Le numérique, Azemmour et le cinéma

Tikitat a soulima de Ayoub Layoussifi a été présenté à Agadir dans le cadre du séminaire international Enfance, jeunesse culture à l’ère numérique, organisé par le Centre Souss Massa pour le développent culturel. Mettant en scène des enfants dans leur rapport avec le cinéma dans le contexte d’un milieu populaire et d’une ville crépusculaire, le film offre ainsi la possibilité d’un large débat sur la question de la socilaisation de l’enfance. Ici un entretien avec le réalisateur.

Quel est ton parcours de formation et les influences cinéphiliques qui ont décidé de ton choix pour faire du cinéma?

J’ai eu un Bac Sciences Ex à Casablanca et après un an à la faculté de Ain Chok, en PC, je me suis envolé en France, en 2002 pour une première année MATHS SUP puis MATHS SPÉ, je décroche par la suite une Licence 3 en Informatique puis un Master I en informatique.

A la fin du Master I je monte à Paris pour commencer des études de cinéma, après un an et demi et de théâtre d’improvisation en tant qu’acteur et création d’association de cinéma et ateliers artistiques.

A Paris VIII (Saint Denis) je décroche un Master II Professionnel en Réalisation et Création et puis en 2012 je décroche un diplôme en Actor’s Studio en tant que comédien.

Comment est née l’idée de tikitat et pourquoi ce retour à Azemmour et à la salle de cinéma?

L’idée est venu d’un ami à moi, de Casablanca, en 2011, pendant le tournage d’un téléfilm au Maroc, et qui m’avait parlé d’une petite histoire d’un petit qui s’appelle Hassan et qui vivait avec sa mère et qui avait qu’une seule envie s’est d’aller voir un film de cinéma dans l’unique et seule salle de sa ville. C’était touchant.

L’idée de parler de l’enfance me plaisait, c’était un beau chapitre à raconter.

J’en ai parlé à un ami scénariste à mon retour a Paris et lui aussi était enchanté à l’idée de parler d’un sujet pareil, qui lie l’enfance au cinéma… nous sommes donc parti du constat de la fermeture de la dernière salle de cinéma à Kénitra (bien avant de choisir Azemmour) qui était un drame pour les cinéphiles de la ville.

Après 3 ans d’écriture puis nous sommes arrivés à ce constat.

Azemmour comme je le dis souvent, c’est un des personnages du film et qui s’est imposé à nous quand je l’ai visitée. Au début je voulais que le film se déroule dans un quartier populaire de casa (ma ville que j’aime) mais une fois rencontré (et j’insiste sur la rencontre avec la ville d’Azemmour qui te charme une fois tu mets le pied dedans) j’ai tout de suite vu Hassan, mon personnage principal courir dans les rues de cette ville. Ce que j’avais imaginé en écrivant les décors était là, et s’offrait à moi. Le côté populaire d’une ville entière était plus fort que celui dans un seul quartier dans une métropole.

Je n’ai donc pas hésité une seconde à convaincre mes producteurs pour tourner dans cette ville, Azemmour, et qu’ils ont trouvé incroyable lors de leur visite.

Elle m’a apporté un cachet supplémentaire et j’ai voulu bien le lui rendre en la filmant avec amour, en mettant en valeur toute sa beauté.

La salle de cinéma, je l’ai découverte comme par hasard dans un des quartiers de Azemmour (pas la première fois que je l’ai visité mais pendant la dernière semaine de la préparation ) et une fois rentré dedans, je me suis dis : c’est ça, c’est l’endroit…on y est…c’est le cinéma dont j’ai rêvé (qui à la base devait s’appeler ALKAWAKIBE en référence à un cinéma du boulevard ALFIDA à Casa où mon père allait pendant sa jeunesse) mais Marhaba était déjà là, à me tendre les bars. Je lui ai tendu les miens.

Tu appartiens à la génération qui vient au cinéma avec le triomphe total du numérique : peut-on dire que c’est plus facile aujourd’hui de faire du cinéma et comment tu as géré la réalisation de tikitat du point du vue de la technologie : par exemple les petites caméras favorisent-elles un rapport particulier avec les comédiens ou pour filmer certaines scènes comme celle de la boxe dans ton film.

