Justice «sociale» pour tous

Colloque du PPS sur la couverture sociale universelle

Désireux d’apporter sa contribution au grand chantier de la généralisation de la couverture sociale universelle, à laquelle Sa Majesté le Roi Mohammed VI a appelé dans le dernier discours de la fête du Trône, le bureau politique du Parti du Progrès et du Socialisme a organisé, jeudi soir au siège national du parti à Rabat, un colloque autour du thème de «la couverture sociale universelle, un investissement productif», dont le modérateur Abdelaziz Adnane a souligné d’entrée la pertinence et la portée des hautes orientations royales données dans ce sens et à différentes occasions pour réaliser davantage de justice sociale au profit de tous.

Il est donc temps de dépasser le stade du diagnostic pour formuler des propositions devant aider à réaliser la généralisation de la couverture sociale universelle au profit de tous pour répondre aux aspirations des Marocains, a-t-il dit, rappelant qu’il s’agit d’un investissement productif et non de dépenses stériles.

C’est une urgence pour le Maroc qui connait un vieillissement de sa population, une augmentation du nombre des personnes atteintes de maladies chroniques et coûteuses et un approfondissement des disparités entre les mondes rural et urbain en matière de bénéfice des programmes sociaux et sanitaires. Le pays fait face aussi à de grandes défaillances au niveau de la gouvernance des systèmes de protection sociale en place, à la faiblesse de la prévention et au retard qu’il accuse en matière de santé numérique.

Après avoir évoqué une série de questions ayant trait notamment au déficit que  le pays doit combler en matière notamment de la gouvernance et du pilotage des réformes envisageables et aux contraintes économiques et sociales qui limitent ses marges de manœuvre, il a fait savoir que cette conférence s’articule autour de trois axes, à savoir :

Les systèmes de protection sociale au Maroc (Najib Guedira),

La Généralisation de la couverture sanitaire universelle : les acquis et les perspectives (Lhoucine Louardi)

Des éléments prospectifs pour l’édification d’un système complémentaire de la couverture sociale universelle (Abdelouahed Souhail).

Il a souligné à l’occasion qu’au-delà de toutes les contraintes,  des pays qui ont le même niveau de développement que le Maroc, ont réussi à réaliser la généralisation de la couverture sociale universelle à l’ensemble de la population. Et ce ne sont pas les atouts et la volonté qui manquent au Maroc, selon lui, estimant que le redressement de l’hôpital public requiert un plan d’urgence pour en renforcer l’infrastructure, l’équipement et les ressources humaines.

Benabdallah : le PPS soutient fortement l’appel de Sa Majesté le Roi à la généralisation de la couverture sociale universelle

Prenant la parole, le Secrétaire général du PPS Mohammed Nabil Benabdallah a d’emblée souligné que Sa Majesté le Roi Mohammed VI a appelé dans le dernier discours de la Fête du Trône à la généralisation de la couverture sociale universelle au cours des cinq prochaines années, une orientation que le Parti du Progrès et du Socialisme soutient fortement et qu’il revendique depuis une longue date dans tous ses programmes et documents y compris dans son dernier mémorandum qu’il a présenté pour une sortie réussie de la crise du Covid-19 et dans lequel le PPS a notamment avancé plusieurs propositions économiques, sociales et politiques.

Selon lui, le Maroc a en effet déployé de grands efforts en matière de couverture sociale et de promotion des droits sociaux. Il dispose d’un régime de retraite qui remonte à plusieurs années et décennies et de certains systèmes de couverture sanitaire au profit de certaines catégories dont les fonctionnaires et d’autres depuis une longue date. Néanmoins on s’était rendu compte depuis des années de l’insuffisance de ces systèmes qui ne concernent que certaines franges de la population à l’exclusion de la majorité. C’est ainsi que plusieurs tentatives ont été faites par le gouvernement de l’alternance démocratique dans le sens d’aller vers la généralisation de la couverture sanitaire, qui avait commencé par la mise en place l’AMO (assurance maladie obligatoire de base) et puis le RAMED (régime d’assistance médicale).

