Palmarès des Journées Cinématographiques  de Carthage

La comédienne marocaine Raouia distinguée

La Tunisie gagne chez elle : au terme d’une riche semaine de films et de suspense, les jurys des deux principales compétions, la compétition officielle et la compétition de la meilleure première œuvre ont choisi de récompenser des films tunisiens.

Un cadeau à l’occasion du cinquantenaire des JCC ? Une manière diplomatique de rendre un hommage posthume au fondateur des JCC, feu Tahar Chériaa ?  Certains observateurs pressés n’ont pas hésité à verser dans ce genre de supputations digne du café de commerce. Certes le palmarès des JCC 2016 n’échappe pas à la règle qui régit implicitement ce genre d’exercice : un palmarès consensuel qui plaît à tout le monde est un mauvais signe.  Il n’empêche que des films récompensés l’nt tout simplement mérité…parfois par défaut. Dans la sphère géographique couverte par la sélection des JCC le cinéma est en crise, c’est le principal constat de cette édition des JCC où plus de 300 films ont été montrés dans plus de 1000 projections.

Pour la première compétition des longs métrages Abderrahmane Sissako et ses amis ont récompensé la jeunesse et la fraîcheur. Le Tanit d’or décerné à Kaouthar Benhnia pour son film intimiste et tragique, Zayneb n’aime pas la neige, confirme une valeur montante du cinéma tunisien. Nous l’avons découverte à Tanger lors du festival du court métrage méditerranéen où elle a séduit avec son film Peau de colle. Cette fois, avec son long métrage, elle était en lice dans une sélection très moyenne où seul le film palestinien 3000 Layal de May Masri pouvait lui disputer la première place du podium. Le jury lui a d’ailleurs décerné le Tanit de bronze et le prix du meilleur scénario ;  il aurait mérité mieux.Le film ayant pâti certainement du fait qu’il a déjà derrière lui une riche carrière internationale. Le Tanit d’argent est allé au film Clash de l’Egyptien Ziad ; le prix le plus discutable à mon sens. Clash c’est trop de bruit pour rien : c’est du cinéma tape-à-l’œil ; ce n’est pas un hasard  s’il obtient aussi les prix de la meilleure image et du meilleur montage. Dans cette section le Maroc était représenté par deux films «français» oùil n’y a aucun centime marocain. Straveyour dog de Hicham Lasri, véritable OVNI cinématographique qui a certainement dérouté les caciques  du jury. Le jury aurait pu faire un geste à l’égard du sympathique comédien Benaissa El Jirari pour le prix de la meilleure interprétation masculine d’autant plus quil n’avait pas de vrais concurrents ; les plus grands rôles de cette édition privilégiaient beaucoup plus la gent féminine dans la plupart des films de cette édition. L’autre film «marocain» de cette édition est Divines de Houda Benyamina qui a justement et pertinemment remporté le prix d’interprétation féminine pour ces deux comédiennes qui par ailleurs ne vivent  ni en Afrique ni dans le monde arabe autre paradoxe d’un festival censé être arabo-africain.

Pour l’autre section importante, la compétition de la première œuvre créée cette année, c’est un autre film tunisien qui a été récompensé, The last of us de Alaeddine Salim, incontestablement le film le plus original et le plus audacieux de cette édition toutes sections confondues. Un conte philosophique sans dialogue, une méditation sur le départ, le voyage intérieur qui pourrait revendiquer comme filiation Délivrance de John Boorman (dans son rapport à la nature) et Yeleen de Suleiman Cissé (dans sa dimension cosmologique). Voire aussi une filiation littéraire du côté de Robinson Crusoé. Le film  du marocain Said Khellaf inscrit dans cette section est reparti avec le prix de la meilleure actrice pour Raouia, déjà récompensée pour ce rôle à Tanger lors du festival national du film.  Le réalisateur ne cachait pas sa déception, le film ayant eu un accueil enthousiaste de la part du public, friand du premier degré et des émotions fortes.

Signalons en outre que le Maroc était carrément absent de la compétition des films d’écoles et que les deux films  engagés en compétition du court métrage non seulement ne figurent pas au palmarès mais n’ont suscité aucun écho particulier. Il y a des années comme ça !

Compétition première Oeuvre « Prix Tahar Chériaa« 

Tanit d’Or:

«The last of us» de Alaeddine Slim de Tunisie

Tanit d’Argent:

«Maintenant ils peuvent venir » de Salem Brahimi d’Algérie

Prix spécial du jury:

«This littlefather obsession» de Salim Mourad de Liban

Meilleure interprétation féminine:

Fatima Harandi pour son rôle dans le film «Un mile dans mes chaussures» de Khallaf Said du Maroc

Meilleure interprétation masculine:

Majd Mastoura pour son rôle dans le film «nhebbek Hedi» du tunisien Mohamed Ben Attia

Compétition courts-métrages

Tanit d’Or:

«Marabout» de Alassane Sy du Sénégal

Tanit d’Argent:

«Silenc» de Chadi Aoun de Liban

Tanit de Bronze:

«Place for my self» de Marie Clémentine de Rwanda

Fatima Harrandi, une grande dame du cinéma

photoraouia009Révélée par le théâtre, Fatima Harandi fait ses premiers pas au cinéma dans les années 1990, grâce au réalisateur marocain Mohamed El Abbazi qui lui propose un rôle dans son film Les Trésors de l’Atlas. Son talent et son dynamisme sont rapidement sollicités par des metteurs en scène tels que Saâd Chraïbi, Jillali Ferhati, Nour-Eddine Lakhmari, ou encore Narjiss Nejjar. Fatima Harandi se distingue également à l’international, en collaborant à de nombreux films, notamment Andnow Ladies and Gentlemen de Claude Lelouch, Djinns d’Hugues et Sandra Martin, ou Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois.

Mohammed Bakrim

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