Stroc: «La crise renforce la communication»

Comme toute entité vivante, une entreprise peut être soumise à une crise aigüe et inattendue. Les entreprises doivent parfois faire face à des problèmes de réputation et d’image à cause d’événements incontrôlables.Il est donc nécessaire que face à ce genre de problèmes soit mise en place une stratégie de communication spécifique afin de pouvoir gérer la crise.

Aujourd’hui, les médias et l’opinion publique ont une importance capitale pour la renommée d’une entreprise et pour assurer sa pérennité, il est donc indispensable qu’en période de crise, des solutions soient trouvées afin de revaloriser son image à l’entreprise aux yeux des médias, de l’opinion publique et, de manière plus large, auprès de l’ensemble des parties prenantes.La communication de crise regroupe à la fois, la communication interne, la communication institutionnelle, les relations presse et les relations publiques. La communication de crise se base sur de multiples aspects et doit être considérée dans sa globalité.

Afin d’expliciter davantage ce concept et outil indispensable à toute structure, l’entreprise Stroc, qui vit actuellement une crise financière, nous décrypte la stratégie de communication qu’elle a adoptée pour s’en sortir.

Un discours transparent

Depuis 2010, Stroc vit une crise financière avec des pertes et des difficultés de relance de la production.  En effet, l’industriel pâtit d’un manque chronique de liquidités à cause d’une lourde dette fournisseurs. Dans ses sorties médiatiques, Nabil Ziatt, PDG du Groupe, n’hésite pas à offrir aux médias une communication qui n’est pas filtré et qui laisse entrevoir toute information pertinente, même si elle s’avère sans avantageuse pour l’entreprise.Entouré d’une dizaine de journalistes représentant la presse nationale, Nabil Ziatt a déclaré, le 3 octobre à Casablanca, «Nous souffrons toujours du poids lourd de notre dette», avant de rassurer : «Toutefois, nous avons contracté ce premier semestre un prêt de 100 millions de DH chez la BCP. Une partie de ce crédit permettra de régler les arriérés de la dette fournisseurs». Ainsi, à fin juin 2017, la dette fournisseurs de l’industriel s’élève à 310 millions de DH contre 364 millions DH à fin décembre 2016. Pour sa part, la dette bancaire a diminué de 50% à 85 MDH contre 170 MDH par rapport à la même période de l’année 2016.

Cellule de crise

Aujourd’hui, le spécialiste de la maintenance d’unités industrielles concentre ses efforts sur la restructuration de la dette. «Nous avons une dette qui nous empêche d’avancer, nous avons donc décidé de freiner la croissance pour nous concentrer sur la restructuration, ce qui nous permettra de démarrer 2018 sur de bonnes bases», a fait savoir le PDG. Ainsi, l’industriel a fait également appel à un cabinet de conseil spécialiste en restructuration. Cette «cellule de crise» va permettre au dirigeant de l’entreprise d’être suffisamment armé pour entamer des négociations avec des banquiers ou des capital-investisseurs.

Ceci dit, l’activité de la société continue à décrocher des marchés. D’ailleurs, l’OCP a confié une commande de 240 millions de DH à Stroc au premier semestre. «L’OCP nous soutient énormément. Il nous paye même à l’avance», annonce Nabil Ziatt. En outre, le management fait savoir que sur les quatre chantiers démarrés en 2013, deux sont déjà achevés. Les deux autres seront incessamment bouclés.

Pour rappel, Stroc affiche à fin juin 2017, un chiffre d’affaires de 78 millions de DH contre 297 millions de DH à fin décembre 2016. Le résultat opérationnel est déficitaire de 31,49 millions de DH au premier semestre, et le résultat courant est négatif de 36,71 millions de DH contre -70,26 millions de DH à fin décembre 2016.

La crise renforce la communication

Pour Ronan Le Guellec, directeur financier de Stroc, la communication financière doit être la plus claire possible dans ce contexte de crise. «Depuis notre introduction en Bourse, nous avons appris à communiquer régulièrement. Et, la crise a renforcé notre communication financière» nous a déclaré Le Guellec avant de préciser : «Nous avons également appris qu’une communication interne efficace est indispensable pour faire face à l’ensemble des problématiques et des obstacles que l’entreprise pourrait rencontrer».

