Namibie: Le «oui-mais» du second mandat présidentiel de Hage Geingob…

A l’issue du scrutin du 27 novembre en Namibie, ce petit pays désertique d’Afrique australe, d’une population de 2,534 millions d’habitants (2017), indépendant depuis 1990, c’est Hage Geingob, 78 ans, qui, après avoir été élu une première fois en 2014 avec 87% des voix, a été reconduit à la tête du pays en recueillant 56,3% des suffrages exprimés soit avec un score nettement en-deçà du précédent.

Ce dernier, qui est en même temps le chef de la Swapo (Organisation du peuple du Sud-Ouest africain) parti au pouvoir depuis l’indépendance du pays, devance largement son rival politique Panduleni Itula, candidat dissident de la Swapo, qui n’a recueilli, quant à lui, que 30% des suffrages selon les résultats publiés samedi soir par la Commission électorale. Le Mouvement démocratique populaire (PDM) du chef de l’opposition, McHenry Venaani, n’a, pour sa part, obtenu que 5,3% des voix car sa proximité passée avec l’Afrique du Sud de l’apartheid continue à rebuter de nombreux électeurs. Aussi, pour Hage Geingob, ces «élections ont été âprement disputées (et c’est) la démocratie (qui en) est le véritable vainqueur».

Mais les opposants au président sortant, qui ne l’entendent pas de cette oreille, considèrent que ce scrutin a été entaché de fraudes même si la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) a déclaré que ces élections se sont « généralement déroulées dans le calme (qu’elles) étaient bien organisées (et qu’elles ont permis) aux électeurs d’exercer leur devoir démocratique».

Aussi, Panduleni Itula a-t-il fait état d’une «multitude d’irrégularités sans précédent» considérant que le vote électronique – la Namibie a été le premier pays du continent noir à l’introduire sur son territoire – augmenterait la possibilité de fraude en l’absence des bulletins de vote.

En outre, bien qu’ayant été prévisible, la réélection de Hage Geingob – avec le plus mauvais score jamais réalisé par un candidat de la Swapo – confirme le climat de défiance qui l’entoure alors qu’il est visé par des soupçons de corruption et que le pays est touché de plein fouet par la récession en dépit des richesses naturelles dont regorge son sous-sol, uranium et diamant, et de ses fonds marins très riches en poissons et ce, du fait notamment de la chute des cours des matières et d’une sécheresse qui perdure depuis plusieurs saisons. Cette situation a fait reculer le PIB du pays durant deux années consécutives (2017 & 2018) si bien que le chômage a frappé 34% de sa population active.

Mais il n’y a pas que çà puisque des documents publiés dernièrement par Wikileaks laissent entendre que le régime du président Geingob aurait touché quelques 10 millions de dollars de pot-de-vin de la part d’une entreprise de pêche irlandaise si bien que même si le président a nié toute implication dans cette malheureuse affaire de corruption, deux de ses ministres ont été contraints à la démission à la veille du scrutin.

Enfin, si, dans la précédente législature, le parti du président détenait 80% des circonscriptions, il n’a pu obtenir ce samedi que 65% des sièges à l’Assemblée nationale échouant ainsi à disposer de la majorité des deux tiers.

N’ayant plus les coudées aussi franches que lors de son premier mandat présidentiel, Hage Geingob va donc devoir jouer la carte de la cohabitation. Avec qui et à quel prix ? Attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

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