« Qatargate »

Attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

Une guerre ouverte entre l’Emirat et le Parlement européen

Soucieux du bon déroulement de cette dernière Coupe du monde de foot-ball qu’il a eu l’honneur d’organiser, contre vents et marées, le Qatar a attendu la clôture de cette importante manifestation sportive pour répondre aux accusations de corruption dont il avait fait l’objet, de la part du Parlement européen, quelques jours à peine avant la cérémonie d’ouverture, et aux mesures que ce dernier compte prendre à son encontre dont notamment l’interdiction d’accéder à l’Assemblée.

Aussi, en rejetant « fermement » lesdites accusations, en regrettant, par ailleurs, « les jugements fondés sur les informations inexactes révélées par des fuites » et en contestant, enfin, dans un communiqué,  le fait que jeudi dernier, les eurodéputés aient voté, à la quasi-unanimité,  un texte par lequel ils demandent « instamment la suspension des titres d’accès des représentants d’intérêts qatariens » le temps de l’enquête, Doha a tenu à préciser, dans sa réponse à l’instance supra-nationale européenne, que « la décision d’imposer au Qatar une restriction aussi discriminatoire, limitant le dialogue et la coopération avant la fin de la procédure judiciaire, aura un effet négatif sur la coopération régionale et mondiale en matière de sécurité ainsi que sur les discussions en cours sur la rareté et la sécurité énergétiques mondiales ».

Mais en nécessitant, en outre, pour sa mise en œuvre, l’approbation de Roberta Metsola, la présidente du Parlement européen, la proposition faite par les euro-députés – si elle venait à être validée – aura, incontestablement, un « impact négatif » sur les relations entre le vieux continent et l’émirat mais aussi, et c’est là où le bât blesse, sur l’approvisionnement mondial en gaz, comme a tenu à le rappeler, ce dimanche, un diplomate qatari.

Aussi, en soulignant ses liens « solides » avec plusieurs pays de l’UE, et en exprimant sa « gratitude à ceux qui ont démontré leur engagement envers ces relations face à la vague d’attaques actuelles », le Qatar a fermement dénoncé le manque de coopération du gouvernement belge dont il est un partenaire « proche » et un des plus importants « fournisseurs » mondiaux de gaz naturel liquéfié (GNL).

Au vu de tout ce qui précède, il est donc clair que, pour les partisans de la rupture des liens avec le Qatar, le moment est vraiment mal choisi car, depuis le déclenchement de la guerre d’Ukraine, les pays européens peinent à trouver des alternatives au gaz russe pour pouvoir combler un déficit de près de 150 milliards de mètre cubes de GNL et que c’est à ce titre qu’à la fin de Novembre dernier, l’Allemagne avait signé, avec Qatar, deux accords pour renforcer ses approvisionnements de GNL en provenance de l’émirat pour une durée minimale de quinze années.

C’est dire qu’en tentant de réagir face à cette suspicion de corruption qui touche ses députés, le Parlement européen s’expose aux menaces de Doha à un moment où avec l’accroissement de ses capacités de production de gaz naturel liquéfié, le Qatar finira bien par avoir le dernier mot et par imposer ses vues face à Bruxelles et aux Vingt-Sept suite à l’arrêt des importations de gaz russe en Europe.

Que dire pour terminer sinon que ce « Qatargate » pourrait fort bien laisser des traces et influer sur le cours de l’Histoire mais attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

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