AsgassAmaynouAnbarch

L’hiver bat son plein ; et, c’est en cette période que le froid est intense. A part celles occultes, provenant des brumes et du brouillard, les précipitations sont absentes. Les zones emblavées, vertes suite aux dernières pluies, virent au jaune. Le prix de la balle de paille s’envole. La ruralité vit dans l’espoir.

Dans les campagnes, l’efficacité énergétique dans les habitations est loin d’être assurée. C’est en se couvrant au plus que les corps sont au mieux.Il faut reprendre le Conseil Economique Social et Environnemental pour relever que le droit constitutionnel de disposer d’un logement décent et salubre « est faiblement respecté en milieu ruralcar il enregistre un retardconsidérable aussi bien dans le domaine de l’habitat qu’en matière de conditionsminimales pour mener une vie bienséante. ».

Cette efficacité énergétique n’est pas certaine dans les habitations de ceux qui veulent fuir le stress urbain pour quelques heures ou quelques jours ; les villas construites sont plutôt ouvertes « pour renouer avec la nature » sans se salir les mains. Cette ruralité d’occasion est encouragée par un crédit bancaire qui permet « d’acquérir le terrain, de construire un logement en milieu rural et de procéder aux aménagements et doter le terrain des équipements nécessaires ».

Au sein des deux types d’habitat qui concrétisent les inégalités sociales et les disparités entre la ville et la campagne, accumulées depuis l’Indépendance, les préparatifs pour fêter la nouvelle année sont assurées par la même femme et sa fille aînée.La cadette et la benjamine s’occupent de leur foyer et du besoin en thé de leur père.

Ce dernier, bien au chaud dans ses jellabas, semble plongé dans une somnolence continue alors que son esprit vigilant ne cessait de retourner l’ensemble des modalités pour la mise en valeur de ces terres : morcellement du foncier à sa disposition, stress hydrologique, efficacité énergétique, crédits bancaires et liquidités, circuits commerciaux … Sa pensée revenait toujours à cette nécessité qui s’imposait à lui, avoir un garçon qui pourrait l’aider dans ses travaux agricoles. Un sourire éclairait son visage en pensant à ses filles et à leurs capacités et compétences ; mais le garçon permettrait une assurance au développement de son patrimoine.

Dans la villa, la femme rurale faisait vite en besogne pour pouvoir se libérer à temps. La maîtresse de maison était dans sa chambre, prise dans ses communications téléphoniques. A part le chapon qui provenait de la basse-cour, tous les autres ingrédients se trouvaient dans des paquets apportés de la ville. C’est vrai qu’ils présentaient bien, mais en plus de leur prix élevé, leur goût et leur perception restaient superficiels, comme le maquillage de Madame. En donnant quelques conseils pour les servir, elle arrangea l’ensemble des mets dans les ustensiles qui convenaient sur la grande table de la cuisine.

A travers un sentier qui serpentait à travers les limites des parcelles emblavées ou en jachère, la femme et sa fille hâtèrent le pas. Elles avaient encore à faire dans leur maison.

En plus des travaux de routine, elles devaient préparer et servir les mets traditionnels en cette nuit qui annonçait le début d’une nouvelle année agricole ; en quantité suffisante pour assouvir l’ensemble des présents et des membres de la famille qui vont s’inviter et en qualité reconnue pour asseoir une renommée et un savoir faire. La fille aînée devrait aussi s’arranger et se faire belle ; en cette nuit beaucoup de projets peuvent se traduire dans la réalité. La mère, tout en s’activant, ne cessait de relater à ses filles les proverbes, fredonnait les chansons et racontait les traditions observées. Elle assumait son rôle envers le temps dans la conservation de ce qui lui paraissait fondamental pour son identité. Elle formulait ses vœux pour chacune de ses fillesen regardant le ciel, pour leur émancipation et leur avenir en tant que médecin pour la benjamine et ingénieur pour la cadette. L’aînée devra trouver « l’argent dans laquelle sublimera son cuivre ». Pour son homme, comme pour elle, elle demandait la prospérité et une bonne santé. Elle terminait par implorer la miséricorde du ciel, au nom de tous les innocents, les animaux qui ne peuvent parler et les nouveau-nés…. Que la prochaine année soit féconde dans la bonté et la beauté. Que sa famille et l’ensemble de l’humanité soit préservées de cette épidémie, que la paix règne partout et que le bien l’emporte sur le mal …  AsgassAmaynouAnbarch.

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