Plastiques : Nouvel élan aux discussions internationales

Transition vers une économie durable

Taoufik EL BOUCHTAOUI – MAP

1.000 milliards de dollars par an : c’est le montant colossal du commerce mondial des plastiques, soit 5 % du commerce global de marchandises, un chiffre qui soulève de sérieuses inquiétudes quant aux répercussions de la pollution provoquée par les 8,3 milliards de tonnes de plastiques produits depuis le début des années 50 dans le monde.

Pour faire face à « l’augmentation des coûts environnementaux, sanitaires et économiques de la pollution par les matières plastiques », un groupe de pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) avait lancé en novembre 2020 une nouvelle initiative visant à étudier comment « l’OMC pourrait contribuer aux efforts (…) visant à promouvoir la transition vers un commerce des matières plastiques plus durable sur le plan environnemental ».
Le groupe « s’efforcera d’identifier les possibilités de renforcement de la coopération commerciale dans le cadre des règles et mécanismes de l’OMC pour soutenir les efforts déployés dans d’autres enceintes », précise-t-on.
Depuis le lancement de ce Dialogue informel, désormais co-parrainé par 16 pays, dont le Maroc, « l’engagement des Membres dans les discussions sur les plastiques avait quadruplé, y compris lors des réunions du Comité du commerce et de l’environnement. Cela avait permis à de nombreux Membres de partager des études et des données d’expérience sur des sujets tels que les déchets marins, la pollution par les plastiques et les partenariats public-privé dans le cadre de la transition vers une économie circulaire », se félicite l’OMC.

« Les discussions sur le commerce des plastiques s’intensifient à l’OMC », a relevé la semaine dernière le directeur général adjoint de l’Organisation, Jean-Marie Paugam, lors d’un événement de haut niveau à Genève.
L’intérêt des Membres de l’OMC pour les efforts visant à faire face aux conséquences environnementales du commerce des plastiques « est allé grandissant ces dernières années, ce qui a permis une meilleure compréhension de la manière dont les politiques commerciales peuvent être orientées pour favoriser la transition vers une économie des plastiques durable », a-t-il dit, lors de cet événement de haut niveau sur l’action mondiale pour lutter contre la pollution par les matières plastiques.

« Le sujet n’est pas entièrement nouveau – nous en avons discuté dès 1995 au sein de la commission du commerce et de l’environnement – mais il s’intensifie vraiment ces dernières années », a déclaré M.Paugam.
La base de données environnementale de l’OMC, fait état de 130 mesures commerciales pour lutter contre la pollution plastique entre 2009 et 2019, dont les deux tiers ont été notifiées à l’OMC au cours des quatre dernières années.
En mars dernier, la CNUCED avait publié une première étude contenant « de nouvelles informations sur la part considérable que représentent les plastiques dans le commerce mondial ».

Il s’agissait de la première étude qui tente de cartographier et de quantifier les flux commerciaux mondiaux sur l’ensemble du cycle de vie des plastiques – des matières premières aux produits finaux puis aux déchets. Elle utilise un nouveau prototype de base de données sur le cycle de vie, en cours de développement par la CNUCED avec le Graduate Institute à Genève.

« Notre étude porte sur les flux commerciaux, massifs, généralement non pris en compte dans les efforts déployés pour évaluer l’ampleur du commerce des plastiques », a déclaré Diana Barrowclough, économiste à la CNUCED et co-auteur de cette étude.
« Cette approche nous a permis de mieux estimer l’échelle, l’amplitude et la complexité extraordinaires de ces flux commerciaux. Elle pourrait transformer radicalement notre manière de conduire nos futures analyses », a-t-elle poursuivi.

Et de souligner que « la grande valeur de ce secteur est une aubaine pour ceux qui y participent, mais elle va à l’encontre des efforts déployés dans le monde pour réduire les déchets plastiques ».
D’après la CNUCED, les formes primaires de plastiques représentent la part la plus importante des échanges en volume (56%), suivies par les formes intermédiaires (11%), les produits intermédiaires (5%), les produits manufacturés finaux (21%) et les déchets (2%).

Pour certaines matières plastiques, comme les textiles synthétiques et les pneus en caoutchouc, jusqu’à 60 % du volume de leur production globale s’échangent au niveau international.
En 2018, le commerce des matières plastiques de première fusion s’élevait à 348 milliards de dollars pour quelque 196 millions de tonnes métriques, soit près de 45 % de la production global de plastiques primaires. Pour les autres catégories, le commerce est moins important, une plus grande part étant produite et consommée au niveau national, précise la CNUCED.

Jeudi dernier, à Genève, une dizaine de pays et l’ensemble de l’Union européenne ont présenté jeudi les contours d’un accord international. Celui-ci devrait permettre de lutter contre la pollution plastique.
Le projet de résolution présenté par le Pérou et le Rwanda, soutenu par les 27 membres de l’Union européenne ainsi que sept autres pays, propose de mettre sur pied un Comité intergouvernemental de négociation avec pour mandat d’établir « un accord international juridiquement contraignant et basé sur une approche exhaustive pour prévenir et réduire la pollution de l’environnement » par le plastique.

Cet accord prendrait aussi en compte les microplastiques (une source de pollution dont l’ampleur commence seulement à être mesurée) et ferait la promotion d’une économie circulaire englobant l’ensemble du cycle de ces produits: de leur fabrication à leur utilisation en passant par la prévention de production de déchets, leur gestion et leur traitement, précise le projet de résolution.

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