Services d’accueil des urgences: Une mise à niveau s’impose

Les services d’urgences posent problème. Il ne se passe pas une semaine sans que cette problématique ne soit placée sous les feux de l’actualité. Les médias audio-visuels et la presse écrite font état au quotidien de situations déplorables.

Le constat est pratiquement le même un peu partout : Casablanca, Rabat, Fès, Tétouan… Nos services d’urgences peinent à trouver une vitesse de croisière susceptible de répondre aux attentes des uns et des autres. Si on tente un tant soi peu de fermer les yeux sur ce qui se passe à Safi, Berrechid, El Jadida entre autres sans nous aventurer ailleurs, il n’est plus acceptable de regarder en spectateur passif la situation qui prévaut dans un centre hospitalo-universitaire ( CHU)  à Rabat ou Casablanca… Des établissements hospitaliers qui se distinguent  par  leurs prouesses chirurgicales (greffe des mains, opérations à cœur ouvert…), mais qui souvent, la nuit venue pratiquent une médecine au rabais, des prises en charges médicales ou chirurgicales qui soulèvent de nombreuses questions. Faut- il en déduire que les urgences sont  malades ?

Si tel est le cas, il est urgent de procéder à un diagnostic de la situation, de chercher où se situe le mal et de prendre toutes les mesures nécessaires afin de remédier à cette situation. Il faut dire que les urgences sont souvent des structures inadaptées, une logistique non appropriée, une pénurie chronique de personnel, une charge de travail rebutante, des files d’attentes  qui n’en finissent pas et parfois du personnel non qualifié.

On comprend mieux pourquoi les services des urgences font la une de nos médias. Il est donc tout à fait naturel de soulever une fois de plus la problématique des urgences, eu égard au rôle central que doit jouer ce service dans notre système de santé.

Un phénomène extrêmement complexe

Lorsqu’on s’adresse aux services des urgences, c’est pour être pris en charge immédiatement. C’est en tout cas la doctrine. Dans les faits, il en est autrement, car la dimension particulière qu’a prise l’urgence aujourd’hui en fait un phénomène extrêmement complexe auquel il n’est pas toujours facile d’apporter la réponse satisfaisante.

Le mot lui-même est devenu ambigu. C’est un fourre-tout : personnes âgées déshydratées, enfants présentant une fièvre, angine, douleurs abdominales, plaies, brûlures, sans domicile fixe, anxieux, ivrognes, fractures, femmes enceintes…

La liste des motifs pour lesquels on s’adresse aux services des urgences est très longue, services qui sont fournis n’importe quand (le jour, la nuit, le dimanche, les jours fériés…). Il n’est pas excessif de définir ainsi l’urgence. Mais à côté de tous ces motifs qui justifient ou pas une consultation au niveau des services d’urgences, il y a les vraies urgences qui doivent en principe bénéficier d’une prise en charge adéquate.

Répondre aux vraies urgences

C’est notamment le cas des catastrophes naturelles  auxquelles notre pays est souvent confronté (pluies diluviennes  – inondations – froid  – neige – effondrement de  maisons…) ou encore les accidents de la route avec leurs lots quotidiens de morts et de blessés graves, Infarctus, AVC, Angor, HTA, Asthme … Autant de causes et de situations qui sont à la base d’une demande urgente en soins dont doit se charger le service d’accueil des urgences de l’hôpital le plus proche, lieu de convergence par excellence de tous les cas urgents

Dans la logique des choses, et si ces services d’urgences  sont équipés, dotés en moyens humains suffisants et en matériels de réanimation adéquats, ces services d’accueil des urgences devraient en principe pouvoir offrir les meilleures prestations et soins et surtout répondre à une situation urgente. Ce rôle, ces missions et la réalisation de tous ces objectifs sont par essence la raison d’être de tout service d’accueil des urgences qui se respecte et qui a à cœur la santé des citoyens.

Malheureusement, dans la réalité, il en est autrement. La majorité des centres hospitaliers n’a pas de services d’urgences dignes de ce nom. Ces services ne sont pas véritablement équipés pour fournir des soins immédiats aux patients dont l’état nécessite une prise en charge rapide et surtout vitale. Il n’y a pas souvent de salle de déchoquage et encore moins de salles d’accueil des urgences vitales (SAUV), médicales et chirurgicales.

Pour une mise à niveau des différents services d’urgences

Le matériel de réanimation (respirateurs, défibrillateurs…) fait cruellement défaut. Il en est de même pour les appareils de monitorage pour la surveillance des patients graves (scope, oxymétrie…), sans parler du défaut de moyens de diagnostic comme l’ECG et l’échographie…

Ce qui serait souhaitable, c’est de pouvoir procéder à une mise à niveau des différents services d’urgences existant au niveau des différentes villes dans un premier temps.
Il ne s’agit nullement de tout entreprendre en même temps, mais d’initier une démarche cohérente et pragmatique, réaliste et surtout réalisable là où le besoin se fait le plus ressentir. En d’autres termes, il s’agit de cibler les régions les plus exposées, de recenser les points noirs au niveau de chaque ville et préfecture. Par la suite, il conviendra de procéder à une étude détaillée des différents moyens, potentialités, ressources et voies de communication disponibles…

La situation peut s’améliorer avec plus de moyens, mais a-t-on idée de ce qui existe ailleurs ? Et quand nous disons ailleurs, c’est juste à côté, par exemple à l’Hôpital de Mohammedia ou de Hay Mohammadi, de Sidi Bernoussi sans parler des autres villes où les services dits d’urgence se résument en de simples salles de soins. Il suffit de se rendre à Berrechid, à l’Hôpital de Sefrou, de Sidi Kacem, de Sidi Slimane, de Tétouan, de Boulmane, de Tiznit ou de Khénifra… Et que dire alors des régions où il y a un désert médical et où une simple piqûre de scorpion peut tuer un homme. Il faut reconnaître que des disparités considérables existent et que ces disparités régionales sont aggravées par une iniquité dans la répartition des ressources humaines, de la technologie…

Ce constat souligne la nécessité d’une réorganisation profonde des urgences. On ne peut plus se borner aujourd’hui, en parlant d’urgence, à faire référence à tel ou tel hôpital. On devrait en principe pouvoir être pris en charge de la même manière où que l’on soit. Tous les Marocains devraient avoir les mêmes chances d’être bien traités indépendamment de leur lieu de résidence ou de leurs moyens financiers…

Nous ne pouvons que nous réjouir et reconnaitre à sa juste valeur tous les efforts qui ont été consentis depuis quelques années par le département de la santé, ce qui a permis de réaliser de grands chantiers, d’asseoir sur des bases saines des projets énormes qui sont venus combler des déficits. Aujourd’hui, nous disposons des hélicoptères (3), des ambulances équipées et médicalisées, de nouvelles structures, un meilleur accès aux médicaments…..

Soulever la problématique des urgences ne signifie pas de facto faire l’inventaire des anomalies qui pénalisent son image. Aujourd’hui, de nombreux services d’urgences de plusieurs hôpitaux s’inscrivent dans une approche qualité. Les soins y sont devenus plus rapides et moins douloureux ; l’humanisation a gagné du terrain, les services logistiques (entretien, hôtellerie…) ont acquis plus d’efficacité. Un constat notable dans certains hôpitaux à Casablanca, Marrakech, Fès,  mais qu’en est-il des services d’urgences des autres établissements sanitaires des autres régions du Maroc? C’est là où le bât blesse.

Ouardirhi Abdelaziz

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