Tanger, un Salon du Livre qui se joue de la pluie comme Tanger du Réel

Le 8 mai. Le 20ème Salon International de Tanger des Livres et des Arts touche à sa fin. La navette vient nous chercher pour nous conduire à l’aéroport Ibn Battouta. Elle passe par les différents hôtels où nous avons été répartis et elle longe la grande corniche, vaste route moderne que la Médina- blanche, bleue, délavée par les années, exactement comme dans le film de Jim Jarmusch Only Lovers left Alive (les vampires en moins) – regarde, passé apprivoisant l’avenir.

Quatre jours avant, nous avons débarqué dans cette ville, de cœur pour certains, à apprivoiser pour d’autres. Mais tous pour débattre sur ce thème qui n’aurait pas mieux pu être mieux trouvé, choisi pourtant par le tout nouveau directeur de l’institut français, Jérôme Migayrou : Tanger Ville Symbole, Du Fanstasme au Réel.

Il y a eu des rencontres mêlant géographes comme Emmanuel Ruben – qui n’avait jusqu’alors que survolé Tanger, «cette mâchoire de l’Europe», et qui nous parle émerveillé du foot le matin sur la plage avec les enfants et du café Hafa, où les tables comme des tombeaux debout se dressent  face à l’Océan- épistémologues, écrivains, peintres, psychanalystes, historiens et psychiatres à l’instar de mon confrère Jalil Benani, rencontré en octobre dernier au Festival du livre Marrakech.

Il y a eu des concerts, où Oum avait conquis le cœur des tangérois avant même de se produire dans cette salle ornée jusqu’au plafond du Palais Moulay Hafid.

Sans oublier le Off, où aux Insolites, Youssef Wahboun déclamait Les Hommes meurent mais ne tombent pas, suite poétique inspirée des peintures de Mahi Binebine.

La route est silencieuse et en passant au large du Cap Spartel, les images se confondent : la réception au Consulat le mercredi soir, la balade le temps d’une éclaircie sur la plage du Mirage, le dîner avec Sylvain Tesson à Saveur de Poisson et ses compagnons d’escalade, et les enfants qui se jouent de la pluie comme Tanger se joue du Réel !

Nous retrouvons Sylvain Tesson à L’aéroport qui n’a pas voulu faire comme tout le monde et a choisi de venir « à la nage » (oui, il pleut, et ici on danse sous la pluie).

Il ouvre son sac d’escalade, comme s’il allait nous montrer un trésor, et en sort des livres. Un à un. Parmi eux, La conversation d’Ali Benmakhlouf, Dans les Ruines de la carte d’Emmanuel Ruben. Mais aussi étonnamment Sagan, Sagan et encore Sagan. Je souris devant Bonjour Tristesse. Il me répond, s’amusant : – Plus personne ne lit Proust de nos jours. Je lui montre alors, assise à côté d’Arno Bertina, Laurence Le Guen, Le Côté de Guermantes à la main.

L’embarquement va commencer. Sylvain nous propose de continuer Le Salon du Livre dans l’avion : – Magnifique, nous allons tous débattre de Tanger en survolant Gibraltar !

Maï-Do Hamisultane-Lahlou

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