Quant à la crise du Covid-19, a-t-il dit, elle a mis à nu les défaillances dues à la place qu’occupe le secteur informel dans l’économie nationale, où tous les droits sont inexistants et où il n’y a pas de couverture sociale et médicale. L’on a découvert aussi au terme de cette crise que la pauvreté et l’exclusion sont largement répandues au sein de larges couches de la population. Plus de six millions de Marocains ont été contraints de s’inscrire pour bénéficier d’un soutien direct de l’Etat en cette période de crise du Covid-19, étant donné qu’ils ne disposaient d’aucune source de revenu. Ce sont donc six millions de ménages qui comptent plus de 20 millions de Marocains qui vivent dans la pauvreté, la précarité et l’exclusion, a-t-il estimé.

C’est pourquoi, l’on a jugé nécessaire de réviser l’existant et d’aller vers la généralisation de la couverture sociale universelle, une orientation dont se félicite le Parti du Progrès et du Socialisme, a-t-il rappelé.

Ce qui soulève plusieurs questions ayant trait notamment aux moyens d’y parvenir et aux défis que le Maroc doit relever pour mettre en place un modèle de développement inclusif qui bénéficie à l’ensemble de la population et du soutien de tous les Marocains, sans oublier que le taux de prévalence de  la précarité a un effet négatif sur la stabilité sociale et politique.

Ce qui a fait dire aussi au Secrétaire général du PPS que le Maroc ne peut pas poursuivre son œuvre de développement sans accorder à cette dimension sociale tout l’intérêt qu’elle mérite.

A travers cette rencontre de réflexion, le PPS ambitionne notamment d’illuminer la voix et de rechercher les solutions les plus appropriées pour que le pays puisse faire un saut qualitatif au cours des cinq prochaines années en matière de  généralisation de la couverture sociale universelle. Ce qui constituera par la même un bond en avant en matière de développement, a-t-il conclu, émettant l’espoir que le nouveau modèle de développement du pays n’occultera pas cette donne.

Pr. Najib Guedira : Beaucoup de réalisations mais beaucoup de déficiences à combler au niveau des systèmes de protection sociale

La protection sociale au Maroc, selon la définition du BIT (Bureau internationale du travail)  est constituée par un ensemble de mécanismes qui visent à prévenir, à réduire et à éliminer les vulnérabilités économiques et sociales face aux risques sociaux de la vie, a-t-il dit.

Elle se compose de deux parties : les assurances sociales qui sont contributives et l’assistance sociale qui est non contributive.

Se référant à l’étude du projet de programmes intégrés de prévoyance sociale, il a indiqué que les financements accordés dans ce cadre pour les deux composantes atteignent presque 100 milliards de Dirhams : deux tiers environ pour les assurances sociales et un tiers pour l’assistance sociale.

Les prestations de sécurité sociale qu’elle soit contributive ou non contributive dont en premier chef la maternité se composent aujourd’hui de l’assurance maladie obligatoire, du RAMED, de l’AMO pour les étudiants et pour quelques catégories particulières et enfin de l’assurance maladie pour les travailleurs indépendants, dont la mise en œuvre est relativement difficile.

L’AMO couvrirait environ 60% de la population aujourd’hui. Et on constate,- et c’est un acquis important du système de protection sociale-, que le RAMED a réduit les écarts entre les catégories sociales.

Pour preuve, il a cité deux chiffres tirés de l’enquête panel de l’ONDH : en 1912 le premier quintile  était couvert à hauteur de 6% seulement. Aujourd’hui le quintile 1 est couvert à hauteur de 60% et le quintile 5, c’est-à-dire les 20% les plus aisés, étaient couverts à 47% en 1912 contre 6% pour le quintile des plus pauvres. Aujourd’hui le quintile 5 est couvert à hauteur de 68%. Donc l’écart qui était de 6 à 47 est aujourd’hui de 60 à 68%.