Pour rappel, Stroc a plutôt déçu ses investisseurs en raison d’un long conflit social. Celui-ci a pénalisé la productivité de la société en 2011 en raison de son recours forcé à la sous-traitance pour honorer ses contrats. Aussi, les retombées négatives en termes d’image ont retardé la reprise commerciale, d’où la forte baisse de l’activité. Ces conflits sociaux devraient certainement inciter les investisseurs financiers à davantage de veille et de maitrise de la communication interne sur le climat social des entreprises cotées pour anticiper la baisse potentielle de leurs réalisations en cas de signaux avant-coureurs de tension sociale.

Kaoutar Khennach

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Les 10 conseils à suivre

  1. Créer une cellule de crise: C’est la priorité. Il s’agit de réunir les protagonistes clés amenés à intervenir et de nommer un coordinateur qui centralise et dispose d’une vision d’ensemble des problématiques. Le rôle de cette cellule est de collecter de l’information pour produire un tableau de bord, définir les grands axes de traitements de la crise et centraliser les ressources. Son rôle sera aussi important pour, ensuite, débriefer sur la crise, son déroulement, sa gestion et en tirer toutes les leçons.
  2. Ne pas confondre vitesse et précipitation: Avant d’agir, il faut réunir des informations fiables et complètes, puis proposer des solutions concrètes en fonction de scénarios décidés en cellule de crise. Une fois la cellule de crise mise en place, les décisions doivent se prendre rapidement et collégialement.
  3. Se préparer: L’idéal est de tester en cours d’année, un scénario de crise permettant d’évaluer la réactivité, le fonctionnement des canaux de communication et de tester les prises de paroles des porte-parole potentiels de l’entreprise. Pour ces derniers, des formations de media-trainig doivent être envisagées régulièrement tout au long de l’année. Argumentaires et messages clés sur les sujets répertoriés à l’avance permettent également de gagner du temps.
  4. Doser l’information: La prise de parole comporte toujours des risques. Elle doit viser à informer, à rassurer et à corriger éventuellement les informations erronées. Mieux vaut intervenir sur des faits et éviter tout ce qui relève du débat d’opinion.
  5. Rester factuel: L’heure n’est pas de répondre aux critiques, de dénigrer ou de chercher des responsables, aussi faut-il veiller à rester factuel dans le traitement de l’information. Éviter l’émotion excessive, adopter un ton neutre, se montrer compréhensif sans commisération, tout en évitant la dramatisation ou ce qui pourrait être perçu au contraire comme de l’indifférence ou, pire encore, du mépris.
  6. Être visible sans être alarmiste: Éviter la contagion de la crise et la contenir pour qu’elle n’affecte pas davantage l’exploitation de l’entreprise est un enjeu clé relativement complexe. Le silence est parfois vu comme un aveu de faiblesse ou de culpabilité et permet aux détracteurs d’occuper le terrain médiatique.
  7. Proposer des canaux spécifiques: La situation de crise engendre d’importants bouleversements qu’il faut tâcher de minimiser pour ne pas nuire à la pérennité de l’entreprise. Aussi, il ne faut pas hésiter à recourir à des solutions simples comme un numéro de téléphone dédié, l’accès à une cellule psychologique, un site dédié ou une adresse email, ce qui permet de cloisonner le traitement de l’information et de l’orienter vers des ressources préparées spécifiquement.
  8. Intégrer les médias sociaux: Les médias sociaux occupent une place centrale aujourd’hui dans le dispositifs de communication. Les réseaux sociaux constituent des canaux majeurs, d’autant qu’ils amplifient l’impact en engendrant une forte viralité et sont très suivis par les journalistes et blogueurs. Les réseaux sociaux peuvent être aussi utilisés en communication interne : lors des attentats de novembre 2015 à Paris, Facebook proposait aux internautes de se signaler « en sécurité » ; cette fonctionnalité a permis d’obtenir plus vite certaines informations que les emails ou les téléphones professionnels.
  9. Faire de la veille: L’information et la fiabilité de l’information sont des problématiques centrales en cas de crise. Il convient de surveiller sa marque et sa notoriété pour intervenir, principalement dans une optique corrective, pour éviter que de fausses informations se propagent.
  10. Rester zen: La tension et le stress ne sont pas bons conseillers. La cellule de crise doit être outillée logistiquement afin de piloter et mener au mieux sa mission pendant la durée de la crise.

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