Midelt veut exporter sa pomme!

La région Draa-Tafilalet ambitionne désormais d’exporter sa pomme. Longtemps considérée comme le vivier de la production de pommes au Maroc, la région souhaite conquérir d’autres marchés, en améliorant la compétitivité de sa pomme. C’est dans cette optique que la région a organisé le 17 décembre dernier, le 1er forum de l’investissement dans le secteur pommier. Il s’agit de drainer davantage d’investisseurs pour industrialiser sa pomme et dynamiser le secteur.

Avec une vingtaine de variétés, 17450 hectares cultivés et 400 000 tonnes de pommes produites par an, la région Draa-Tafilalet se positionne comme le principal  producteur de pommes au Maroc, soit 60% de la production nationale. Grâce au Plan Maroc Vert (PMV), la région a vu sa capacité de stockage plus que décupler, passant de 4000 tonnes par an à 64000 tonnes par an et compte atteindre les 100 000 tonnes en 2021. La région jouit d’une culture à haute valeur ajoutée estimée à 50 000 dirhams l’hectare, avec un chiffre d’affaires atteignant les 1.17 milliards de dirhams. Sans oublier qu’elle génère de l’emploi pour plus de 60 000 personnes dans la région.

Toutefois, en dépit de son fort potentiel, le secteur de la pomme reste encore inexploité. Comme l’a souligné Jaouah Bahaji, directeur de l’Office national du Conseil agricole, la région compte 35 000 agriculteurs pour moins d’une centaine d’investisseurs.  C’est dans cette optique que le forum s’est donné pour objectif de «présenter les opportunités d’investissement dans la filière pommier, exposer les business modèles qui ont réussi au niveau local, national ou international» pour attirer davantage d’investisseurs.

Pour Mohamed Bousfoul, directeur régional agricole de la région Draa-Tafilalet, la région possède d’énormes atouts pour drainer des investissements dans la filière de la pomme. «L’Etat a déjà mobilisé un grand nombre de moyens pour aider les investisseurs dans le cadre des subventions du fond de développement agricole. Nous subventionnons le goutte à goutte, les unités frigorifiques à concurrence de 25%. Nous investissons également dans les tracteurs. Il y a de même des offres proposées par des banques avec des taux d’intérêt attractifs», explique-t-il.

Problèmes de commercialisation et de valorisation

En dépit de son énorme potentiel, le secteur de la pomme a encore du mal à décoller. Et les fellahs peinent à tirer profit de leurs efforts. La raison étant la présence d’un grand nombre d’intermédiaires. Ce qui réduit considérablement le revenu des agriculteurs. A cause de l’insuffisance d’unités frigorifiques de stockage, les pommes sont vendues à 50% de moins de leur prix normal, soit 3 dirhams au lieu de 7 dirhams. « Pour l’instant, ce sont les intermédiaires qui bénéficient, pas les agriculteurs en raison de la production abondante qui a pour conséquence la baisse des prix. L’objectif de ce genre de rencontres, de formations, c’est de sensibiliser les gens à ce genre de problèmes», a expliqué le directeur de l’ONCA. L’objectif est d’augmenter le nombre d’unités frigorifiques, pour accroitre la capacité de stockage qui est actuellement très faible, soit 22% de la production totale annuelle. Ce qui permettra de dépasser le défi du commerce sur pied et favoriser la commercialisation échelonnée.

Il est également question de former les agriculteurs pour s’organiser en coopératives entrepreneuriales pour pallier le défi de la valorisation de leurs produits et mieux en tirer profit. Sans oublier que l’industrie de la transformation de la pomme et ses dérives reste embryonnaire. La région ne compte pour l’heure que deux unités de valorisation (vinaigre et jus), avec des capacités de traitement n’atteignant pas les 100 tonnes.

Problèmes d’export

La pomme marocaine reste circonscrite au marché national. Malgré sa production abondante de 400 000 tonnes annuellement, celle-ci ne parvient toujours pas à conquérir les marchés étrangers. Pour Mohamed Bousfoul, l’un des grands freins à l’export de la pomme marocaine, c’est l’insuffisance d’unités de stockage. «Pour l’export, ce n’est pas encore possible, car nous n’avons pas assez d’unités pour stocker les pommes qui sont des denrées périssables», explique-t-il.  «Pour le stockage, nous nous sommes fixés des objectifs de 100 000 tonnes de stockage à atteindre au titre de l’année 2020-2021. Pour cela, nous devons avoir un investissement dans des unités frigorifiques d’une capacité de 36000 tonnes, puisque actuellement nous stockons 64000 tonnes», souligne-t-il. Ajoutant que le coût des unités frigorifiques varie de 12 millions à 15 millions de dirhams (pour 4000 tonnes).

En plus d’augmenter sa capacité de stockage, la région doit investir  dans des dispositifs de traitement, de transformation, de conditionnement, de mise en emballage… pour exporter ses pommes. Bien plus, il faut respecter les normes d’exportation, ce qui n’est pas possible actuellement, déclare Mohamed Bousfoul. Pour le directeur régional de l’agriculture, «le secteur de la pomme ne bénéficie pas encore d’investissements lui permettant de disposer d’un produit en mesure de concurrencer le produit étranger».

S’il est indéniable d’exporter la pomme marocaine, pour Bousfoul, il s’agit tout d’abord de satisfaire le marché local. Puisqu’aujourd’hui encore le Maroc importe encore les pommes. «Il y’a une forte concurrence. Nous importons des pommes bombardées de produits chimiques et n’ayant rien à voir avec la qualité de la pomme produite ici», confie-t-il.

Danielle Engolo

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