Et cela grâce effectivement au ciblage effectué par le RAMED qui a bénéficié surtout aux deux premières catégories de premier quintile de population, a-t-il dit, estimant que ceci est un acquis du système.

Il a ensuite précisé que la retraite et la pension de survie sont des composantes qui vont ensemble. On a aujourd’hui quatre institutions de prestations, sachant que le système de retraite ne couvre aujourd’hui que 40% des actifs occupés et simplement 20% par rapport à l’ensemble de la population. 80% de la population n’a pas de retraite.

Les prestations familiales ont connu une amélioration puisqu’il y a aujourd’hui  les familles qui perçoivent 360 DH pour chacun des trois premiers enfants et seulement 36 DH pour les 4ème, 5ème 6ème enfants. Pour les familles qui ont plus d’enfants, il n’y a aucune prestation. Ce qui est normal avec la politique de contrôle et de maitrise des naissances. Mais les prestations familiales ne bénéficient qu’à 28% des enfants marocains.

L’indemnité pour perte d’emploi considérée comme une assurance chômage, mais qu’elle ne l’est pas vraiment, est très limitée avec très peu de bénéficiaires.

En matière de couverture des accidents de travail, il y a beaucoup à faire, parce que ce sont les compagnies d’assurance privées qui effectuent cette couverture pour le secteur privé. Les entreprises privées pour ne pas payer des primes élevées  sous-déclarent souvent les accidents et la victime sont les travailleurs qui ne sont pas indemnisés.

Voilà donc pour la sécurité sociale pour sa première composante. Et puis il y a L’ASSISTANCE SOCIALE dont les programmes sont non contributifs. Les bénéficiaires ne versent aucune contribution pour en bénéficier, a-t-il ajouté.

L’INDH est un programme très particulier à ciblage territorial et qui a bénéficié à une population de plus de 11 millions de personnes pour 38 milliards de Dirhams.

Il y a aussi un ensemble de programmes qui ont été développés : Tayssir, le programme d’aide aux femmes veuves, le programme d’entraide familiale, différentes aides aux élèves sous forme d’internats, de restaurants, de cantines scolaires ; etc. Ces programmes bénéficient à environ 2 millions d’élèves au Maroc.

Et pour les étudiants, il y a des bourses.

La première conclusion de ce survol est que ces programmes ne couvrent pas toute la population marocaine. C’est ce qui explique l’appel de Sa Majesté le Roi dans le discours du trône de cette année à accélérer la généralisation de la couverture sociale.

L’assurance maladie est tout de même la prestation où il y a eu, selon les chiffres officiels le plus de progrès, puisque 60% environ de la population est couverte, a-t-il affirmé. Les prestations familiales et tous les programmes Taysir permettent de couvrir 48%, c’est-à-dire la moitié environ de la population  à l’exclusion de l’autre moitié qui n’est pas couverte.

Quant aux programmes de la vie active, c’est-à-dire l’aide aux travailleurs et à toutes les personnes dans la vie active, ils ne touchent que 40% de la population. Les personnes âgées et les personnes en situation de handicap sont aujourd’hui les plus grandes oubliées du système de protection sociale du Maroc.

Donc beaucoup de réalisations ont été faites, mais il a y beaucoup de déficiences à combler.

Les études qui ont été faites montrent d’abord qu’il y a trop d’intervenants dans notre système de protection sociale et trop de programmes. Cela permet certes d’avoir une offre diversifiée, mais cette offre est très fragmentée et très éclatée et s’effectue sans aucune coordination entre toutes les institutions et tous les programmes ou en tout cas avec une coordination très faible.

Le deuxième point positif c’est que la couverture est effectivement importante. On n’est pas en terrain vide. Et elle est évolutive.

L’assurance maladie en est un exemple, et il y a dans tous les domaines un certain nombre de gaps qui sont encore persistants.

