Violence à l’égard des femmes: les chiffres inquiétants du HCP

La récente agression d’une jeune fille dans un bus de Casablanca a fait révéler au Haut-commissariat au Plan (HCP) ses conclusions sur l’enquête nationale sur la prévalence de la violence à l’égard des femmes (ENPVEF). Même si l’étude date de 8 ans, elle dévoile toutefois l’extrême vulnérabilité des femmes marocaines dans les espaces publics. Aucune n’est indemne. Ni l’âge, ni la situation familiale, ni le niveau intellectuel, encore moins le handicap ne dissuadent les auteurs de ces actes de violence. Les chiffres du HCP font froid dans le dos. L’enquête souligne que sur une population de 5,7 millions de femmes âgées de 18 à 64 ans, 40,6% confient avoir déjà été victimes au moins une fois d’un acte de violence en milieu urbain.

Mariées ou pas, valides ou invalides, instruites ou analphabètes, jeunes ou âgées… les femmes marocaines sont victimes de manière globale de violence, sous une forme ou une autre, souligne l’étude. Même si l’enquête relève tout de même que certains facteurs, comme la tenue, le statut de « mariée » contribuent soit à intensifier ou amoindrir la prévalence de violence chez certaines catégories de femmes.

Les violences sexuelles à l’égard des femmes sont celles qui sont en général critiquées de manière acerbe. Toutefois, le HCP souligne que les femmes marocaines sont victimes de plusieurs formes de violence, avec en tête la violence psychologique. Celle-ci touche 1,9 million de femmes, soit 32,1% des citadines. Les violences physiques apparaissent en deuxième position avec 808 000 victimes, soit 14,2% des femmes. Les atteintes à la liberté individuelle dans les lieux publics et les violences sexuelles, non compris le harcèlement sexuel sans attouchement, touchent respectivement 4,5% de femmes (425 000 femmes) et 3,9% des femmes (372 000 femmes) en milieu urbain, précise le HCP.

Si de manière globale, toutes les femmes sont victimes de violence, ce sont surtout les plus jeunes (de 18 à 24 ans) qui sont le plus ciblées. Ainsi, selon l’enquête, 58,3% de jeunes femmes dans la tranche d’âge (18 à 24 ans) sont victimes violence contre 25% pour celles âgées de 50 à 64 ans. L’enquête précise que les jeunes femmes de 18 à 24 ans, en général les étudiantes ou les jeunes travailleuses sont victimes de violences psychologiques pour 51,1%, contre 15,1% pour celles âgées de 50 à 64 ans. Concernant les violences physiques, les jeunes femmes sont touchées à 18,2% et 8,8% pour les violences sexuelles. Les femmes âgées le sont un peu moins, soit respectivement 11,8% pour les violences physiques et 1,9% pour les violences sexuelles. Autre réalité non moins importante : même si la femme présente un handicap, son état de l’épargne aucunement de la violence perpétrée dans les espaces publics. Il apparait ainsi que le taux de prévalence pour les femmes présentant aucun handicap ne dépasse que de 6 points celui enregistré parmi celles ayant un handicap.

Célibat, niveau d’enseignement supérieur, tenues modernes

les facteurs de prévalence des violences contre les femmes

En termes de statut familial, le célibat est un facteur qui semble accroitre la vulnérabilité des femmes aux violences.  Ainsi, le taux de prévalence des violences parmi les célibataires est de 66,3% contre 46,3% parmi les divorcées. Etre mariée semble un facteur qui réduit les violences, mais ne préserve aucunement les femmes des violences dans les espaces publics, puisque selon l’enquête, 33,4% de femmes mariées sont victimes de violence dans l’espace public. Les femmes veuves sont touchées pour leur part à hauteur de 27%, probablement en raison de leur âge, souligne le HCP.

Autre facteur de vulnérabilité des femmes : leur niveau d’enseignement. Les femmes citadines ayant un niveau d’enseignement supérieur enregistrent le plus d’actes de violences que les autres femmes. Ainsi, plus le niveau d’instruction de la femme est élevé, plus le taux de prévalence augmente. Ainsi, il est de 29% parmi celles n’ayant aucun niveau d’instruction contre 40,6% pour celles ayant un niveau d’enseignement primaire et 57,9% pour celles ayant atteint l’enseignement supérieur.

Il apparait également que le taux de prévalence varie en fonction du type de vêtements portés en dehors du foyer. «Cependant, quelle que soit sa tenue vestimentaire, la femme reste exposée aux violences dans les espaces publics», souligne le HCP. Ainsi, celles qui portent les tenues modernes courtes sont victimes de violence à 75,5%, contre 61% pour celles qui portent des tenues modernes longues, mais sans voile et 34% pour celles qui portent des djellabas ou équivalents.

L’Enquête révèle enfin que la majorité des auteurs des violences dans les espaces publics urbains sont jeunes ne dépassant pas 35 ans, de même que les victimes de ces violences. Toutefois, le taux de dénonciation de ces violences auprès des autorités compétentes reste encore très faible. Seules 18,8% des victimes de violences survenues dans les espaces publics en milieu urbain s’adressent à une autorité compétente pour déposer plainte, conclut le HCP.

Danielle Engolo

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