. Des marchés porteurs tels que l’Allemagne,  la Grande Bretagne et la Scandinavie exigent forcément des dessertes aériennes idoines et un éventail d’accueil étendu. On évoquera, sans nul doute également, l’ambiance morose» dans laquelle se trouve la destination d’Agadir en mal d’animation, susceptible d’accrocher les visiteurs, à longueur de journée. Barricadés dans des espèces de «ghettos», à cause de la formule « tout compris ». Par ailleurs, on a beau reproduire des discours creux par rapport à l’arrière pays regorgeant de potentialités naturelles et des conditions climatiques  indéniables, il se trouve que l’aménagement de ces sites laisse à désirer, à l’image de la région d’Immouzzer, abandonnée à son sort, malgré des ébauches timides en matière des sentiers pédestres, dans le cadre de la stratégie du Pays d’Accueil Touristique (PAT).

A ce propos, il y a lieu de dire que l’Etat se doit, en ces moments de fléchissement,  d’assurer le cap et rassurer les esprits, en injectant les fonds qu’il faut. L’idée de prendre la relève, après le désistement du privé dans pas mal de stations, n’est pas à écarter, d’autant plus que des pourvoyeurs tels la CDG ou encore le Fonds Marocain de Développement Touristique (FMDT) sont de nature à convaincre les investisseurs. A ce sujet, on pourrait aussi citer l’exemple de la station balnéaire de Taghazout qui, durant plus d’une décennie, a été confiée, à maintes reprises, à des développeurs aménageurs étrangers,  n’a jamais vu le jour. Il est à rappeler que le tourisme est un secteur à haute valeur ajoutée. C’est le premier bailleur de fonds au niveau des recettes en devises. Il est également le second contributeur au PIB après l’agriculture, avec 8 à 9%. C’est le deuxième employeur de la main d’œuvre et de cadres avec 470.000 emplois mis sur le marché. L’opérationnalisation de la Vision 2020, permettra, sans doute,  la mise en fonction  des projets structurants à travers le pays, surtout dans les destinations touristique de haute notoriété.

Avec les stations balnéaires et les territoires touristiques, la création des ressources est assurée. Une destination comme Agadir est censée rebondir à plein régime, avec une véritable politique de relance agressive, axée sur la consolidation des structures d’accueil et des activités parallèles (hôtellerie, restauration, agences de voyage, produits artisanaux…), la mise en marche des projets structurants d’accompagnement,  la diversification du produit proposé, la mise en place de promotion et de marketing performants, la mise en fonction de l’animation continuelle pour réduire la saisonnalité, l’impulsion des agences des voyages, toutes catégories confondues…Pour ce faire, des efforts de tous les intervenants, institutionnels, associatifs, professionnels, est une exigence impérative, car l’industrie touristique, de par son aspect sociétal, sa dimension universelle et sa nature fébrile, nécessite le parrainage de toutes les parties.

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Les Agences de voyage au Maroc

Un atout majeur à mettre en avant

sahara400Le prestigieux congrès germanique de la fédération des agences des voyages (DRV) est toujours une opportunité pour nos destinations, en quête du marché allemand. Plus de 75 millions d’allemands voyagent, chaque année, dans les multiples coins du monde. La part de notre pays dans cet immense lot est très infime. Et pourtant, les allemands, adeptes du balnéaire, optent toujours pour le littoral national. La clémence du climat, la stabilité et l’hospitalité sont, en effet, autant d’atouts qui favorisent cette attractivité.

Mais, depuis, l’espoir qu’on nourrissait de voir prospérer ce marché porteur, ne donnait pas, hélas, suite, à la grande déception des professionnels et au grand discrédit des destinations.
Cependant, il ne faudrait surtout pas baisser les bras devant cette situation critique. En fait, l’Allemagne disperse dans la planète plus de 75 millions de touristes par an, grâce justement à la vista de son système de management de voyage, puissamment et savamment orchestré par les Tours Opérateurs de haut calibre universel. Aussi, les allemands avaient-ils une prédilection manifeste pour notre pays,
notamment Agadir, en tant que produit balnéaire de choix. Une tradition que nous n’avons pas pu maintenir ni développer pour des raisons de mauvaise gouvernance en termes de promotion et de
marketing.

Actuellement, le marché est incontournable et se hisse parmi les plus prisés du globe, en dépit de la crise qui touche directement la bourse des voyageurs allemands. Tout le monde en est conscient, y compris la compagnie aérienne nationale qui a décidé de placer des vols supplémentaires, là où le besoin se fait ressentir. Le département de tutelle met pareillement les bouchées doubles pour mettre davantage d’antennes dans le territoire allemand, en complément de celui déjà installé à Düsseldorf.  Il s’avère, en effet,  anormal qu’un pays riverain comme la Tunisie en possède quatre dans les villes principales germaniques, alors que nous nous contentons, depuis longtemps, d’une seule délégation sans gros moyens matériels ni humains sur place.