Si on prend l’assurance maladie globalement, effectivement il y a une couverture. Mais aujourd’hui est ce qu’il y a un service sanitaire qui est face à cette couverture. C’est la question qui se pose aujourd’hui avec le plus d’acuité en n’oubliant pas que même dans la couverture par exemple pour le RAMED et l’identification, il y a des failles au niveau du ciblage, qui seront dépassées espérons le avec le  Registre social unique, a-t-il dit.

Le système de protection sociale cible plusieurs catégories mais il souffre d’une absence ou d’une grande faiblesse d’harmonisation, de l’existence d’un trop grand nombre d’acteurs, et d’une faiblesse de la coordination.

Enfin les programmes ne sont pas suivis et évalués, étant donné que les programmes de suivi et d’évaluation sont inexistants et le suivi et l’évaluation transversale qui permettraient de voir un petit peu l’ensemble d’un secteur de protection sociale. Ce qui est quasi impossible parce qu’il n’y a pas de statistiques disponibles et les systèmes d’information existants comportent beaucoup de faiblesses et souffrent d’un manque d’harmonisation.

Il y a aussi le chevauchement et les redondances entre beaucoup de programmes et beaucoup d’intervenants, mais cela n’empêche pas qu’il y a des vides, des gaps de couverture. Les méthodes de ciblage entre les programmes et les intervenants ne sont pas toujours compatibles et harmonisées.  Il y a des faiblesses dans la gestion a-t-il encore souligné. En matière d’efficacité de la dépense, il y a beaucoup de gaspillage sans oublier la faiblesse des ressources humaines en nombre et en qualité et des systèmes d’information outre la faible implication des collectivités territoriales. L’INDH illustre cette constatation ou le RAMED et enfin un déséquilibre qui existe entre le contributif et le non contributif.

Donc il faudrait rationnaliser le système, renforcer sa gouvernance, harmoniser les méthodes et les outils de ciblage, étendre la couverture, développer les systèmes d’information tout en œuvrant pour leur renforcement et leur pérennisation, a-t-il recommandé.

Etant donné que les diagnostics ne manquent pas, comment peut ont mettre en œuvre des solutions qui   permettaient de rationnaliser le système, de renforcer sa gouvernance etc…

A mon sens, a-t-il dit, le projet intégré de protection sociale a adopté une démarche globale et intégrée, parce que celle-ci est nécessaire. La sécurité sociale doit être intégrée dans une politique de protection sociale globale  car il y a des gens qui ne peuvent pas contribuer (AMO ET RAMED par exemple), mais cette politique de protection sociale doit être intégrée dans une politique sociale. Mais est ce qu’il y a une telle politique sociale au Maroc ou des politiques sociales et quelle coordination existe-t-elle entre elles.

Il a ensuite estimé qu’il est bien de mettre en place un système d’assurance maladie. Mais si on ne renforce pas le système de santé, a-t-il expliqué, l’on risque d’offrir des cadeaux totalement creux. On ne donne dans ce cas que du vent.

Cette politique sociale doit être elle-même intégrée dans une politique publique parce que  la protection sociale est un investissement productif, sans oublier que le pays a besoin toutefois de beaucoup d’investissements. Donc la généralisation de la protection sociale a un coût financier mais elle doit être accompagnée par un renforcement du secteur de la santé ou du secteur de l’éducation. Et cela aussi a un coût. Elle a besoin d’être alimentée par un ensemble de données. Comment mettre un système de retraite généralisé  lorsqu’on sait que le rapport entre actifs et retraités est en train de se dégrader et le marché du travail offre de moins en moins de possibilités d’emploi. Donc il est nécessaire de réfléchir sérieusement à toutes ces options qu’il est difficile de mettre en œuvre dans le cadre d’une gestion globale. Mais cela est nécessaire pour relever effectivement le défi que SM le Roi a lancé dans Ses discours pour réaliser une généralisation effective. Le pays a certes des atouts, mais il a en même temps beaucoup de contraintes. Le leadership royal est aujourd’hui très fort dans ce domaine et d’autres. Mais le Roi a besoin de relais. Mais est ce qu’il y a un leadership aussi fort au niveau des autres acteurs et intervenants, s’est il interrogé (Les partis politiques, les syndicats).

