Rien ne va plus entre Paris et Téhéran?

Désireux de sauvegarder l’accord international sur le nucléaire iranien bien mis à mal par une administration américaine qui le voit comme étant un «très mauvais accord», le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, s’est rendu ce lundi à Téhéran, devenant ainsi le premier haut responsable représentant un des trois pays de l’Union Européenne signataires de l’accord sur le nucléaire iranien; à savoir, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et la France, à se rendre à Téhéran depuis l’ultimatum qui leur avait été adressé en Janvier dernier par Donald Trump.

Avant de s’envoler pour Téhéran, le diplomate français a déclaré au «Journal du Dimanche» que l’Iran a des «programmes balistiques de plusieurs milliers de kilomètres de portée qui ne sont pas conformes aux résolutions du Conseil de Sécurité» et qui, de ce fait, l’exposent à «des sanctions». Or ces menaces exaspèrent l’Iran qui a toujours déclaré ne pas avoir l’intention de se doter d’une bombe atomique et  vouloir limiter la portée de ses missiles à 2000 kilomètres et ce, alors même que Paris dispose, de son côté, de missiles balistiques stratégiques d’une portée supérieure à 6000 kilomètres.

Le responsable iranien ne s’est pas empêché, par ailleurs, de dénoncer «l’extrémisme» de certains pays de l’Union Européenne qui pourraient, à l’expiration de l’ultimatum que le président Trump a bien voulu leur donner et qui court jusqu’au 12 mai prochain,  suivre ce dernier dans  la dénonciation d’un texte qui, à ses yeux, est «l’un des pires accords jamais conclus par les Etats-Unis» et vouloir, à ce titre, apporter des rectifications aux «terribles lacunes» qu’il comporterait selon les termes du locataire de la Maison Blanche.

Aussi, le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, s’est-il dit prêt à « dialoguer » mais pas à « négocier » un quelconque accord à moins, toutefois, que l’Occident ne détruise tout son arsenal nucléaire alors que le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères a déclaré, de son coté, que les inquiétudes que la France éprouve quant à «la politique régionale de l’Iran sont une illusion».

Ainsi, à l’issue d’une journée de discussion à  couteaux tirés avec les responsables iraniens durant laquelle les deux parties se sont exprimé «très librement» et «avec fermeté», le diplomate français qui a rencontré, outre son homologue iranien, le président de la République Hassan Rohani ainsi que le Secrétaire du Conseil Suprême de la Sécurité Nationale, l’amiral Ali Shamkhani, a déclaré avoir fait part à ces derniers des inquiétudes de la France concernant le programme balistique iranien et les visées que la République iranienne aurait au Proche et au Moyen-Orient mais il a reconnu, toutefois, qu’il y a «encore beaucoup de travail à faire» sur ces deux questions.

Le Chef de la diplomatie iranienne considère, pour sa part, que l’Union Européenne peut encore «jouer un rôle plus constructif» dans le cadre de la préservation de l’accord sur le nucléaire iranien en obligeant les Etats-Unis à respecter leurs engagements  alors que l’amiral Shamkhani estime, de son côté, que «le renforcement de la capacité défensive de l’Iran» rentre dans le cadre de la nécessaire politique de dissuasion de l’Iran.

Enfin, si à l’issue de ces entretiens, les deux parties ont affiché leur volonté commune de sauvegarder, tant bien que mal, un accord tant décrié par la Maison Blanche, leurs vues sont restées néanmoins très éloignées sur la question syrienne dès lors que la France mise sur «la capacité» de l’Iran à «intervenir de manière vigoureuse» auprès de son allié de Damas pour apaiser la situation alors que la République islamique estime que, pour sortir de la crise, il faudrait, au contraire, «renforcer» le pouvoir de Bachar Al-Assad.

Nabil El Bousaadi

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