Oui je viens de la génération du numérique (et un tout petit peu d’argentique même si on adore le grain sur l’image) mais c’est vrai qu’aujourd’hui je peux prendre une petite caméra et faire des repérages, filmer mes répétitions que je peux regarder dans l’heure même chez moi pour être rassuré par exemple… le numérique et cette révolution nous fait gagner du temps. Car le jour même, après une longue journée de tournage, tu peux regarder tes rushs et même commencer à assembler les petites pièces une à une.

La technologie te fait gagner du temps, donc épargner un peu d’argent pour les producteurs qui sont content   et c’est le côté pratique de la chose.

Et puis une petite caméra numérique te permet de tourner plusieurs fois une séquence donc si tu n’es pas satisfait ce n’est pas grave, tu refais jusqu’à satisfaction car seule la batterie qui s’use et non pas la pellicule. Donc pas de pression et ça te permet, en plus de filmer en 2K  (qui est mon cas), te permet de te fondre dans la masse. La scène de la boxe j’ai du choisir plusieurs angles de prise de vue afin de diversifier mon montage image par la suite et avoir assez de matière pour monter un combat de boxe crédible.

Donc j’ai un rendu 2K à la fin qui est exceptionnel (pour les sortie DCP et en plus j’en sors tant que je veux car c’est des clésUSB ou disque dur donc encore un point positif de la technologie) et puis je suis assez pratique dans mes mouvements et mes déplacement, je peux me fondre dans la masse, filmer des heures tant que j’ai de la batterie et des cartes (ce qui est pratique).

Et puis les comédiens ne sont pas très impressionnés par la taille de la caméra et des fois n’y pensent plus. En revanche ça ne change en rien la direction d’acteurs qui reste un rapport d’humain vers l’humain. Donc vrai et sincère. Je me donne à fond pour qu’ils se donnent encore plus. J’essaie d’être le plus clair possible dans mes intentions et leur donner la liberté de me faire des propositions.

Voilà, l’aventure TIKITAT-A-SOULIMA était (et l’est encore) une expérience incroyable, écriture, préparation, tournage, post-prod et distribution qui m’a fait grandir et pu parler de sujet comme l’enfance, la famille monoparentale  et les mères célibataire dans mon pays ce qui reste tabou, et la fermeture des salles de cinéma au Maroc faute de rentabilité. Ce qui doit changer.

Mohammed Bakrim

Un aperçu des prix et sélections du film jusqu’à présent

Prix :

Festival du film National de Tanger, mars 2017 (Maroc) : Prix du scénario

Festival Tasmit de Béni-Mellal, avril 2017 (Maroc) : GRAND PRIX.

Festival de Sidi-Kacem du court métrage marocain, avril 2017 (Maroc) : Le Prix du public, + une mention spéciale à l’enfant Ilyass El Jihani (1er rôle) pour son interprétation dans le film.

Festival de Saïdia, cinéma sans frontières, août 2017 : Prix du Jury.

Sélection :

Festival International du Court. Métrage de Clermont Ferrand, Section « Regards d’Afrique », février 2017.

Compétition Officielle à la 10ème édition de « LA CABINA International Film Festival » de Valence, en Espagne. Novembre 2017

Compétition Officielle à 68ème édition du Festival International de MONTECATINI en Italie. Oct 2017.

Compétition Officielle à la 28ème édition des Journées Cinématographiques de Carthage en Tunisie. Nov 2017

Compétition officielle au Festival du film court en Plein Air de Grenoble, juillet 2017.

Festival maghrébin d’Ajaccio, mai 2017.

Festival « Une semaine Eurafricaine au cinéma » à Paris, juin 2017.

Compétition Officielle au Festival du cinéma Arabe à Bruxelles, septembre 2017.

Compétition Officielle au Festival du Film Arabe de Fameck, octobre 2017.

Compétition officielle au Festival Ciné Regards Africains (Afrique sur Bièvre) novembre/Dec 2017.

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