La première contrainte est liée au niveau du développement du pays et de la richesse qui est créée et disponible pour l’investissement, car les besoins sont importants en la matière pour développer le pays. Donc il faut faire des choix qui soient raisonnés dans un cadre global.

Le niveau de développement et la faiblesse relative de la richesse par rapport au PIB et à ce défi de généralisation est aggravé par les inégalités de répartition sociale qui existent et sont en train de s’aggraver.

Il y a aussi le problème de la mise en œuvre. Le pays lance beaucoup de chantiers en particulier au cours des 20 dernières années, a-t-il estimé.

On fait beaucoup de promesses qui ne sont pas forcément tenues. On a un panier ambitieux en matière d’assurance, qui a déjà des problèmes et qui risque d’en avoir d’autres en cas de généralisation. Alors que les attentes de la population sont de plus en plus pressantes et le déficit de confiance est en train de s’aggraver entre les citoyens et la plupart des institutions.

Et il ne faut pas oublier non plus les défis nouveaux. Au-delà du Covid-19, l’on doit s’attendre à la répétition de tels scénarios outre la mondialisation qui est mise à mal par cette pandémie. Beaucoup de pays sont entrain de revoir leur politique avec cette pandémie. Des relocations ne sont pas à exclure. Ce qui remettrait en question les stratégies industrielle et touristique du Maroc.

En un mot, il y a des efforts qui sont déployés, a-t-il conclu, ajoutant qu’il ne croit pas en une généralisation en 2025, surtout que le Souverain a parlé d’une accélération du processus de généralisation de la couverture sociale universelle.

Lhoussein Louardi : l’amélioration de l’offre des soins tributaire de l’augmentation du budget du ministère de la santé qui ne dépasse pas les 6,55,% du BG de l’Etat

Au-delà de la couverture sanitaire, est ce que le citoyen bénéficie ou non d’une prise en charge médicale?

Il n’est un secret pour personne que le secteur de la santé est confronté à des problèmes et à des dysfonctionnements et à des déficits structurels profonds. Et l’on sait pertinemment que la solution de tous ces problèmes réside dans la couverture sanitaire universelle, que préconise l’OMS (organisation mondiale de la santé), que recommande l’ONU, et sur laquelle Sa Majesté le Roi insiste beaucoup dans Ses discours royaux (discours de la FT de 2017, à l’ouverture de la session d’automne du Parlement de 2017, le message royal aux assises médicales de Marrakech de 2013 et récemment dans le discours royal de la FT de 2020. Le Souverain insiste dans ces discours sur deux choses pour parvenir à assurer l’égalité et la justice en matière d’offres de soins au niveau national. Mais il faut aussi de l’égalité et de la justice en matière d’accès à ces prestations.

En matière de couverture sanitaire, il a fait état de deux chiffres. Au niveau mondial, un milliard de personnes ne bénéficie d’aucune protection médicale et 100 millions de personnes tombent en dessous du seuil de pauvreté du fait des dépenses catastrophiques de santé.

Le Maroc a franchi d’importantes étapes dans ce domaine. Avant 2005, le couverture médicale ne bénéficiait qu’à 13 ou 14% et le secteur privé et après 2005 et l’entrée en vigueur de l’AMO, l’on a atteint 34%. Et à partir de 2012, il y a eu une certaine accélération de la cadence. Ce qui a permis d’atteindre quelque 60 pc de la population au niveau national qui bénéficie de l’AMO. Des progrès sensibles

En 2012, un peu plus de 12% bénéficiait du RAMED.

