Les anti-Poutine défilent à Moscou et Saint Petersbourg…

Les rues de Moscou étaient noires de monde ce samedi pour la première grande manifestation depuis que le vaste mouvement de protestation en faveur d’élections libres qui avait secoué la capitale russe l’été dernier avait été violemment réprimé.

Le rassemblement de ce samedi qui, selon l’ONG «Compteur Blanc»,  a réuni quelques 22.000 personnes avait, initialement, été organisé pour commémorer la mort de Boris Nemstov, principal opposant au chef de l’Etat, survenue en Février 2015 aux abords du Kremlin. Mais, lorsque les marcheurs se sont mis à scander à l’unisson «la Russie sans Poutine» ou encore «La Russie sera libre», le regroupement a changé de ton en passant d’une marche du souvenir à une manifestation contre la vaste révision constitutionnelle voulue par le Président Poutine à l’effet de lui permettre de préserver son influence et de pérenniser le système qu’il a mis en place durant ses vingt années au pouvoir puisqu’il ne pourra plus se porter candidat à la présidence de la Fédération de Russie en 2024.

Au même moment, quelques 2.000 personnes défilaient à Saint-Pétersbourg, la deuxième ville du pays, en scandant les mêmes slogans et les mêmes mots d’ordre que leurs compatriotes à Moscou.

Les manifestants ont également appelé à la libération des «prisonniers politiques» et, principalement, ces jeunes russes condamnés, ces derniers mois, dans diverses affaires controversées pour «violences» contre les forces de l’ordre ou activités «terroristes» comme ce fut le cas, notamment, de ces dix jeunes du groupe «Set», amateurs d’Airsoft, un sport à thème militaire grandeur nature, qui écopèrent de très lourdes peines d’emprisonnement après avoir été accusés de vouloir «déstabiliser l’action des organes gouvernementaux de la Fédération de Russie (et) renverser, par la violence l’ordre constitutionnel établi».

Mais qui était donc ce Boris Nemstov dont les manifestants brandissaient le portrait ? Issu de la génération des jeunes réformateurs des années 1990 et ayant occupé le poste de vice-premier ministre dans le gouvernement de Boris Eltsine (1991-1999) avant de se muer en un virulent critique de la politique menée par Poutine, Boris Nemtsov venait de dénoncer, dans une interview, l’implication de l’armée russe aux côtés des séparatistes dans l’est de l’Ukraine lorsque quatre balles assassines, tirées dans son dos, le firent taire à jamais alors qu’il se trouvait sur un pont faisant face au Kremlin.

Ce meurtre, dont le(s) commanditaire(s) cour(en)t  toujours, avait provoqué une onde de choc tellement grande aussi bien à l’intérieur du pays qu’à l’étranger que les soupçons de l’implication des autorités russes se multiplièrent. Aussi, en 2017, cinq hommes originaires des républiques russes de Tchétchénie et d’Ingouchie furent-ils condamnés à des peines allant de 11 à 20 ans de prison pour, dit-on, avoir assassiné Boris Nemtsov à cause de ses critiques contre l’Islam ; ce qui fut immédiatement mis en doute par l’opposition qui a pointé du doigt l’autoritaire dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov, déjà mis en cause dans l’assassinat d’autres opposants.

Le commanditaire présumé de ce meurtre ayant été identifié comme étant le commandant d’une unité militaire tchétchène, répondant au nom de Rouslan Gueremeïev, mais qui n’aurait jamais arrêté après avoir fui à l’étranger, Alexei Navalny, l’opposant numéro un à Poutine, appuyé par l’Union Européenne, a appelé les autorités de Moscou à rouvrir l’enquête.

Ce dernier a déclaré, samedi, sur les chaînes de la télévision d’opposition «Dojd» qu’étant donné que l’enquête piétine et qu’il n’y a «aucun progrès», des rassemblements auront lieu chaque année «jusqu’à ce que l’affaire soit résolue». Le sera-t-elle, un jour, et l’appel de la rue sera-t-il entendu par un président russe qui semble ne point vouloir se dessaisir du pouvoir ? Attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

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