Situation catastrophique dans les périmètres irrigués et normale dans les zones Bour

Retard inquiétant des pluies

La sécheresse s’empare de nos champs et la situation devient alarmante. Le constat est visible et clairement confirmé par la communauté des agriculteurs. L’absence des pluies durant le mois de novembre et le début du mois de décembre devient inquiétante et le risque d’avoir des cycles courts de germination se confirme davantage. Néanmoins, l’effet varie selon qu’il s’agisse de zones dites Bour où la quasi-totalité de la campagne céréalière est condamnée ou de périmètre irrigué qui continue de fonctionner normalement.

Le moral des agriculteurs est au plus bas. Pour cause, le retard des précipitations devient agaçant et l’absence de toutes informations ou de chiffres officiels sur l’état des lieux de la surface agricole utile aggrave encore ce sentiment de désespoir qui les taraude. D’aucuns estiment aujourd’hui que seule une bonne pluviométrie et en quantité suffisante peut aujourd’hui sauver la campagne agricole 2015/2016. Y’aura-t-il de la pluie ce week-end ? Ce n’est pas vraiment sûr. Les prévisions météorologiques jusqu’au 20 décembre courant n’annoncent pas l’arrivée de pluies si ce ne sont que quelques gouttes prévues ce dimanche.

La situation est critique, déclare à Al Bayane, Abbès Tanji, ingénieur agronome qui, en homme de terrain qualifié, estime que la saison agricole est menacée et risque même d’être catastrophique. Notre analyste précise toutefois que la situation fait état d’un double constat. Le premier concerne les cultures irriguées (au total, il y a 9 périmètres irrigués) qui ne sont pas touchées par la sécheresse et qui ne souffrent d’aucune restriction par rapport à l’utilisation de l’eau. Il s’agit notamment des cultures maraichères, fourragères, de la betterave et des oléagineuses. Les zones irriguées qui s’étalent sur une surface de 300 000 hectares de blé et d’orge (sur un total de 5 millions d’hectares) continuent de fonctionner normalement pour le moment même si le niveau de remplissage des barrages se trouve actuellement à 60%, souligne Tanji.

Le second constat relatif aux zones Bour est qualifié de sérieusement inquiétant. Notre interlocuteur rappelle que ce périmètre dit pluvial occupe une surface de 7 millions d’hectares dont la totalité est touchée par la sécheresse du nord au sud du Maroc. En détail, on constate que depuis le lancement de la campagne agricole, plus de 50% de ce périmètre a été semé et planté et le reste n’est toujours pas semé.

Les exploitations déjà semées sont sérieusement sinistrées. La germination est absente et la levée est retardée à cause du manque d’humidité. Du coup, les plantes ont commencé à jaunir voire à périr. D’ailleurs, insiste Tanji, même levé, un million d’hectares est déjà perdu. Et d’ajouter que certains agriculteurs ont commencé à pâturer pour l’utiliser pour le cheptel.

Pour résumer, Abbès Tanji estime que la campagne agricole est condamnée même s’il y aura de la pluie. Les cycles seront raccourcis, les rendements affectés. La sécheresse qui devient structurelle est déjà installée et frappe le Maroc encore une fois.

Certes, tout le monde attend aujourd’hui la clémence du ciel mais devrons-nous rester les bras croisés ? Assurément non, affirme ce chercheur agronome qui propose la mise en place d’un fonds permanent pour couvrir les aléas climatiques. Il faut sauver l’agriculteur, le cheptel et la saison agricole, conclut Tanji. Il signale que le fellah a déjà dépensé 1000 à 2000 dirhams par hectare. Un budget totalement perdu sous l’effet de la sécheresse. Ce n’est pas tout. Le cheptel risque aujourd’hui la famine et les maladies combinées au risque de la hausse des prix des aliments et de la chute des prix des animaux. L’Etat est vivement sollicité pour intervenir et sauver ce qui peut être sauvé, notamment les cultures printanières. L’idée est de réfléchir sur les moyens de distribuer gratuitement les semences et les engrais pour les cultures du printemps qui démarrent début février. Généraliser la couverture de l’assurance agricole et rééchelonner les dettes ne sont pas en reste.

Fairouz El Mouden

Top