Démantèlement prémédité

Le Conseil National des Droits de l’Homme vient d’éditer un rapport sur « le droit à l’eau ». Il est souligné,par la présidente du conseil,dans la présentation dudit rapport que« toute personne a le droit d’avoir accès à une quantité d’eau suffisante, salubre et acceptable, élément vital et nécessaire pour vivre dans la dignité et condition préalable à la jouissance des autres droits de l’homme. »

Par ailleurs, ont été adoptées des lois relatives aux sociétés régionales multi-services (distribution d’électricité, d’eau potable et de l’assainissement liquide) et celle régissant l’autoproduction de l’énergie électrique.

Aurait-il fallu au Conseil National des Droits de l’Hommed’associer l’eau et l’électricité dans son approche consultative comme ils le sont dans la vie courante ?

Cette question s’impose ; car tout semble indiquer que le gouvernement s’achemine vers le démantèlement, à plus ou moins brève échéance, de l’Office National de l’Eau et de l’Electricité.

La démarche se trouverait ainsi dans sa phase finale. De son « umbundling », recommandé par la Banque Mondiale à la fin du siècle dernier, qui devait conduire à une séparation entre la production, le transport et la distribution de la ressource énergétique et de la ressource hydrique, la création de l’Autorité Nationale de Régulation de l’Electricité, pour veiller au bon fonctionnement du marché libre de l’électricité et en réguler l’accès, à la création des sociétés régionales multi-services et l’encadrement de l’autoproduction électrique, il ne reste qu’à faire le saut.

Dans notre beau pays soumis à un stress hydrique structurel et qui s’ouvre aux énergies renouvelables et au dessalement de l’eau de mer, dans un contexte néolibéral en crise,l’industrie de l’eau potable et celle de l’électricité et leurs commercialisations sont assez complexes.

L’adduction en eau potable, autant que l’électrification des agglomérations à travers le royaume, se sont effectuées à travers des décennies où la comptabilité des coûts et le rendement social de ces opérations s’interpénétraient à tel point que l’ONEE faisait partie « sans le dire » des mécanismes de la compensation pour une grande partie de la population.

L’orientation néolibérale du gouvernement permet aux technocrates d’agir comme si la société marocaine était une société d’opulence où le plein emploi est assuré, une croissance avoisinant les deux chiffres, un développement humain avancé et où le secteur de l’énergie devrait être réorganisé pour s’adapter aux nouvelles contraintes environnementales et géopolitiques.

Dans le cadre de cette « transition énergétique », le secteur public est dans le collimateur pour le réduire au maximum sans prendre en considération la situation de la population et ses besoins. La vie, telle qu’elle est actuellement, ne peut se subir sans eau potable à domicile et sans électricité.

L’eau et l’électricité sont des éléments vitaux et nécessaires pour vivre au 21ème siècle dans la dignité et constituent une condition préalable à la jouissance des autres droits de l’homme. Ils ne peuvent devenir l’objet de spéculations pour enrichir les sociétés multinationales.

Comment se fera alors la transformation d’un droit en prestation de service redevable ? Un cabinet d’études parmi les « Big four » suggérera et la population, autant celle enregistrée dans le Registre Social Unifié (en cours de mise en œuvre…) et l’autre, raquera.

Certes, le gouvernement dispose d’une majorité confortable pour faire passer son plan en lui donnant les accoutrements qui lui semble répondre à la réforme. La population ne se perdra pas dans ces artifices car elle va être touchée dans son pouvoir d’achat et ses capacités de bienêtre.

Une autre politique est possible dans le cadre de la consolidation du processus démocratique, le développement d’une politique sociale au bénéfice de la population, le renforcement du front intérieur et la régionalisation avancée pour permettre le développement local et l’élimination des disparités spatiales.

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