«L’Etat c’est nous»

«L’Etat c’est moi», selon une citation attribuée, à tort ou à raison, à Louis XIV. Car plusieurs historiens en contestent l’authenticité et la paternité du jeune Roi ayant accédé au trône à un âge précoce.  Il aurait prononcé cette citation devant le parlement le 13 avril 1655. Vraie ou fausse, cette citation m’a inspiré pour parler aujourd’hui de l’Etat marocain, de ses ramifications, de ses composantes et de ses fonctions.  Cette réflexion s’impose plus que jamais dans le contexte actuel que traverse le pays dont les événements d’Al Hoceima qui perdurent depuis près de neuf mois ne constituent que la phase visible de l’iceberg.

A suivre de près le déroulement de ces événements, on a l’impression que personne ne veut assumer ses responsabilités par rapport à ce qui se passe sous nos  yeux. On se plait à se débarrasser au plus vite de la patate chaude et à  considérer que la faute incombe à l’autre tout en veillant à ne pas désigner cet autre avec précision et arguments à l’appui.  Le citoyen lambda se retrouve entièrement déboussolé, se perd en conjectures et ne sait plus à quel saint se vouer ! Il se voit victime de la rumeur, de la manipulation, voire de mensonges tout simplement.

Il y a une confusion manifeste des rôles par le fait que l’évolution qu’a connue le Maroc au cours des dernières décennies n’est pas assimilée comme il se doit.  Les réflexes du passé tendent à l’emporter sur la réalité présente.  Le Maroc d’aujourd’hui continue d’être vu, par d’aucuns, avec des lunettes ayant dépassé la date de péremption et analysé avec des catégories du passé. C’est en réaction à ces réflexes rétrogrades et passéistes qu’il faut aujourd’hui crier haut et fort que «l’Etat c’est Nous».

Sachant que nous sommes dans un Etat moderne, ou tout au moins en voie de le devenir, nous sommes tous concernés par ce qui se passe dans notre pays.  Nous sommes un Etat fondé sur des instituions clairement définies par la nouvelle constitution approuvée à la quasi-unanimité par le peuple marocain où tous les ingrédients d’un Etat moderne sont réunis : une séparation des pouvoirs, des instances de gouvernance, des droits et obligations des citoyens, du rôle de la société civile et des structures d’intermédiation… Il convient juste de mettre en musique cet arsenal constitutionnel et institutionnel  pour huiler la machine sociale visiblement grippée !

Ceux qui cherchent aujourd’hui à se dérober de leurs responsabilités pour incriminer l’autre ou à s’en remettre à une autre autorité, considérée déterminante en dernière instance,  doivent revenir à la raison.  Cette tâche nous incombe tous si on admet que l’Etat c’est nous. L’Etat doit agir à travers l’exercice de la violence légale pour paraphraser Max Weber (ce qu’il fait avec plus ou moins de réussite) mais aussi en activant les appareils politiques et idéologiques qui semblent malheureusement défaillants et hors service !! Comment donner vie à ces appareils pour les rendre opérationnels et efficaces ? C’est là le fonds du problème.

En faisant fonctionner dans une certaine harmonie ses «appareils répressifs» et ses «appareils politico-idéologiques», l’Etat parviendrait à résoudre les dysfonctionnements sociétaux et obtenir l’adhésion populaire aux choix stratégiques de la Nation. C’est la voie du salut et de la sagesse autour de laquelle tous les Marocains, animés de sens patriotique, doivent se rencontrer. Sans effacer leurs divergences. Car dans les moments difficiles, l’Unité Nationale passe avant toute considération. C’est le seul moyen pour barrer la route aux aventuriers de tout acabit qui cherchent à  pousser le Maroc vers le chaos.  Mais ils n’y parviendront jamais.

Abdeslam Seddiki

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