L’écœurement des victimes

Liberté sous contrôle judiciaire du violeur présumé Jacques Bouthier 

Karim Ben Amar

L’ex-PDG du groupe Assu 2000,  Jacques Bouthier, a été remis en liberté sous contrôle judiciaire. Cette libération est assortie d’une caution de 500 000 euros. Cette décision de la chambre d’instruction de Paris est fortement contestée aussi bien au Maroc qu’en France. Les victimes présumées s’insurgent devant une telle décision de justice. Au Royaume et à l’Hexagone, les Associations des droits des victimes montent au créneau. C’est le cas à Rabat, où sous un soleil de plomb,  l’Association marocaine des droits des victimes (AMDV) a organisé une manifestation devant le consulat général de France. Les détails.

La nouvelle est tombée comme un couperet. Le violeur présumé Jacques Bouthier a été remis en liberté sous contrôle judiciaire. Quelques jours après la confirmation de ce « passe-droit », le  richissime courtier en assurance, mis en examen à Paris en mai 2022, notamment pour traite d’êtres humains et viols sur mineures, les associations des victimes présumées se sont mobilisées pour dénoncer une décision qu’elles jugent inacceptable.

Vendredi après-midi, l’Association marocaine des droits des victimes (AMDV) a organisé une manifestation devant le consulat général de France à Rabat. Sa présidente, Aicha Guella, estime que « cette remise en liberté encourage l’impunité d’un homme riche et puissant ». Pour l’avocat, cette décision est injuste.  Aicha Guella a souligné son inquiètude quant à l’issue possible du procès de Jacques Bouthier et de ses co-accusés en France. Notons que les présumées victimes rejettent elles aussi cette décision. Selon elles, cette décision de justice porte une grave atteinte à leur sécurité et à leur dignité.

L’AMDV a indiqué par ailleurs que ses avocats à Paris vont interjeter appel en se réservant le droit de porter cette affaire devant la justice de l’Union européenne.

Les raisons avancées de cette libération remontent à fin février, lorsqu’ une expertise médicale avait conclu que l’ex-PDG d’Assu 2000 présentait un « possible processus démentiel débutant » avec un « déclin cognitif suspect imposant la réalisation d’un bilan neuropsychologique et une consultation mémoire ». L’expertise médicale a conclu que Jacques Bouthier souffrait d’une altération de l’état général associée à une dénutrition sévère, liée à sa détention.

D’après la même source, son état de santé était ainsi « incompatible avec la poursuite de la détention », ajoutant que le mis en examen de 76 ans devait être transféré en milieu hospitalier dès que possible.

Cette mesure a été assortie du versement d’une caution de 500.000 euros, servant de garantie de représentation et pour l’indemnisation possible et future des victimes, en cas de condamnation.

En France, l’avocat de la plaignante principale auparavant retenue en otage par Jacques Bouthier, a indiqué que celle-ci a appris « avec stupeur » cette remise en liberté sous contrôle judiciaire « de celui qui l’a suppliciée pendant tant d’années ».

Rappelons que huit collaborateurs de l’ex-patron français, six Marocains et deux Français, ont été renvoyés récemment devant un tribunal criminel de la ville de Tanger, notamment pour « traite humaine » et « harcèlement sexuel », à l’issue d’une enquête ouverte après des plaintes déposée par six jeunes ex-employées marocaines d’Assu 2000 en mai 2022 et qui se sont constituées partie civile.

Au Maroc, le procès doit débuter le 28 mars prochain, mais Aïcha Guella s’attend à une demande de report de la part des avocats de la défense. 

Jacques Bouthier a été mis en examen en mai dernier pour traite des êtres humains, viols sur mineure mais également pour association de malfaiteurs en vue de commettre le crime d’enlèvement, séquestration en bande organisée, ainsi que détention d’images pédopornographiques.

Ce feuilleton  judiciaire survient dans un climat de crise diplomatique entre le Maroc et la France.

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