L’espoir d’une issue rapide

Conférence du Collectif de défense des détenus d’Al Hoceima

Le collectif de défense de la cinquantaine de détenus d’Al Hoceima, condamnés le 26 juin dernier jusqu’à 20 ans de prison ferme, a organisé, hier lundi au siège du Barreau des Avocats du Maroc à Casablanca, une conférence de presse pour faire le point sur le procès qui a duré plus de 8 mois.

Le Collectif a commencé par lancer un appel pressant au détenu Rabii Al Ablak qui suit, depuis plus d’un mois, la grève de la faim, le suppliant de surseoir à son geste, pour l’intérêt de sa santé, la «pitié pour sa famille» et en réponse aux «appels de plusieurs instances et personnalités».

Après avoir salué tous ceux qui ont soutenu les détenus pour un procès équitable, le Collectif a prévenu, dès le départ, qu’il ne s’agit pas d’ « une plaidoirie en dehors du Tribunal » face à un jugement. Sa démarche se résume en « l’exposition du déroulé du dossier, avec les faits et procédures…».

Les avocats de la défense ont par la suite rappelé, longuement et en détail, les événements d’Al Hoceima, depuis le décès du vendeur de poisson d’Al Hoceima le 28 octobre 2016, relatant, en même temps, les points forts de la protestation puis des contestations et des marches revendicatives, avec le début de l’enquête officielle décidée plusieurs mois après…

Pour le Collectif, les manifestations, qui ont duré plusieurs mois, ont été ponctuées de « tentatives d’interdictions et d’arrestations» de manifestants.

Les pouvoirs publics sont accusés d’avoir voulu « isoler le Hirak à travers des accusations contre ses artisans, symboles et direction» qu’ils voulaient «apeurer afin d’en limiter l’ampleur».

Le Collectif a donc beaucoup plus émis des observations sur le déroulement des arrestations des activistes du Hirak, de l’instruction des dossiers et du procès, qui a commencé réellement en novembre 2017 alors que les arrestations avaient débuté depuis le mois de mai 2016… quand « les pouvoirs publics avaient procédé à une campagne d’arrestations qui a touché des dizaines de personnes, pour des faits reprochés le jour même, des fois, et jusqu’à plusieurs mois pour d’autres ».

Refus de l’audition des témoins à décharge

Au niveau de l’instruction des dossiers, le Collectif  signale «l’audition de témoins à charge» sans que «les détenus n’en soient informés» et sans présentation de leurs témoignages… et le refus de la liberté provisoire ainsi que les requêtes de la défense en matière d’audition des témoins des accusés…

En ce qui concerne le procès qui devait s’ouvrir le 9 septembre 2017, et qui a été reporté à octobre puis novembre, le Collectif a énuméré plusieurs vices de formes, et le refus de nombreuses demandes de la Défense.

Ainsi ce procès aura duré plus de 8 mois et connu «896 audiences, avec un rythme de 2 à 4 auditions par semaine» et aura été marqué par plusieurs conflits et altercations ainsi que «des observations et des mesures non conformes avec les dispositions légales».

Pour le Collectif, dont l’objectif est d’ «éclairer l’opinion publique, se réserve le droit de présenter toutes ses observations, devant les instances judiciaires et les autres institutions concernées».

De la présomption d’innocence

C’est pourquoi, il s’est contenté d’«observations et d’interrogations» sur le déroulé de cette affaire, dont notamment  «le peu d’intérêt accordé à la présomption d’innocence» et «les deux poids deux mesures» auxquels il a été souvent recouru contre les droits de la Défense » ainsi que la manière avec laquelle «les moyens de conviction, d’équité et de neutralité» ont été gérés, notamment à travers «les communiqués du Parquet et ses déclarations unilatérales et le recours aux médias publics».

Le reproche est également fait au juge d’instruction à travers «les mesures prises en dehors des principes de la neutralité, ce qui s’est illustré aussi par le «refus de convoquer les témoins à décharge» et «son éloignement de l’équilibre indispensable entre les parties et la garantie des droits de tous, y compris ceux des poursuivis».

S’agissant du verdict, jugé extrêmement choquant et contre les attentes et espoirs, le Collectif a confirmé le recours en appel, après «des efforts pour en convaincre certains détenus».

En conclusion, le Collectif estime que «la solution procédurière et juridique choisie par l’Etat pour traiter le Hirak du Rif et punir les activistes» ressemble à d’autres procès politiques que l’histoire du Maroc a retenus.

Cependant, le Collectif émet l’espoir que ce dossier «trouve une issue rapide qui met fin aux endurances des détenus et leurs familles et qu’il mette un terme aux arrestations et poursuites ainsi qu’à la tension que connaît cette région».

Mohamed Amine

Top