La problématique de l’efficacité de l’investissement

La question de l’efficacité de l’investissement n’arrête pas de tarauder responsables politiques et économistes de tous bords. Elle se pose en ces termes : comment se fait-il qu’avec un taux d’investissement par PIB des plus élevés au monde, le Maroc n’arrive pas à réaliser un taux de croissance élevé qui lui permettrait de résoudre, à terme, la question endémique du chômage?

Sans prétendre apporter une réponse définitive à cette question énigmatique, Nous essayerons dans cet article de poser des hypothèses, jeter des pistes de réflexion, de nature à apporter des éclairages pour une réflexion plus approfondie autour de la question. Trois pistes nous viennent présentement à l’esprit :

Tout d’abord, il y a la question de la nature de l’investissement. Force est de constater que les investissements publics, qui constituent la part de lion de l’investissement global, sont pour l’essentiel des investissements d’infrastructure. Ces derniers sont, par définition, hautement capitalistiques et par conséquent peu créateurs d’emplois. Leur importance réside, principalement, dans leurs effets d’induction/entraînement. Lesquels effets n’apparaissent qu’à moyen et long terme si un certain nombre de conditions sont réunies. Et c’est à juste titre que les économistes considèrent de tels investissements comme indirectement productifs.

En deuxième lieu se pose la question de la «rationalisation des dépenses», tant dans le secteur public que dans le secteur privé. On assiste, ici et là, à des gaspillages de ressources sous forme de faux frais, de «fuites invisibles», auxquels viennent s’ajouter les délais de réalisation qui sont rarement respectés.  Ce qui conduit au renchérissement des coûts de ces investissements et par conséquent à la faiblesse de leur efficacité et de leur rendement.  Les exemples à cet égard sont légion. L’exemple illustratif en est la réalisation de la voie double reliant Taza et Al Hoceima, et dont le coût estimatif a grimpé de 2,5 milliards de DH lors de son lancement à 4 milliards de DH à l’heure actuelle.

Enfin, l’Etat a beau à faire des efforts, encore faut-il que le secteur privé suive. On relève à cet égard que malgré l’existence d’un climat favorable aux affaires et les multiples avantages concédés au capital privé, ce dernier ne répond pas comme il se doit à l’appel. Il reste encore frileux, prisonnier d’un comportement spéculatif, attiré par l’appât du gain facile. Ce qui ne saurait cependant signifier que l’esprit d’entreprise est absent ou marginal. Au contraire, de nouveaux entrepreneurs, jeunes et diplômés de grandes écoles, émergent de plus en plus sur la scène entrepreneuriale et peuvent accompagner la dynamique que connait le pays, et ce pour assurer sa transition vers un «capitalisme de marché» à la Schumpeter, ouvert à la concurrence avec des règles de jeu transparentes !

C’est à cette condition que le Maroc pourrait assurer son émergence et trouver des solutions aux grandes problématiques sociales dont celle du chômage n’est pas des moindres. Car l’Etat, c’est une évidence, ne peut pas et ne doit pas tout faire. Tous les acteurs sont appelés à «mieux» faire. L’efficacité de l’investissement est à ce prix.

Abdeslam Seddiki

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