En 2015, il y a eu la couverture médicale pour les étudiants (288.000 étudiants à l’époque), et puis il y a eu la couverture médicale des indépendants et les professions libérales (la loi 98/15). Ils sont un peu plus de 5 millions, selon le HCP.  Il y a aussi un autre projet de loi 63.16 qui attend toujours depuis 2015 à la Chambre des conseillers relatif à la couverture sanitaire des parents. Des efforts au niveau de l’accélération de la couverture médicale sont faits, a-t-il reconnu, expliquant que plus la couverture médicale est profitable au citoyen, plus elle crée des défis devant gouvernement, dont le premier concerne le financement, la gouvernance, et l’organisation. Le deuxième défi a trait à la mise en œuvre, le troisième concerne l’amélioration qualitative du système de santé, le renforcement de son infrastructure, l’augmentation de ses ressources humaines, le renforcement de ses équipements biomédicaux. Quant au quatrième défi et qui est le plus décisif, il requiert des mesures audacieuses pour accompagner les réformes à entreprendre dont en premier l’offre de soins. Pour y parvenir il est impératif d’augmenter le budget du ministère de la santé qui ne dépasse pas 6,55%  (2019 et 2020) du budget général de l’Etat (BGE) en dehors de la dette publique. Si on prend compte de cette dette publique, cette proportion ne dépasse 3,68%, alors que l’OMS recommande 10, 11 voir 12% du BDE. Durant les quinze dernières années, le ministère de la santé, ce budget varie entre 1,3 et 1,4% du PIB qui enregistre tous les ans des augmentations dont est exclu le secteur de la santé, un secteur aussi productif que d’autres comme l’a montré la Covid-19, a-t-il souligné, alors que le modèle de développement vise à l’amélioration non seulement de l’augmentation de la richesse mais également de sa répartition.

Autres points aussi importants que cela ont trait à la médecine familiale, afin que sa famille ait son médecin de famille traitant et au renforcement de la politique des médicaments à travers notamment une plus grande et rapide diminution des prix des médicaments, une suppression de la TVA sur tous les médicaments pour aller vers la production locale des médicaments. L’on a aussi besoin d’une fonction publique hospitalière. Les problèmes du secteur le diffèrent de tous les autres secteurs. Ceux qui n’ont pas mis en place une fonction publique hospitalière ont opté pour des systèmes qui lui ressemblent. En France il y a la fonction publique de l’Etat, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière pour les différencier, car leurs problèmes différent ne serait ce qu’au niveau des ressources humaines.

L’on a aussi besoin d’instaurer un service médical obligatoire d’un an ou plus que tous les lauréats des facultés de médecine et de pharmacie et de médecine dentaire doivent effectuer dans les zones reculées. On a les airs médicaux on est à 1,5 personnel de santé pour 1000 habitants contre 4, 45 personnels recommandés par l’OMS. Il est nécessaire aussi d’accorder à la recherche scientifique l’intérêt qu’elle mérite, comme l’a montré la crise du Covid-19, a-t-il relevé.

S’agissant de la couverture médicale enfin, il importe de ne pas perdre de vue les défis à venir. C’est pourquoi, il faut insister rendre la couverture médicale obligatoire et non facultative. C’est un fonds solidaire « obligatoire » par la force de la loi, sans lequel on va résoudre le problème de la couverture médicale.

Il est temps d’activer la mise en œuvre des textes législatifs en particulier les décrets d’application des lois adoptées notamment la loi 98-15 des indépendants et des professions libérales. il est enfin indispensable de procéder à la mise en œuvre progressive et participative avec les professionnels en ce qui concerne les contributions.

Enfin il est impératif de réfléchir sur la couverture médicale complémentaire.

Abdelouahed Souhail : Le problème réside dans le dysfonctionnement et les défaillances du modèle économique et social en vigueur.

