Petits-porteurs : les laissés pour compte du droit de protection

Les actionnaires minoritaires se sentent souvent pris en otages par la majorité. Surtout, les petits porteurs des sociétés cotées ne savent pas à quel saint se vouer en l’absence d’une association dédiée à la protection de leurs droits.

Traditionnellement, le pouvoir de décision est souvent concentré entre les mains de la majorité. Cependant, toute prise de décision doit être effectuée dans l’intérêt commun de la société et pas seulement dans l’intérêt individuel d’une majorité d’actionnaires. Au niveau boursier, les minoritaires restent le parent pauvre de la place casablancaise surtout quand on constate que la notion du flottant est relative dans un marché dominé par les institutionnels. Autrement dit, même si les petits porteurs détiennent 37% du capital, la règle stipule que toute participation inférieure à 5% est considérée comme flottante et apte à circuler facilement sur le marché.

Pas d’association dédiée à la protection des petits porteurs

De plus, les petits porteurs des sociétés cotées ne savent pas à quel saint se vouer en l’absence d’une association dédiée à leur cause. Au moment où l’on ne compte pas moins, de 20 organisations spécialisées en France, c’est le vide total qui caractérise la situation chez les porteurs au Maroc. A ce niveau, faut-il dire que les opérateurs du marché, la bourse de Casablanca et l’Autorité marocaine des marchés financiers (AMMC, Ex CDVM) sont-ils les responsables de la situation qui endurent les petits porteurs ? «Justement, nous nous interrogeons sur le rôle du gendarme de la Bourse pour la protection de la petite épargne, puisque toutes nos demandes d’explication sur nos droits dans des dossiers relatives à des sociétés cotées sont à ce jour restées vaines» nous déclare un petit porteur. Pour mémoire, le scandale boursier de la CGI, survenu l’année dernière a coûté cher aux actionnaires minoritaires. Son cours de retrait de 725 DH, a présenté une baisse de 73% par rapport au plus haut de 2007.Cette radiation avait provoqué une crise de confiance sur la place casablancaise surtout que les petits porteurs qui détenaient l’action CGI dans leurs portefeuilles ont perdu beaucoup d’argent dans l’absence d’une protection de droits.

Ainsi, en l’absence d’un cadre associatif légalement constitué, les minoritaires tentent de remplir ce vise en se tournant vers les forums de discussion sur le net. Le plus visité d’entre eux est « Forum Bourse de Casablanca ». Avec plus de 4000 membres, ce forum propose des conseils, analyses, recommandations et réclamations. Toutefois, ce forum, qui se veut une association virtuelle qui défend les droits du consommateur boursier, pourrait pénaliser la place casablancaise par manque d’expertise financière.

Une place étrangère peut constituer un mécanisme de substitution

Si le droit en vigueur dans un pays donné n’offre pas une réelle protection aux petits porteurs, la cotation sur une place étrangère peut constituer un mécanisme de substitution. À travers la cotation à la bourse d’un autre pays, comme celui de la France ou des États-Unis, où la surveillance est plus étroite et le cadre de conformité plus rigoureux, l’entreprise signale son souhait de respecter les règles de bonne gouvernance en général et les droits des actionnaires minoritaires en particulier. Sur ce sujet, peut-on dire que le cas de l’opérateur marocain des télécoms, Itissalat Al Maghrib montre les avantages de la cotation à l’étranger dans la protection des minoritaires. Ceci passe notamment par une publication trimestrielles des résultats financiers et une communication continue sur les différentes nouvelles de l’activité pour mettre le petit porteur au cœur du gouvernement d’entreprises.

Kaoutar Khennach

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