Des panélistes examinent à Londres l’évolution du cinéma marocain

Entre exploits et défis

Les participants à un Webinaire tenu, mardi soir à Londres, ont examiné les différentes étapes de l’évolution du cinéma marocain depuis l’ère post-coloniale jusqu’à nos jours, mettant en avant le développement réalisé par ce secteur en matière de production mais aussi les défis persistants en termes d’audience et d’infrastructures.

Les intervenants à cette rencontre, initiée par le London Middle East Institute (SOAS) et dédiée à la présentation du livre : « Le cinéma marocain inédit : Voix décentralisées et perspectives transnationales », ont également passé en revue les moyens d’élargir la portée transnationale du cinéma marocain, qui reste peu connu en dehors de ses frontières nationales.

Ainsi, Dina Matar, présidente du Centre mondial des médias et des communications relevant du SOAS et modératrice de ce webinaire, a expliqué que ce livre, qui est le fruit d’une collaboration entre William Higbee , professeur à l’Université d’Exeter, Jamal Bahmad, de l’Université Mohammed V, et Florence Martin de « Goucher College », soutient que le cinéma marocain s’est désorbité du cinéma francophone et de l’héritage postcolonial du Maroc pour devenir un cinéma transnational.

Elle a rappellé que la production cinématographique a considérablement augmenté au Maroc au cours des deux dernières décennies, notant que les films marocains sont devenus en tête du box-office national et sont souvent sélectionnés pour participer aux prestigieux festivals internationaux, tels que Cannes et Berlin.

De son côté, William Higbee , professeur d’études cinématographiques à l’Université d’Exeter, a souligné que le cinéma marocain a connu « un saut qualitatif » entre 1990 et 2015 en termes de production grâce aux investissements publics, relevant que la production cinématographique est passée de 2 à 3 films par an dans les années 1990 à environ 30 longs métrages en 2010, ce qui fait du Royaume le 4ème producteur de films en Afrique.

L’expert a mis également en lumière le paradoxe entre les progrès réalisés en termes de production et la visibilité limitée des films à l’échelle internationale ainsi que le manque d’infrastructures cinématographique au Maroc.

Il a indiqué que le livre, auquel il a contribué, essaye d’explorer la portée transnationale du cinéma marocain en mettant l’accent sur la politique culturelle de la coproduction internationale, le rôle des festivals internationaux comme réseaux de distribution alternatifs, ainsi que l’impact du piratage et de la perturbation numérique sur l’évolution du secteur, en plus du rôle de l’éducation cinématographique dans la promotion du cinéma.

Pour sa part, Jamal Bahmad, professeur d’études littéraires et culturelles au Département d’anglais de l’Université Mohammed V, a estimé que la question de l’audience demeure un défi important pour le cinéma marocain, notant que « le cinéma marocain a beaucoup gagné en termes de production et de visibilité internationale, au cours des trois dernières décennies, pourtant le total des salles de cinéma a par contre chuté, passant d’environ 300 salles en 1980 à moins de 30 salles aujourd’hui ».

Il a poursuivi que le gouvernement, à travers le Centre cinématographique marocain (CCM), soutient beaucoup la production cinématographique, notant que le Royaume produit actuellement environ 20 à 25 films par an, entre drama, fiction et documentaires, ce qui représente un chiffre assez significatif à l’échelle du continent.

Il a toutefois souligner l’importance de penser à élargir l’audience de ces films au-delà des circuits des festivals. « Ceci est un grand défi », a-t-il affirmé, faisant observer que la plupart des salles de cinéma ouvertes se trouvent dans les grandes villes, comme Casablanca, Rabat, Tanger et Marrakech, mais sont quasi absents dans les petites villes, ce qui remet en cause « les canaux traditionnels de distribution et de projections des films ».

Rappelant l’impact de la révolution numérique et des programmes de streaming qui ont complètement transformé les modes de consommations, non seulement au Maroc mais dans le reste du monde, M. Bahmad a souligné la nécessité de rediffuser les classiques afin de permettra aux jeunes de découvrir le répertoire de films qui ont enrichi le cinéma marocain.

Il a aussi insisté sur l’impératif de mettre en place des salles de cinémas dans les différentes villes du Maroc, notamment celles qui connaissent une forte activité de production cinématographique à l’instar de Ouarzazate, qui n’abrite aucune salle de cinéma bien qu’elle soit une destination privilégiée de tournage de films internationaux. 

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