Se référant à l’exposé du Pr Guedira, il a souligné que cet exposé a montré que le Maroc n’est pas intégré dans ce qu’on appelle les politiques de couverture sociale, tel que définies par l’OIT, l’ONU ou le Conseil économique, social et environnemental.

Pour l’ONU, la couverture sociale universelle fait partie intégrante des droits de l’homme. Il s’agit aussi d’une nécessité économique et sociale. C’est une activité économique et sociale. La couverture sociale joue un rôle dans la redistribution du revenu, des richesses et des opportunités, contribuant ainsi à l’inclusion économique des personnes dans le besoin.

Selon l’ONU, ajoute-t-il, la responsabilité de réaliser ce droit à la couverture sociale incombe globalement et principalement à l’Etat.

Le discours de Sa Majesté lors de la Fête du Trône de cette année appelle donc à aller dans ce sens. Le pays se doit de disposer pour ce faire d’une vision et d’un programme relatif à la couverture sociale universelle à réaliser au cours des cinq prochaines années (2020-2025).

En l’état actuel des choses, le Maroc consacre 5% seulement du PIB aux dépenses en matière de couverture médicale, selon le CESE, qui indique aussi que 60% de la population active n’est pas couverte par un système de retraite et que 46% de la population active est dépourvue de couverture médicale. Ce qui correspond en fait à l’informel, dont l’existence relève d’une responsabilité politique, constitutionnelle et des droits humains.

La majorité des actifs ne dispose pas d’une assurance sociale particulière contre les accidents de travail et les maladies professionnelles. Ce qui constitue un drame en soi.

Au-delà de tout cela, on a un système et une multitude d’intervenants qui n’ont rien de commun. Il n’y a pas d’harmonie dans le travail et les approches.

Selon plusieurs études, on a trois millions de salariés des secteurs public et privé dont les enfants bénéficient d’allocations familiales. Autrement dit, des millions d’enfants marocains en sont exclus.

Des programmes comme Tayssir, d’aides aux veuves ou d’un million de cartables connaissent des insuffisances à tous les niveaux. Il en est ainsi de l’indemnité pour perte d’emploi. Les systèmes de retraite ne bénéficient en tout qu’à à un demi million de personnes. Les pensions pour les personnes en situation de handicap ne dépassent pas 50.000 DH.

Pour les enfants, seul 48 pc d’entre eux bénéficient des systèmes de couverture sociale en place. 40% des personnes actives sont couverts.

Pour les personnes âgées, seul 20% sont couverts, à l’exclusion de 80% d’entre eux.

Ce qui signifie en d’autres termes que l’on vit dans un pays qui marche à deux vitesses : une partie bénéficie de certaines réalisations et une partie en est exclue.

En fait le problème est la conséquence inéluctable du modèle économique et social en place. Il ne peut y avoir d’acquis sociaux en dehors d’un modèle économique INCLUSIF dans un Etat de Droit qui reconnait effectivement les droits, lesquels droits doivent être de qualité.

Se posent donc à prime abord pour le Maroc le problème d’une vision homogène globale sur la problématique de la couverture sociale en partant évidemment de ce qui existe déjà.

Ex : la pension de retraite de la CNSS est insuffisante (bloquée dans 6000 DH).

La question des polycliniques, que d’aucuns veulent «privatiser», alors que d’autres solutions sont possibles.

Le problème interpelle donc le modèle de développement dans son intégralité, a-t-il dit, soulignant que le secteur social et médical font partie des activités génératrices d’emplois et de richesses, comme on l’a constaté lors de la crise du Covid-19.

Ce qui requiert un débat public ouvert avec la participation de toutes les parties concernées pour parvenir à un pays solidaire à commencer par le financement (le Chili consacre 20% de son PIB de la couverture sociale).  Il importe aussi de réfléchir sur le moyen de développer aussi un système solidaire et de réduire les couts ou autres, a-t-il dit, recommandant davantage de débats pour parvenir à des solutions innovantes.

M’Barek Tafsi

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