Il convient de souligner, néanmoins, que toutes les composantes du secteur aussi bien régionales que nationales continuent à nourrir de gros espoirs pour la relance et l’expansion de ce marché
de haute notoriété. Ce pays est un génie de l’Histoire contemporaine et il est loisible de s’en inspirer dans une industrie touristique en pleine émergence. Le Maroc dont Agadir, en particulier, en est un espace de haut standing, de par ses multiples donnes qui répondent entièrement à la stratégie nationale de tourisme. Il faut dire aussi que la nouvelle station balnéaire de Taghazout dont les chantiers sont entamés bien que timidement, constitue un atout supplémentaire en ermes de capacités litières, talon d’Achille de toute promotion touristique, ainsi que l’apport notoire de l’arrière pays regorgeant d’exotisme, spécialement les gorges de Daddes et Toudgha, les sables de Merzouga…, sans parler de la diversification du produit de terroir, le miel, le safran, l’amande, l’arganier…Les perspectives mises en avant, grâce au dynamisme
de toutes les constituantes du secteur sont appelées de convaincre un marché jaillissant avec des TO influents, dont la part de notre pays ne dépasse guère les trois cents milles touristes germaniques par an.

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Said Scally, président de l’ANTT

«Plusieurs voyagistes jettent les clés sous le paillasson»

Said Scally (1)400Pour ce professionnel chevronné, en particulier, dans le volet de l’aérien, et spécialiste du marché allemand et scandinave, mais aussi un savoir faire dans l’hôtellerie et le transport touristique, la baisse de 30%, au niveau des agences de voyage, est due essentiellement au Moyen Orient, à l’Egypte et la Turquie. Selon lui, ce recul ne date pas d’aujourd’hui, mais il a apparu depuis 2007 et prend de l’ampleur voire des tournures inquiétantes, ces temps-ci. Dans ce sens, poursuit-il, les français qui étaient plus de 230 000 visiteurs sont maintenant, à quelques 100 000. Une régression criante qui explique bien la crise, non pas seulement dans le domaine des voyagistes, mais également au niveau de l’hôtellerie, l’artisanat, la restauration, c’est-à-dire, presque dans toutes les composantes de l’industrie touristique dans notre pays.

Dans le même ordre d’idées, l’ex président du Conseil Régional de Tourisme de Souss Massa Draa-Agadir, fait savoir également que nombre de réceptifs ont fermé boutique, à cause de cette situation peu encourageante. En effet, enchaine-t-il, la vente directe, d’une part, et la formule All Inclusive ont porté préjudice à cette filière : Effectivement, précise-t-il, la mise en place de l’opération Tout Compris a complètement bousillé les agences de voyages, en particulier le marché qui, il y a quelques années, prépondérant. Dans le même sillage, l’ancien patron du Four Seasons Travels (FST), indique que seuls les prestataires des Tours Opérators parviennent à tirer leur épingle du jeu. Face à cette situation critique, plusieurs voyagistes jettent les clés sous le paillasson et mettent des guides à la porte, car ils n’arrivent plus à joindre les deux bouts

Enfin, Il va sans dire que la crise qui frappe le secteur du tourisme, dans sa globalité, a eu des incidences fâcheuses, d’autant plus que les intentions de relance ne mettent en compte le volet des agences de voyages qui demeure, en conséquence, le maillon faible de la chaine, explique-t-il. Par ailleurs, il affirme que l’impulsion de ce domaine qui bat de l’aile est, sans doute, appelé à rassembler toutes les énergies et conjuguer tous les efforts afin que ce secteur joue pleinement son rôle, en matière de transport touristique.

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Lahoucine Saadaoui, président de l’ARAVAS

«Les agences clandestines portent préjudice au secteur»

saadaouiSelon Lahoucine Saadaoui, président de l’Association Régionale des Agences de Voyage dans la région du Souss Massa et l’un des figures de proue du tourisme dans la région, la crise de la composante des agences de voyage n’est que l’illustration de la crise que connait le tourisme, en particulier dans la capitale du Souss. Cette crise générale touche, en effet, les hôteliers, les artisans, les restaurateurs…A Marrakech, on peut dire, poursuit le voyagiste régional, que la situation n’est pas aussi préoccupante, car la cité ocre s’appuie sur des charters qui parviennent à booster la destination prisée.

D’autre part, ce professionnel affirme que la compagnie nationale aérienne se focalise sur l’Afrique, chose qui est souhaitable d’ailleurs, mais il serait aussi judicieux de se pencher sur le coté touristique dont l’aérien présente un réel handicap. Cet opérateur touristique déplore cette situation et fait savoir que plus de 80 agences de voyage sont menacées de faillite si des mesures urgentes et efficaces ne sont prises pour leur relance. Cependant, insiste-t-il, le relèvement de cette situation dramatique est tributaire du relèvement de l’industrie touristique dans sa totalité. On ne peut donc imaginer le développement des agences de voyage, avec l’absence des structures d’accueil à la hauteur, des services et des prestations au niveau des attentes des visiteurs, des dessertes diversifiées et suffisantes, des animations régulières….

D’autre part, il affirme que les agences clandestines portent préjudice au secteur car cela manque d’équité et de crédibilité. En conséquence, enchaine-t-il, il va falloir faire un nettoyage dans ce secteur qui déjà n’est pas au beau fixe et soumis à des lynchages pareils.

Saoudi El Amalki

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