Quel rôle pour l’université dans la production des politiques publiques?

L’Université est invitée à s’impliquer davantage dans la lutte contre les inégalités. Tel est le message fort de la 3 e édition des Assises  des sciences humaines et sociales au Maroc qui s’est tenue les 12 et 13 février à la Faculté des Lettres d’Ain Chock à Casablanca.

Pour  Phinith Chanthalangsy, spécialiste du programme pour les Sciences sociales et humaines, UNESCO-Maghreb, «l’objectif de l’organisation d’un tel événement consiste à repositionner le débat public sur le rôle de l’université dans le processus de développement et aussi valoriser la contribution des sciences sociales dans le but de dégager des pistes de réflexion voire des solutions permettant aux acteurs politiques d’élaborer des politiques publiques efficaces et efficientes».

Pour les organisateurs,  le choix du thème de l’inégalité, qui demeure d’ailleurs un concept polysémique,  s’inscrit dans le cadre de la campagne initiée par les Nations-Unies en vue de commémorer le 70 e anniversaire de la déclaration universelle des droits humains et qui va durer toute l’année en cours.

Il faut dire aussi que la problématique des inégalités s’est transformée en un champ d’étude de prédilection pour un grand nombre de chercheurs dans le monde entier. Chacun à travers son propre prisme essaie d’identifier les facteurs déterminants des inégalités. «C’est un thème qui suscite des paradoxes et pose plusieurs défis nécessitant une approche plurielle», comme l’a souligné Abdellatif Ighzou, vice-président de l’Université Hassan II à Casablanca, tout en invitant les élites et la société civile à s’associer à ce débat afin d’établir de nouvelles orientations de recherches.

D’ailleurs,  les inégalités ne sont pas souvent d’ordre économique et leurs variables déterminantes sont multiples : âge, habitat, sexe, entre autres.

Le responsable universitaire a mis en avant  l’exemple des facultés de la métropole où le taux de féminisation dans la majorité des filières, notamment de médecine ou celle de  l’ingénierie est trop élevé,  toutefois, ce sont les femmes qui  ont un faible accès au marché de l’emploi, a-t-il expliqué.

Renforcer le capital institutionnel

De son côté, Nicolas Gravier, Directeur d’Oxfam-Maroc, a dressé un tableau sombre de la situation des inégalités dans notre pays. Ayant recours à l’indice Gini, l’intervenant a affirmé que le Maroc possède le niveau d’inégalités le plus élevé en comparaison avec ses voisins du Maghreb et ce, en dépit du fait que ce taux d’inégalité ait été réduit durant la décennie précédente. Encore plus, le coefficient Geni nous montre  que 10% des plus nantis ont un niveau de vie en moyenne 12 fois élevé à celui des 10% les plus miséreux. A l’en croire, cet écart n’a pas changé depuis les années 1990.  Il n’en demeure pas moins que la situation du citoyen marocain a connu une évolution positive entre 2001 et 2014 étant donné que le taux de pauvreté a connu une baisse significative, passant de 15,3% à 4,8%. Cependant, il est fort à constater que l’augmentation des richesses profite seulement à une minorité. A l’en croire, la fortune de trois milliardaires du Royaume  est estimée à 44 milliards de DH.

Par ailleurs,  Abdelhak Allalat, secrétaire général du Haut-commissariat au plan (HCP), a abordé dans son intervention la réalité des inégalités au Maroc. Il a dressé une véritable feuille de routes pour les décideurs politiques afin de lutter contre ce phénomène. Cela étant, la réduction des inégalités passe par l’investissement dans ce qu’il a désigné par capital scolaire. A cela s’ajoute, en outre, l’accélération du processus de développement territorial afin d’assurer une certaine synergie entre toutes les régions du Royaume et mettre, par conséquent,  un terme à l’inégalité territoriale, sans omettre également  le renforcement du capital institutionnel et l’orientation des investissements vers les secteurs productifs et opérationnels qui ont une forte valeur ajoutée, a-t-il conclu.

Khalid Darfaf

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