La Lituanie défie le géant chinois

Attendons pour voir…

Nabil El Biousaadi

Le gouvernement lituanien a fait, vis-à-vis de Pékin, ce qu’il ne fallait vraiment pas faire. En effet, en dépit de la campagne de pression à laquelle s’est adonnée la Chine, depuis plusieurs décennies, pour isoler l’île Taïwan par peur de voir cette dernière bénéficier d’une légitimité internationale, la Lituanie, faisant fi de « l’engagement politique pris lors de l’établissement des relations diplomatiques » entre les deux pays et défiant ouvertement le géant chinois, a ouvert, ce 18 novembre 2021, un « bureau de représentation de Taïwan » à Vilnius et non pas « une représentation de Taïpeh »[la capitale], comme l’aurait souhaité la Chine afin qu’il ne puisse pas servir, de facto, d’ambassade taïwanaise en Lituanie.

Qualifiant de « particulièrement odieuse » la décision prise par la Lituanie, d’ouvrir ce bureau qui se rapproche plus d’une « ambassade de Taïwan » en territoire européen, la Chine a immédiatement proféré des menaces non voilées mais dont les contours sont encore flous à l’encontre de la Lituanie qui devrait, dorénavant, « s’estimer responsable de tout ce qui pourrait lui arriver ».

« Regrettant » la décision chinoise, la Lituanie, qui s’est dite « en droit d’étendre sa coopération avec Taïwan », y compris par l’établissement de missions non diplomatiques, a « réaffirmé », ce dimanche, dans un communiqué de son ministère des Affaires étrangères, « son adhésion à la politique » d’une seule Chine.

Pour rappel, dès qu’en Juillet dernier, la Lituanie avait fait part de son intention d’ouvrir cette représentation, la Chine avait, immédiatement, rappelé son ambassadeur en Lituanie et exigé que Vilnius fasse de même en rappelant son ambassadrice en Chine ; ce que la Lituanie s’était empressée de faire.

Aussi, pour « régulariser » cette situation et combler le « vide diplomatique » qui sévit entre les deux pays, dès l’annonce de l’ouverture officielle de ce « bureau », , la Chine, accusant la Lituanie de « créer un mauvais précédent sur la scène internationale » a déclaré, dans un communiqué en date du dimanche 21 Novembre, que son gouvernement « a dû abaisser les relations diplomatiques entre les deux pays (…) afin de sauvegarder sa souveraineté et les normes fondamentales des relations internationales » en rétrogradant les relations entre Pékin et Vilnius au rang de « chargé d’affaires » et invité « le gouvernement lituanien à assumer toutes les conséquences qui en découlent ».

Force est de reconnaitre, toutefois, que la dégradation des relations entre Pékin et Vilnius n’a pas pour seule cause l’ouverture de cette « représentation diplomatique taïwanaise »  puisque c’est depuis plusieurs mois que la Lituanie ne cesse de provoquer le géant asiatique.

La première provocation avait eu lieu lorsqu’en mai dernier, l’ancienne république soviétique, non contente de claquer la porte du « groupe des 17+1 », cette plateforme diplomatique regroupant la Chine et 17 pays européens, avait appelé ces derniers à la suivre avant de « recommander » en septembre, aux utilisateurs de smartphones chinois à travers le monde, de les « jeter au plus vite » car le Centre national lituanien de cyber-sécurité avait conclu que le fabricant « Xiaomi » ainsi que d’autres constructeurs chinois auraient installé des logiciels espions « dormants » dans les appareils qu’ils écoulent dans le monde entier. 

Ainsi, comme l’a déclaré, à l’antenne de France 24, Emilian Kavalski, spécialiste des relations entre la Chine et les pays d’Europe de l’Est à l’Université Jagellon de Cracovie, « on peut dire que la Lituanie est le pays qui a pris les mesures antichinoises les plus radicales en Europe ».

Devenue, désormais, une épine qui ne cesse de s’enfoncer dans le pied du géant chinois, la Lituanie va-t-elle faire des émules, notamment dans le vieux continent, et bousculer l’Empire du milieu ? Attendons, pour voir…

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